Après les câbles de WikiLeaks sur les confidences d’hommes politiques à travers le monde, OffshoreLeaks jette un pavé dans la mare et fait trembler le monde des affaires en révélant leurs combines financières pour échapper au fisc en faisant des placements off shore où des noms de personnalités algériennes figureraient et qui pourraient être révélés dans les prochains jours, alors que l’Algérie vit au rythme des révélation d’affaires de corruption et de malversations.
Cette bombe a été révélée, jeudi dernier, par le journal britannique The Guardian, ainsi que plusieurs autres journaux dans le monde. Les noms de personnalités et de dirigeants actionnaires de sociétés dans des paradis fiscaux, dont le président d’Azerbaïdjan et un proche du président français, François Hollande. D’après le journal, des documents secrets obtenus par le consortium d’investigation américain (Icij) après une enquête de longue haleine montrent ainsi que trois sociétés auraient été créées en 2008 aux îles Vierges britanniques, un paradis fiscal situé dans les Antilles, au nom des filles du président, Ilham Aliyev. Une autre aurait été établie en 2003, au nom du président et de sa femme.
D’après le journal, les intéressés se sont refusés à tout commentaire. Les noms de la célèbre collectionneuse d’art espagnole, Carmen Thyssen- Bornemisza, de la fille aînée de l’ancien dictateur philippin, Ferdinand Marcos, Maria, et de Olga Shuvalova, la femme d’Igor Shuvalov, un homme d’affaires proche de Poutine, qui occupe le poste de vice-Premier ministre en Russie. L’ancien ministre des Finances de Mongolie, Bayartsogt Sangajav apparaît aussi dans cette liste.
Ce dernier aurait créé la société «Legend Plus Capital ltd», par le biais d’un compte en Suisse, quand il était en fonctions de 2008 à 2012. Il a reconnu que c’était une «faute» de ne pas l’avoir déclarée. Autre révélation embarrassante pour le président français, François Hollande, déjà aux prises avec le scandale déclenché par l’inculpation d’un de ses ministres pour fraude fiscale: la présence dans cette liste de Jean-Jacques Augier, trésorier de la campagne présidentielle du président français, François Hollande en 2012. D’après cette enquête, il serait actionnaire de deux sociétés offshore dans les îles Caïmans par le biais de son holding financier Eurane.
Selon The Guardian, ces informations représentent «le plus important stocks d’informations venues de l’intérieur sur le système des sociétés off-shore, jamais obtenu par des médias». Le journal précise toutefois que son article «ne suggère pas que les personnalités citées ont enfreint la loi». Le Guardian fait partie d’un réseau de 36 médias internationaux ayant eu accès, grâce à l’Icij, à des informations ayant fuité de deux sociétés offrant des services «offshore » : l’une basée à Singapour, l’autre dans les Iles vierges. D’après le Guardian, le consortium se serait procuré un disque dur incluant «deux millions d’emails» et des informations sur «122 000 sociétés off-shore et quelque 12 000 intermédiaires».
Un travail titanesque d’une coalition de journaux et de journalistes ont permis de mettre à nu le monde opaque des paradis fiscaux, où l’argent détourné, grâce à la corruption et aux malversations, est blanchi dans des entreprises offshore ou dans des comptes secrets. L’Icij a réussi à se procurer un disque dur contenant 2,5 millions d’emails et des informations sur 122 000 sociétés off-shore et quelque 12 000 intermédiaires: mémos internes, copies de passeports, pièces comptables ou encore documents officiels. Soit «le plus important stock d’informations venues de l’intérieur sur le système des sociétés offshore jamais obtenu par des médias», commente le Guardian, qui fait partie de la quarantaine d’organes de presse internationaux qui ont ensuite eu accès à ces données confidentielles, avec Le Monde, la BBC, le Washington Post ou encore la Süddeutsche Zeitung. Ces informations concernent principalement les Iles vierges britanniques et représentent un volume «160 fois supérieur aux informations confidentielles publiées par WikiLeaks sur le département d’Etat américain en 2010».
Elles ont filtré à partir de deux sociétés offrant des services «offshore» à Singapour et aux Iles Vierges. On y trouve les noms de «milliers de détenteurs» d’intérêts dans des paradis fiscaux, dentistes américains, «villageois grecs issus des classes moyennes», dirigeants étrangers, milliardaires et marchands d’armes, écrit le Guardian. Ce «Who’s Who des paradis fiscaux», comme le baptise l’Icij, «montre comment le secret de la finance offshore s’étend dans le monde, permettant aux riches d’éviter de payer des impôts, alimentant la corruption et les malheurs des pays riches et pauvres», souligne le consortium. Pour lui, la crise chypriote actuelle «est un des exemples de la façon dont le système offshore peut affecter la stabilité financière d’un pays».
La Grèce a d’ailleurs immédiatement annoncé l’ouverture d’une enquête sur les comptes d’une centaine de sociétés offshore inconnues de ses services fiscaux, dont l’existence a été révélée par l’Icij. Ces dispositifs offshore ont constitué pendant des années un des vecteurs clés de l’évasion fiscale endémique dans ce pays. La Commission européenne a, quant à elle, profité de l’occasion pour exhorter les Etats membres de l’UE à «se saisir de la question» de l’évasion fiscale qui coûte «plus de 1 000 milliards d’euros par an à l’Europe».
Le Tax Justice Network, un réseau international de chercheurs et de militants qui lutte pour la «justice fiscale», évalue de 20 0000 à 30 000 milliards de dollars le montant des sommes dissimulées dans les paradis fiscaux de par le monde. Selon L’Icij, d’autres révélations fracassantes seront publiées à partir du 15 avril prochain. Il fait s’attendre à de grosses surprises quand les noms de personnalités africaines, maghrébines et arabes seront révélés.
A. G.