Le procès de l’affaire Sonatrach, impliquant l’ex-n°2 de la compagnie nationale pétrolière Feghouli Abdelhafid, s’ouvrira mercredi devant le pôle pénal spécialisé d’Oran, a-t-on appris auprès du parquet général de la cour d’Oran.
Aux côtés de l’ancien vice-président du groupe Sonatrach, quatre autres anciens hauts cadres du même groupe comparaîtront devant la justice pour répondre des chefs d’accusation de passation de marché contraire à la réglementation et dilapidation de deniers publics.
Il s’agit de l’ex-PDG Mohamed Meziane, placé sous contrôle judiciaire, l’ex-directeur des études et du développement de Sonatrach-Aval, l’ex-directeur général de SPA Safir (société algéro-française d’ingénierie et de réalisation), M. Benamar, cadre à la retraite.
A noter qu’un sixième haut cadre était déjà mis hors de cause dans cette affaire, et ce, à la faveur d’un non-lieu confirmé par la chambre d’accusation qui a levé le contrôle judiciaire auquel celui-ci était astreint (non-lieu intégral et définitif, pour s’en tenir au lexique judiciaire), précise-t-on de même source.
Il faut rappeler, dans le même registre de la procédure, que cette affaire, ouverte au début par le tribunal d’Arzew relevant de la cour d’Oran, avait été par la suite revendiquée par le pôle pénal à compétence élargie eu égard à son caractère de crime économique.
L’ex-vice-président du groupe Sonatrach, qui avait occupé transitoirement le poste du PDG du groupe par intérim suite à l’inculpation de Mohamed Meziane en janvier 2010, au niveau de la Cour d’Alger, et qui cumulait jusque là les deux fonctions de PDG de Sonatrach-Aval et Tassili Airlines, avait été placé sous mandat de dépôt, le lundi 20 décembre, en compagnie de trois autres hauts responsables de l’activité Aval Sonatrach, et ce, sur ordre du juge d’instruction près la 2ème chambre du tribunal d’Arzew, dans le cadre d’une enquête sur une série de transactions douteuses, entre 2007 et 2008, diligentée par les services de la DRS.
Sur le plan de droit, au coeur de cette affaire, c’est encore une fois le fameux mode du « gré à gré », comme mode en raccourci qu’offrait la circulaire A 408 R-15, avec à la clé le motif d’urgence pour passer outre au code des marchés publics. Le marché le plus pesant en termes de finances dans cette affaire est celui de la réalisation d’une station de stockage d’azote au complexe pétrochimique d’Arzew pour un montant de 10 millions d’euros.
Un autre marché non moins important – une enveloppe de près de 16,8 millions d’euros, soit l’équivalent de 168 milliards de centimes – a été attribué à Safir sans le recours à l’appel d’offres par le biais de conventions signées entre Sonatrach et cette société algéro-française créée en 1992 entre Sonatrach, Sonelgaz et Gaz de France à travers sa filiale Sofregaz.
La même année 2008, Safir, dont l’État algérien détient 51% (Sonatrach 36% et Sonelgaz 15%) contre 49% pour l’entreprise française Marais Contracting, décrochait un autre marché d’un montant de 27 milliards de centimes pour des prestations d’engineering et de services de projets.
Les raisons de ces contrats de plusieurs milliards passés de gré à gré, sans solliciter des appels d’offres et les publier dans le BAOSEM, le bulletin d’offres du secteur de l’énergie et des mines, comme le stipule la réglementation en vigueur, restent inexpliquées, car il s’agit de contrats d’une durée de 3 ans et 24 mois et non des travaux d’urgence de quelques jours, voire de quelques semaines pour procéder au gré à gré
Installée depuis le départ de l’entreprise Gaz de France en 2003, Marais Contracting a pris le relais dans Safir SPA, en 2004. Mais, en 2005, ses employés ont entamé des sit-in et une grève pour dénoncer l’incompatibilité et l’inutilité de cette partie française qui n’a rien apporté au groupe Safir SPA.
Après avoir frôlé le dépôt de bilan faute de commandes, Safir avait obtenu son premier gros contrat de gré à gré avec Sonatrach, en 2007. Il s’agissait de la construction d’un nouveau centre de stockage et de conditionnement d’azote au niveau de la zone industrielle d’Arzew, près d’Oran. D’un montant de dix millions d’euros, ce contrat marquait le retour de Safir au premier plan dans l’industrie pétrolière algérienne.
Le premier contrat qu’elle avait décroché concernait la rénovation du complexe de liquéfaction de gaz naturel (GL4/Z) d’Arzew pour un montant de 35 millions de dollars. L’objectif de cette société mixte était d’améliorer les résultats des unités industrielles des branches Amont et Aval de la compagnie.
Mais la cession des actions à Marais Contracting, une entreprise spécialisée dans le domaine des réseaux de fibres optiques et les télécommunications, en a surpris plus d’un, en 2003, et suscité la colère des travailleurs en 2005.
Houari Saaïdia