
La situation est donc claire, même si elle est terrifiante pour certains: pour financer l’économie nationale dans un contexte d’incertitude sur le marché pétrolier, il faut aller vers des solutions moins aléatoires. Le financement non conventionnel comme le recours au gaz de schiste sont donc les voies que le gouvernement a adoptées pour remplacer autant l’inopérabilité de la machine industrielle que l’inconstance du secteur agricole pour irriguer l’économie du pays. Mais, si le financement non conventionnel est de nature à produire des effets indésirables sur le corps social, il peut être suspendu, gelé ou carrément abandonné après une courte période, le temps de faire redémarrer la croissance. Par contre, le recours au gaz de schiste, et accessoirement au pétrole de schiste, maintenant, est une question beaucoup plus complexe.
Certes, au rythme de la consommation actuelle, la production de gaz ne suffira plus d’ici à 2030 au plus tard à combler la demande interne en croissance constante. Et donc qu’il faudra faire des choix parfois douloureux pour maintenir autant le confort social que les recettes provenant des contrats gaziers. Pour autant, aller vers l’exploitation du gaz de schiste est dangereux et coûteux.
Certes, le moment est stressant et les solutions de sortie de crise pas nombreuses, pas évidentes, sinon socialement coûteuses. Pour autant, d’aucuns s’interrogent sur la manière dont sera mis en place ce recours au gaz de schiste, comment il sera procédé à son extraction dans un pays qui connaît un fort stress hydrique et, surtout, les mesures de sécurité pour les régions de production. Autant de questions qui restent secondaires par rapport à l’urgence du moment.
Le gouvernement, en l’absence d’une opposition unie et solide, qui n’a pas malheureusement manifesté son intérêt aux défis du moment, et dont la seule préoccupation, hélas, est d’arriver vite en 2019, est en train de mener sa politique en toute quiétude, sans être bousculé ni contredit sur les travées du Parlement, comme dans toute démocratie qui se respecte. Une situation dramatique car le gouvernement aurait été aidé, même par une vive critique de sa démarche, par une saine opposition politique contre sa stratégie de sortie de crise. L’entêtement du recours au financement non conventionnel comme au gaz de schiste aurait été par la magie de la démocratie et de la lucidité politique des uns et des autres moins douloureux, plus rassembleur autour d’un défi commun et au nom de l’intérêt de tous, partis au pouvoir et opposition : passer sans encombre une étape économique difficile. Et mettre fin à un stérile débat sur les énergies comme moteur de la croissance.
