A quelques jours du début du mois de jeûne, on ne sait toujours pas si les boulangers mettront à exécution leur menace de débrayage ou si, au contraire, ils oublieront momentanément leurs revendications pour rejoindre l’UGCAA et assurer un «Ramadhan sans tension» à des consommateurs déjà sur les dents : «Des dizaines d’artisans ont déjà mis la clé sous le paillasson à cause des multiples problèmes dont souffre la profession, déplore le bureau de wilaya de l’Union nationale des boulangers.
Entre la hausse des prix des matières premières, les tracas des impôts, le refus incompréhensible de la Sonelgaz de nous dédommager pour les différentes coupures, la concurrence déloyale, nous ne savons plus où donner de la tête.» Selon cette même source, le nombre de ces
artisans a baissé de près de 60% dans une wilaya d’Oran qui ne compterait plus que 350 boulangers (sur le territoire national, 2.000 boulangers ont fermé boutique, ndlr) qui tentent vaille que vaille de faire subsister une profession au bord de la dépression :
«La Sonelgaz et les agents de la Direction du commerce s’acharnent sur les boulangers. Les premiers refusent de nous dédommager des coupures, malgré notre entente avec la DG d’Alger, et les seconds nous verbalisent parce que de la poussière de farine se trouvent sur les murs. C’est aussi incompréhensible que grave», avait dénoncé, il y a quelques mois, le président de la Fédération nationale des boulangers affiliés à l’UGCAA, Kalfat Youcef, au cours d’une conférence de presse à Oran. Le responsable local, Abed Mouad, avait ajouté qu’en ce qui concernait la wilaya d’Oran, «l’attitude de ces deux structures, conjuguée à la récente augmentation des prix de la levure et de l’améliorant, avait conduit trente boulangers à fermer boutique en l’espace d’une semaine».
Une situation étrangement propre à la seule wilaya d’Oran, avait encore insisté le même responsable. «Partout sur le territoire national, la Sonelgaz installe les nouveaux compteurs à double tarif chez les boulangers et lance les procédures d’indemnisation dans le cas des coupures, sauf à Oran où la Direction régionale répond n’avoir reçu aucune instruction», avait encore ajouté Kalfat Youcef, en rappelant qu’une coupure d’une heure occasionne une perte évaluée à 7 500 DA.
«La Sonelgaz comme la Direction du commerce doivent savoir que leur attitude a conduit plusieurs boulangers à rendre leurs registres du commerce et à travailler au noir. Ce qu’aucune personne dotée de bon sens ne
songerait à leur reprocher», avait conclu Abed Mouad, en prévenant que les boulangers d’Oran sont au bord de l’explosion.
Interrogés sur les solutions qu’ils préconisent, les boulangers affirment ne pas vouloir répercuter leurs charges sur le consommateur : «Le pouvoir d’achat est déjà suffisamment érodé en Algérie et nous ne cherchons pas à augmenter le prix de la baguette de pain.
Cela ne servirait à rien. Ce qu’il faudrait, c’est que l’Etat nous vienne en aide, par exemple, en nous exemptant d’impôts comme tous les autres artisans et en intervenant auprès de la Sonelgaz pour la question des dédommagements.
La situation devient vraiment intenable», entend-on auprès des boulangers d’Oran qui appellent à une résolution rapide de la situation qui, disent-ils, pourrit de jour en jour en raison de l’accumulation des charges : «Ce n’est pas pour rien que certains d’entre nous menacent de recourir à un débrayage, ajoutent-ils. Cela fait des années que nous tirons la sonnette d’alarme, mais personne ne s’en soucie.»
Même si personne n’a l’air d’y croire vraiment (une grève du pain pendant le Ramadhan ? Pensez donc !), le débrayage semble pour bien des boulangers la meilleure manière d’attirer l’attention des pouvoirs publics. Après tout, c’est la seule méthode qui semble avoir réussi à d’autres corporations.