Ouyahia, destin de présidentiable ?

Ouyahia, destin de présidentiable ?
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Ahmed Ouyahia a affirmé, mercredi soir, que le pays ne subit pas de crise politique mais qu’il est en prise à diverses crises sociales. Le Premier ministre, qui s’exprimait dans une émission télévisée en qualité de secrétaire général du Rassemblement national démocratique (RND), a laissé entendre qu’il pourrait se présenter à la prochaine élection présidentielle si tel était son «destin».

Tarek Hafid – Alger (Le Soir) – Ahmed Ouyahia s’est exprimé, mercredi soir, sur le plateau du «Débat de l’heure» («Hiwar essaâ»), émission politique de la télévision publique. Coiffé de la double casquette de Premier ministre et de secrétaire général du RND, il a répondu aux questions de quatre journalistes. Ouyahia est resté fidèle à sa réputation: zélé et sûr de lui. Mais a-t-il pour autant été convaincant ? Peu sûr. Durant sa prestation, il a répété qu’il rejetait la nécessité de recourir à une dissolution de l’Assemblée et à l’installation d’une Assemblée constituante.

«L’Algérie ne vit pas une crise politique mais plutôt des crises sociales. Cela ne nécessite ni la dissolution du Parlement ni un changement de système politique. Il n’est donc pas nécessaire de recourir à la dissolution de l’Assemblée», expliquera-t-il. Pour ce qui est de l’Assemblée constituante, une exigence mise en avant par plusieurs personnalités politiques, son installation consacrera la négation de «50 années d’existence de l’Etat algérien». «L’Assemblée constituante ne nous rendra pas les morts de 1963 ni même les victimes de la tragédie nationale. Accepter l’idée d’une Assemblée constituante, et donc d’une nouvelle Constitution, reviendrait à effacer d’un trait 50 ans d’existence de l’Etat algérien. Cela n’apportera rien au pays.» Ouyahia rejette même la proposition d’un «débat national» émise par Abdelhamid Mehri. «Je respecte l’avis des autres. Mais je me demande à quoi servirait d’initier un tel débat. Souvenez-vous de l’initiative de Sid-Ahmed Ghozali lorsqu’il était chef du gouvernement.

Est-ce que cela nous a évité la catastrophe des années 90 ?» Puisqu’il n’y a pas de crise politique, quelle est l’utilité d’engager des «changements profonds»? Ouyahia, qui a reconnu la tenue de plusieurs réunions au plus haut sommet de l’Etat, estime qu’il est nécessaire d’entreprendre une révision «radicale» de la Constitution afin d’instaurer un «régime semi-présidentiel». En abordant la situation au sein de l’Alliance présidentielle, il confirmera l’existence d’une réelle crise entre les membres de cette instance politique qui s’est formée autour de Abdelaziz Bouteflika.

Le secrétaire général du RND tiendra des propos particulièrement acides envers la direction du Mouvement de la société pour la paix. Ainsi, selon lui, ce parti a été accepté en qualité de membre de l’Alliance non pas pour sa place sur l’échiquier politique algérien mais plutôt en signe de «reconnaissance au défunt Mahfoud Nahnah et à ses engagements au service de l’Algérie». Interrogé sur les raisons de l’éclatement des émeutes du début du mois de janvier, Ouyahia a indiqué qu’elles avaient été provoquées par les «barons de l’informel ». Le Premier ministre, qui prendra soin de ne pas citer de noms, a déclaré que l’Etat ne pouvait lutter de manière «frontale» contre les crimes économiques que sont le commerce informel et la contrebande.

«C’est la stabilité du pays qui est en jeu. Pour mener cette lutte, nous utilisons la même stratégie que nos vaillants combattants de l’ALN. Nous donnons un coup par-ci, un coup par-là.» Le Premier ministre avouera d’autres fiascos. Mis à mal par les questions répétitives du journaliste d’ El Djazaïr News, Ouyahia a fini par reconnaître que la tentative d’imposition du paiement pour les transactions dépassant 500 000 dinars a été un échec.

Mais ces revers n’entament en rien sa détermination à marcher vers le plus haut sommet de l’Etat. A la question de savoir s’il présenterait sa candidature à la magistrature suprême, Ouyahia paraphrasera une réplique de l’ancien président français Valéry Giscard d’Estaing. «Cette question avait été posée au président Giscard d’Estaing. Il avait dit que son élection était la rencontre d’un homme avec son destin», dira-t-il avec un large sourire. Donc, Ouyahia, qui sait parfaitement faire la différence entre les «haricots et les lentilles», attend patiemment son destin.

T. H.