Les pouvoirs publics n’ont certainement pas l’intention de laisser faire les fraudeurs
De la réussite de cette mesure dépendent, en effet, les prochains succès du gouvernement dans sa démarche économique future.
Aux premiers jours de l’obligation de l’usage du chèque pour toute transaction financière dépassant le un million de dinars, il semble que les opérations se font sans de gros dégâts. Les opérateurs économiques se plient donc à cette mesure, du moins pour les transactions qui ont été enregistrées, aux deux premiers jours. Il reste sans doute beaucoup d’acteurs qui ne tiennent toujours pas compte du décret exécutif, mais des sources dignes de foi ont affirmé à L’Expression que les pouvoirs publics n’ont certainement pas l’intention de laisser faire les fraudeurs.
Cependant, devant l’ampleur de la tâche, les autorités financières ont décidé de procéder par étapes et centrer leur contrôle sur les plus importantes transactions, celles qui se chiffrent en dizaines de millions de dinars. Concrètement, le contrôle s’effectue sur les opérations que réalisent quelque 16.000 exportateurs sur les 40.000 que compte le commerce extérieur algérien. Des directives fermes ont été données aux établissements financiers pour une surveillance efficace des transactions effectuées par ces importateurs, notamment sur les aspects financiers. Ainsi, les banques ont reçu l’instruction ferme de refuser tout dépôt en espèces destiné à payer une marchandise ou un service.
Il reste qu’à côté de cette fermeté, les banques ont également été instruites de prendre en considération la spécificité de certaines activités commerciales, dont la nature rendrait très difficile une application immédiate de la mesure de l’usage obligatoire du chèque. Ainsi, certains opérateurs peuvent dans un délai assez court procéder au paiement traditionnel, mais à charge pour ces commerçants de se conformer à l’esprit et à la lettre du décret exécutif au plus tôt. En fait, cette flexibilité est rendue nécessaire pour éviter une hausse brutale et artificielle des prix des produits de large consommation, comme cela avait été constaté en 2011.
Pour l’heure, les observateurs qui notent une absence de «réaction épidermique» des milieux d’affaires, à l’exception de la sortie médiatique du chef du groupe parlementaire du FLN, estiment qu’il est encore trop tôt pour juger du succès ou pas de la décision du ministre des Finances, très engagé contre la lutte de la circulation de l’argent liquide dans la sphère commerciale nationale.
De la réussite de cette mesure dépendent, en effet, les prochains succès du gouvernement dans sa démarche économique future. Et pour cause, c’est bien l’argent de la «chkara» qui pourrit la vie aux acteurs de la sphère économique réelle. La concurrence déloyale que leur pratiquent les tenants du marché parallèle a conduit à une situation inquiétante, à savoir que l’Algérie a beaucoup d’atouts pour amorcer un démarrage économique efficient, mais reste engluée dans une logique d’import-import qui fragilise son économie.
Aussi, on affirme au ministère des Finances que l’actuel virage est, de loin, l’acte le plus important de l’Etat contre les lobbies de l’importation. Il s’agit de siphonner une partie de la puissance financière du marché parallèle et favoriser dans le paysage économique national un mode de transaction moderne qui assure une traçabilité. Ce n’est pas gagné d’avance, mais beaucoup d’observateurs affirment que l’Algérie engage, cette fois, la bonne bataille.