Les magasins ne désemplissent pas
Les ménagères, ne ratant aucune occasion, font des incursions dans les magasins et marchés pour acheter les habits de l’Aïd devant distraire les enfants le jour j.
Le Ramadhan tire à sa fin. L´odeur de la hrira commence à laisser place aux senteurs d´amande, de vanille et des gâteaux à préparer en prévision de la fête de l´Aïd El Fitr. La ville est à moins cinq jours, de ce rituel religieux, gagnée par la frénésie des achats et du shopping tous azimuts.
Les rues d´Oran, qui ne désemplissent pas du matin au soir, se vident juste le temps de rompre le jeûne, se «remplir le ventre» avant de repartir à l´assaut des vitrines.
Entre deux couffins ramenés à l’effet de préparer la popote quotidienne, les ménagères ne ratant aucune occasion, font, à chacune de leurs sorties, des incursions dans les marchés et boutiques de vêtements pour acheter qui un pantalon, qui une robe ou des chaussures pour les enfants.
Les magasins du centre-ville d’Oran, spécialisés dans la vente des habits réalisent, ces derniers jours, des records en matière de vente. Tous les stocks sont épuisés.
Les magasins de vêtements du centre-ville ou ceux de Choupot sont envahis à peine la hrira consommée, les acheteurs se bousculent d’ores et déjà à l’intérieur des commerces. Ceux qui s´approvisionnent de Zouïa (ville située à l’extrême-ouest du pays très connu pour son trabendo) par grosses quantités, ceux qui utilisent les services des soldats du trabendo qui écument les marchés de Turquie et d´Alicante, ont tous fait le plein de stocks, la finalité étant de réaliser les meilleures affaires.
La nouveauté de ces dernières années réside dans l´intrusion de produits importés de Chine. Les vitrines et commerces proposant la production du géant asiatique sont tout aussi assaillis.
La production asiatique est bien cotée dans le marché oranais, vu ses prix imbattables.
En faisant leurs achats dans des boutiques chinoises, des dizaines de pères et responsables de familles, les ciblant, boudent brutalement la production locale ou les produits importés d´Europe. Nombre de chalands diront que les produits chinois achetés, sont à des prix abordables, et n´ont rien à envier aux produits au label connu.
La Chine, qui n´avait pas réussi du temps de sa révolution culturelle à nous imposer son col Mao, a réussi à conquérir les coeurs des ménagères, ces dernières années. Les temps ont radicalement changé depuis l’anorak ou la parka de Che Guevara, mais les moeurs également.
A Oran, s’habiller à la mode ne connaîtra jamais d’épilogue, les gens se reconnaissent à travers les habits et les chaussures! Toutefois, on s´habille chinois sans gêne et sans avoir à s’inquiéter d´être taxé de mauvais frimeur ou encore d’une situation sociale dégradée. Les gens, notamment les jeunes, commencent à prendre conscience que l’habit ne fait pas le moine d’où l’incroyable rush que connaissent les points de vente de la friperie.
Le gigantesque marché de la fripe sis dans le quartier populaire d’El-Hamri ainsi que tous les magasins ouverts un peu partout à Oran sont pris d’assaut par de nombreuses familles en quête des habits de l’Aïd avec comme seule préoccupation en tête le prix. «Ce n’est pas du tout un complexe de s’approvisionner en produits de la friperie vu la piètre qualité proposée dans les magasins du neuf à des prix dépassant les seuils de l’entendement», diront plusieurs pères de familles rencontrés dans le marché hebdomadaire de mercredi sis dans le quartier de Maraval.
Et un autre d’ajouter «bien au contraire, ici en plus des prix abordables, on peut facilement trouver de beaux modèles».
Dans ce marché, nombreux sont les commerçants qui font de leur spécialité la vente des effets vestimentaires de circonstance, tout en facilitant la présentation des productions en réservant à chaque tranche d’âge un rayon où le client peut trouver l’habillement recherché. En effet, les tenues sont mises sur cintres et présentées convenablement tandis que les chaussures sont rangées dans un autre coin.
Ce commerce n’est pas sans coups bas. Ces commerçants vont jusqu’à procéder au repassage des modèles uniques ou de marques connues, question de hausser le prix de vente des produits recherchés même par des citoyens aisés qui ne sont pas satisfaits par la qualité des produits exposés dans les magasins chics de la rue Khemisti et ceux de Choupot. «Dans tous les cas, ces produits sont moins chers et très solides, la fripe est, pour moi, une aubaine que je ne raterai pour rien au monde quelle que soit ma situation sociale» a indiqué un autre acheteur qui venait tout juste de faire le plein.
Dans les somptueuses boutiques des rues Larbi-Ben Mhidi, Khemisti et de Choupot, une tenue neuve pour une fillette de trois ans est vendue à 5000 Da, des Converses à 4.000 DA alors qu’à EL Hamri la facture globale d’un habit complet d’un enfant ne dépasse pas le seuil de 2.000 DA. La production nationale trouve, elle aussi, preneur. Elle est écoulée en exclusivité dans le géant marché de Mdina Djedida.
Malheureusement, cette production a, à la faveur de l’offensive asiatique de ces dernières années, quelque peu perdu son image de marque, le rapport prix et qualité revient comme un leitmotiv dans toutes les bouches. «Les confectionneurs nationaux doivent améliorer leurs productions pour pouvoir rivaliser ne serait-ce qu’avec les marques chinoises», ont affirmé plusieurs flâneurs en quête de bonnes affaires à réaliser.
Le commerce devient une spécialité exercée par tout le monde, y compris par des employés de l’administration et autres agents aux faibles salaires, pendant les périodes du Ramadhan et des fêtes religieuses. Celui-ci est exercé après les heures de bureau dans les marchés de la Bastille, Mdina Djedida, El Hamri et même dans les Arcades du centre-ville.
Commercer est, contre toute attente, la devise des temps actuels. «Pourvu que ça gagne de l’argent», a affirmé un agent de gardiennage dans une entreprise nationale travesti en commerçant.
Certains se sont spécialisés dans la vente de zlabia et de chamia pendant que d’autres commercent dans les habits et chaussures qu’ils proposent dans les trottoirs, les coins des marchés et les artères réputées pour leur forte concentration.