Le ministre de l’Intérieur, Daho Ould Kablia, a adressé, mardi dernier, une instruction via laquelle il enjoint l’ensemble des walis de rejeter toute candidature de parlementaires en exercice aux élections locales du 29 novembre prochain. C’est ce que nous révèle une source très bien informée qui affirme que, «ce faisant, le gouvernement aura rattrapé un flagrant viol de la Constitution à la toute dernière minute !»
A l’origine de cette descente en catastrophe du ministre de l’Intérieur, qui a sévi la veille même de l’expiration des délais légaux fixés par la loi pour le dépôt des candidatures, soit mercredi 10 octobre à minuit, une alerte émise par les services concernés faisant état de cinq candidatures formulées par des sénateurs en exercice ! Fait inédit et, pour le moins cocasse, l’initiative de ces sénateurs renseigne sur l’étendue de la méprise des lois qui frappe la classe politique algérienne. Mais il faut dire que l’attrait du confort, matériel surtout, que procure la fonction de parlementaire peut mener à ce genre de situation. En fait, les cinq parlementaires en question, dont le mandat au Conseil de la nation prendra fin début janvier 2013, voulaient rempiler pour un autre mandat. Or, pour cela, ils devaient nécessairement se faire élire aux élections locales d’abord puis lors des sénatoriales qui s’ensuivront, lesquelles, pour rappel, sont circonscrites aux seuls élus locaux. Et si le Rassemblement national démocratique d’Ahmed Ouyahia «déplore » un seul cas, celui d’un sénateur proposé tête de liste du parti pour l’Assemblée populaire de wilaya à Boumerdès, c’est le Front de libération nationale de Abdelaziz Belkhadem qui «endosse » les quatre autres cas. Les quatre sénateurs en question sont tous membres du comité central, tous pro-Belkhadem et tous mouhafedhs du parti respectivement à Annaba (Zitouni Mohamed), à Skikda (Bousali Tayeb), à Oum-El-Bouaghi (Rachid Assas) et à Aïn Defla (Ahmed Kenoufa). Ce dernier est, par ailleurs, chef du groupe parlementaire du FLN au Sénat ! «Bien sûr, et suite à l’instruction du ministre de l’Intérieur, leurs candidatures seront rejetées car, outre le fait que ce cas d’espèce achoppe sur l’article 108 de la Constitution et de la loi électorale qui interdit à un élu porteur d’un mandat national de déposer sa démission qu’en des circonstances bien déterminées, cette première du genre aurait ouvert la voie à une aventure institutionnelle que le pays fait tout pour éviter depuis janvier 1992», nous révèle encore notre source. Lorsque, le 11 janvier 1992 en effet, le défunt président Chadli Bendjedid annonçait sa démission, le pays se retrouvera devant une situation d’un très grave vide institutionnel, le même Chadli ayant déjà dissous l’APN par décret, le 4 janvier ! C’est pour éviter ce type de situation qui a failli plonger le pays dans le néant que la Constitution de 1996 introduit une nouvelle institution, le Conseil de la nation. «Et le rôle du Sénat est double : assurer la continuité de l’Etat en toutes circonstances (cas d’empêchement pour le président de la République, guerre, etc.), ainsi que le blocage, via le tiers présidentiel, en cas d’une majorité islamiste à l’APN. Pour qu’une loi soit adoptée, il lui faut l’approbation des trois quarts des 144 membres qui composent la Chambre haute. Sachant en plus que, tous les trois ans, la moitié des membres du Sénat est renouvelée, imaginez alors ce que cela donnerait en termes de blocage institutionnel si jamais il était permis de démissionner de son mandat d’élu pour se présenter aux locales…». No comment…
K. A.