En accueillant le président américain Barack Obama au Kremlin, son homologue russe Dmitri Medvedev a appelé, lundi 6 juillet, à une réconciliation des deux pays.
« Nous espérons refermer une série de pages difficiles dans l’histoire des relations russo-américaines et en ouvrir de nouvelles », a déclaré le président russe au début de leurs entretiens.
« Nous avons toutes les chances de prendre des décisions importantes et nécessaires », a-t-il ajouté, évoquant les négociations en cours sur le désarmement nucléaire et la sécurité dans le monde.
« Si nous travaillons dur dans les deux prochains jours, nous pouvons faire des progrès extraordinaires », lui a répondu le président américain.
« Sur une série de questions, y compris de sécurité, économiques, énergétiques, environnementales, les Etats-Unis et la Russie ont plus en commun qu’ils n’ont de divergences », a poursuivi Barack Obama.
Et Dmitri Medvedev de poursuivre avec un trait d’humour : « Même la météo encourage ce type de discussions. A l’extérieur, il fait froid, donc on peut travailler comme il faut à l’intérieur ».
Ce à quoi Barack Obama a répondu : « On a tout intérêt à rester à l’intérieur aujourd’hui », avant d’ajouter avec le sourire : « la dernière fois que j’étais à Moscou, il faisait 80 degrés » Fahrenheit (27 degrés Celsius).
Quatre heures d’entretien entre Obama et Medvedev
L’avion du président américain, en provenance de Washington, a atterri vers 13h20 (9h20 GMT) à l’aéroport de Vnoukovo.
Barack Obama devait d’abord se rendre dans le centre de Moscou pour participer à une courte cérémonie devant la tombe du soldat inconnu, au pied du Kremlin.
Il devait s’entretenir ensuite pendant quatre heures avec Dmitri Medvedev.
Une conférence de presse commune est programmée à 18h30 (14h30 GMT).
Dans la soirée, les deux chefs d’Etat vont dîner ensemble à la résidence du président russe à Gorki, dans la région de Moscou, avec leurs épouses, Svetlana Medvedeva et Michelle Obama.
Sujets épineux
Le président américain va tenter de « relancer » des relations américano-russes qui s’étaient sérieusement détériorées sous l’administration Bush, au point de rappeler certaines heures de la Guerre froide.
Barack Obama attend de ce sommet avec Dimitri Medvedev la conclusion d’un nouvel accord sur la réduction des arsenaux stratégiques ainsi que la mise en place d’une meilleure coopération alors que les Etats-Unis intensifient leurs actions en Afghanistan.
Si le dialogue entre Moscou et Washington connaît une récente embellie, des sujets restent épineux, comme celui du bouclier antimissiles en Europe ou encore la question de l’élargissement de l’Otan et les suites de la guerre en Géorgie.
Relation pragmatique
Pour sa première visite en Russie depuis sa prestation de serment en janvier, Barack Obama devrait tenter de continuer à bâtir une relation pragmatique avec Dmitri Medvedev, rencontré lors du G20 à Londres.
En revanche, les liens avec le Premier ministre Vladimir Poutine, qui, selon les analystes, continue de jouer un rôle central et déterminant dans la politique russe s’annoncent moins faciles à dénouer.
Pour l’administration américaine, Vladimir Poutine, qui a fait de Dmitri Medvedev son successeur à la tête de l’Etat russe, garde « un pied » dans la Guerre froide.
Pour Vladimir Poutine, c’est aux Américains de faire évoluer leur politique internationale.
L’ancien président russe a peu apprécié que le nouvel hôte de la Maison blanche ait déclaré qu’il continuait à poursuivre une logique datant de la Guerre froide.
Un autre point de friction avec l’ancien maître du Kremlin est que Barack Obama a l’intention de rencontrer les dirigeants de l’opposition, des militants pour la démocratie, ainsi que l’ancien président Mikhaïl Gorbatchev.
Barack Obama doit rencontrer Vladimir Poutine mardi.
Arsenaux nucléaires
Malgré des divergences de vue, les deux camps s’accordent sur un point: la vieille question des arsenaux nucléaires peut servir de base à l’instauration de relations moins chaotiques entre Washington et Moscou.
« Je vais tenter de ranimer les relations avec la Russie parce que je crois qu’Américains et Russes ont beaucoup d’intérêts en commun, des intérêts que nos gouvernements récents n’ont pas poursuivis aussi activement qu’ils l’auraient dû », a déclaré Barack Obama dans le journal d’opposition Novaya Gazeta.
Bien que les détails de ces discussions restent soigneusement entourés de mystère, les deux présidents devraient aborder la question d’une nouvelle réduction des arsenaux stratégiques.
L’objectif est de jeter les bases pour la signature d’un nouveau traité avant décembre, date à laquelle l’accord START-1 arrivera à expiration.
L’ambition est de réduire le nombre de têtes nucléaires en-dessous de la fourchette actuelle comprise entre 1.700 et 2.200.
Afghanistan
Barack Obama tentera également d’obtenir du Kremlin l’autorisation de faire transiter par le territoire russe ses convois d’armes à destination des soldats de la Force internationale d’assistance à la sécurité (Fias) en Afghanistan.
L’ouverture d’un corridor est une mesure vivement souhaitée par les Etats-Unis qui ont intensifié leur lutte contre les talibans, suivant la nouvelle stratégie de la Maison blanche en Afghanistan.
Si Russes et Américains parviennent à s’entendre sur ces deux questions, cela confirmera leur volonté commune de « réinitialiser » – pour employer l’expression de Washington – leurs relations chaotiques ces dernières années.
En revanche, peu de progrès sont à attendre sur les autres fronts.
Bouclier antimissile
Dans son entretien à Novaya Gazeta, Obama reconnaît qu’il existe « des susceptibilités russes » concernant le bouclier antimissile que les Américains veulent déployer en Pologne et en République tchèque.
Le président précise clairement qu’il n’acceptera pas la tentative de Moscou de lier la question de la réduction des arsenaux avec celle du bouclier.
Moscou répète depuis plusieurs semaines que cette initiative constitue une menace pour sa sécurité nationale et qu’il tient à ce que les deux questions soient abordées simultanément.
Barack Obama a, lui, réaffirmé que ce système de protection vise à prévenir d’éventuelles agressions en provenance de l’Iran et non de la Russie et il a émis le souhait que Moscou soit associé au projet.
Iran
Barack Obama apparaît moins attaché que son prédécesseur à la question du bouclier, mais il ne semble pas pour autant prêt à l’abandonner sans obtenir quelque chose en échange.
Le chef de l’Etat américain estime que si l’Iran se voit empêcher de développer un programme nucléaire militaire, la raison d’être du bouclier disparaîtra d’elle-même.
Le message revient à demander à Moscou d’user de son influence auprès de Téhéran.
Des conseillers américains ont indiqué que Barack Obama n’avait aucune intention de faire des concessions sur une limite à l’élargissement de l’Otan.
Sa position, concernant les éventuelles entrées de l’Ukraine et de la Géorgie, apparaît toutefois plus mesurée que celle de George Bush.