Dans le marché aux fruits du secteur excentré de I-11, une foule fourmillait tôt ce matin pour acheter pommes, oranges, mandarines et goyaves lorsqu’une bombe d’environ cinq kilos, cachée dans une caisse de fruits, a explosé pour creuser un cratère d’environ 1m 50 de diamètre. Selon un journaliste de l’AFP sur place, des flaques de sang et des lambeaux de chair tapissaient ce vaste marché populaire à ciel ouvert aussitôt quadrillé par la police et les forces antiterroristes.
«L’explosion a eu lieu vers 8h00 (3h 00 GMT), des corps volaient littéralement dans les airs avant de tomber sur le sol», a déclaré à l’AFP Muhammad Tahir, un commerçant qui tient un étal dans ce marché. Un autre homme rencontré sur place, Khair Ullah, a fondu en larmes en apprenant la mort de son frère. «Mon frère travaillait ici, mais il n’est plus», a-t-il soufflé, la voie étranglée de sanglots. «Il y avait environ 2 000 personnes dans le marché lorsque la bombe artisanale, d’environ quatre ou cinq kilos, a explosé dans le marché», a déclaré Muhammad Khalid Khattak, l’inspecteur en chef de la police d’Islamabad. Cet attentat, qui n’avait pas été revendiqué dans l’immédiat, est le plus sanglant perpétré dans la capitale Islamabad, généralement épargnée par les violences qui endeuillent le reste du pays, depuis l’attaque contre l’hôtel Marriott qui avait fait une cinquantaine de morts en 2008.
Au Pakistan, les attentats frappent davantage la métropole économique Karachi (sud), les zones du nord-ouest à la frontière de l’Afghanistan et la province instable du Baloutchistan. Un groupe rebelle sécessionniste de cette province revendiquait hier un attentat à la bombe contre un train de passagers ayant fait au moins 13 morts et une quarantaine de blessés. La bombe cachée dans une voiture du train Jaffar Express a explosé juste près de la gare de Sibi, petite localité située à 160 kilomètres au sud de la capitale provinciale Quetta, ont indiqué les autorités. Une partie du train a aussitôt pris feu. L’attentat contre ce train a été perpétré «en représailles de l’opération militaire la veille à Kalat», a déclaré à l’AFP Mureed Baloch, un porte-parole de l’Armée baloutche unie (UBA), un des principaux groupes rebelles opérant dans la région. «Nous prévenons la population : ne prenez pas le train car nous allons poursuivre ces attaques», a-t-il ajouté. En effet, selon les forces pakistanaises, «environ 40 rebelles de l’Armée républicaine baloutche (BRA) et de l’Armée de libération du Baloutchistan (BLA) ont été tués» dans cette opération, un bilan qui n’a pu être confirmé de sources indépendantes.
Les pourparlers de paix en otage
• L’attentat d’Islamabad intervient alors que le gouvernement d’Islamabad et les combattants Tehreek-e-Taliban Pakistan (TTP), une coalition de groupes islamistes armés, se sont engagés à respecter un cessez-le-feu dans l’espoir de stimuler leurs pourparlers de paix. Les insurgés ont d’ailleurs prolongé la semaine dernière jusqu’au 10 avril prochain ce cessez-le-feu et demandé au gouvernement de libérer 300 de leurs partisans. «Si le gouvernement répond favorablement à nos demandes, nous convoquerons une réunion de notre conseil central pour décider de la suite des choses», avait soutenu le porte-parole de la rébellion, Shahidullah Shahid. Les commentateurs pakistanais demeurent toutefois sceptiques quant à l’issue de ces pourparlers estimant que les demandes des insurgés talibans, comme l’application de leur version rigoriste de la loi islamique, demeurent difficilement acceptables par le gouvernement.
R.I. / Agences