Ouyahia-Saâdani : Une bataille peut en cacher une autre

Ouyahia-Saâdani : Une bataille peut en cacher une autre

Après les salves répétées du secrétaire général du FLN, Amar Saadani, c’est autour de quelques cadres du RND de se livrer à quelques activismes dans la perspective de bloquer le congrès extraordinaire du parti prévu entre le 5 et le 7 mai prochain et qui verra sans aucun doute l’intronisation d’Ahmed Ouyahia.

Ainsi des contestataires ont décidé depuis quelques jours de rassembler « les pièces à conviction » à même de leur permettre de saisir le ministre de l’intérieur pour bloquer les futures assises prévues dans un peu moins d’un mois. «Nous sommes en train de préparer le dossier et de rassembler les preuves qui accablent Ahmed Ouyahia», affirme à un confrère une des têtes pensantes de la contestation, par ailleurs membre du Conseil national. Outre les manquements au règlement intérieur et au statut du parti dont ils accablent l’actuel secrétaire général par intérim, les contestataires comptent s’appuyer également sur certaines infractions qu’ils ont relevées dans la préparation du congrès. Et à se fier à leurs déclarations, ils entendant même recourir à d’autres actions dans les prochains jours mais dont ils n’ont pas encore précisé la nature.

Cette sortie du bois de ces contestataires intervient quelques jours après la charge au vitriol du secrétaire général du FLN, Amar Saâdani, sur les ondes d’une radio nationale. «La seule motivation d’Ahmed Ouyahia est de prendre la place du président Bouteflika», a lâché, sans ambages, Amar Saâdani. «Vous voulez renverser le chef de l’Etat et prendre sa place », a-t-il dit non sans considérer qu’Ahmed Ouyahia doit quitter son poste qu’il occupe actuellement, à savoir chef de cabinet de la présidence de la république.

Selon l’homme fort du FLN, dont on aura tort de prendre ses coups de gueule pour des caprices, après avoir fourni suffisamment de preuves de son appartenance au cercle restreint de ceux, peu nombreux, qui sont dans le secret des Dieux, notamment après sa charge contre l’ex patron du DRS et ses plaidoiries en faveur du retour de Chakib Khellil, Ahmed Ouyahia est un homme «dépassé» qui « réfléchit » comme dans les années 90. « Ahmed Ouyahia n’a jamais donné quoique ce soit à l’Algérie ni au président Bouteflika », a-t-il dit. Et de rappeler qu’il a été à l’origine de l’emprisonnement de centaines de cadres à la deuxième moitié des années 90, des accusations qui s’apparentent à des coups de massue.

Dès lors il est à s’interroger sur cette subite focalisation sur Ahmed Ouyahia, devenu en l’espace de quelques semaines une espèce de tête de turc qu’il faut absolument abattre, politiquement s’entend. A l’évidence, on pourrait voir dans l’attitude de Saadani une forme de rancœur au refus d’Ouyahia de s’associer à son initiative de création d’un front de soutien au programme du président de la république, une forme d’OPNI (objet politique non identifié) dont personne n’en saisit l’objectif. Mais est-ce là seulement l’unique raison ? A bien des égards, il s’agit d’une bataille en sourdine en perspective des futures échéances électorales, à commencer par les élections locales et législatives prévues l’an prochain et l’élection présidentielle prévue en 2019. Echaudé par l’expérience des élections sénatoriales, le FLN ne veut pas se laisser distancer par son « frère ennemi » lors des prochaines échéances électorales, une perspective fort possible avec un Ouyahia maintenu à la présidence et dont le pouvoir serait renforcé.

Mais dans le flou artistique politique actuel, il n’est pas exclu que l’un et l’autre nourrissent des ambitions présidentielles mal contenues, d’où cette guerre à « fleurets mouchetés » et ces tirs nourris  de Saâdani dans l’espoir de susciter un mouvement de redressement au sein du RND, ce qui ne manquera pas certainement d’emporter dans son sillage Ouyahia. Il y a aussi le souci pour le FLN d’empêcher le patron du RND de reprendre la tête du gouvernement et de placer le maximum de ministres issus du parti. Mais au RND, on semble avoir compris et saisi le sens de ces attaques et ces manœuvres. «Il n’y aura ni report du congrès ni démission d’Ahmed Ouyahia !

Encore une fois, ce dernier est revenu par la volonté des militants et c’est cette même volonté qui s’exprimera cette fois-ci. Ahmed Ouyahia sera même réélu à une majorité écrasante. Si ces personnes ont la majorité comme ils le prétendent, pourquoi demandent-elles le report ? Qu’elles viennent au congrès », assène Seddik Chihab, un homme réputé très proche d’Ouyahia.