Les armées malienne et française reprennent le contrôle de Gao
Une colonne de soldats français et maliens se dirigeait hier vers la cité mythique de Tombouctou, au lendemain de la reconquête lors d’une offensive éclair de Gao, la plus grande ville du nord du Mali.
L’aviation française a aussi bombardé des positions islamistes dans leur fief de Kidal, à 1 500 km de Bamako, alors que des sources font état depuis plusieurs jours d’un repli des combattants islamistes dans les montagnes de cette région, dans l’extrême nord-est malien. Soldats français et maliens progressaient parallèlement par voie terrestre sur un autre front, en direction de Tombouctou, ville-phare de l’islam en Afrique, à 900 km au nord-est de Bamako. Les «troupes françaises et maliennes» seront «bientôt près de Tombouctou», a assuré samedi le Premier ministre français Jean-Marc Ayrault. Une perspective qui enchante des réfugiés de la ville rencontrés samedi à Mopti (Centre), dont certains évoquent déjà une volonté de vengeance à l’égard des islamistes, qui ont notamment détruit des mausolées de saints musulmans et imposé une conception rigoriste de la chari’â. «Ils nous chicotaient quand on fumait, quand on écoutait de la musique. On va leur faire payer ce qu’ils nous ont fait. Les chicoter aussi», promet ainsi un jeune étudiant de Tombouctou, réfugié à Mopti (centre). Le bastion islamiste de Gao, à 1200 km au nord-est de Bamako, est tombée samedi au cours d’une opération spectaculaire de l’armée française: des membres des forces spéciales bénéficiant d’un appui aérien se sont d’abord emparé de l’aéroport et d’un pont stratégique. Puis, des soldats tchadiens et nigériens sont venus par avion du Niger voisin jusqu’à Gao, marquant de manière frappante l’entrée des troupes de la force africaine sur le théâtre des opérations maliennes. «La prise de contrôle de Gao, qui compte 50.000 à 60.000 habitants, par les soldats maliens, tchadiens et nigériens est en cours», a indiqué hier le porte-parole de l’armée française, le colonel Thierry Burkhard. Plus de 6000 soldats ouest-africains et tchadiens doivent à terme être déployés au Mali pour prendre le relais de l’armée française, mais ils n’arrivent qu’au compte-goutte et leur déploiement est ralenti par de sérieux problèmes de financement et de logistique. Seuls 2000 d’entre eux sont aujourd’hui stationnés au Mali et au Niger. Les premiers témoignages faisaient état d’une liesse populaire mais aussi de premiers actes de pillage à Gao. Les communications téléphoniques fixes et portables sont coupées, et la zone n’est pas accessible à des observateurs indépendants. L’armée française affirmait samedi qu’il n’y avait pas de combats à Gao, mais «des opérations de harcèlement», avec des francs-tireurs. Gao était un bastion des islamistes du Mouvement pour l’unicité et le jihad en Afrique de l’Ouest (Mujao), qui y ont commis de nombreuses exactions, dont des amputations de personnes accusées de vol. Ce groupe avait affirmé, samedi à l’AFP, vouloir «négocier la libération» d’un otage français, Gilberto Rodriguez Leal, enlevé en novembre 2012 dans l’ouest du Mali. Le Premier ministre français Jean-Marc Ayrault a répondu en refusant «les logiques de chantage». D’après une source de sécurité malienne, les principaux responsables des groupes islamistes armés, Iyad Ag Ghaly, le chef d’Ansar Eddine et l’Algérien Abou Zeid, l’un des émirs d’Al Qaîda au Maghreb islamique (Aqmi) se sont réfugiés dans les montagnes de Kidal. Des positions des islamistes à Kidal et sa région ont été bombardées samedi par des avions français, selon des sources maliennes. «Ces frappes ont notamment touché la maison de Iyad Ag Ghaly à Kidal et un camp militaire», a déclaré une source de sécurité. La maison du chef d’Ansar Dine, ex-militaire et ex-figure des rébellions touareg des années 1990 au Mali, a été détruite, ont ajouté des habitants. Kidal avait été la première ville conquise par les rebelles touareg du Mouvement national de libération de l’Azawad (Mnla), alors alliés aux groupes islamistes en mars 2012. Ils avaient ensuite été évincés de la région par leurs anciens alliés.