Le numéro 4 de la revue le lien , édition 2018, vient de paraître : Un florilège de réflexions

Le numéro 4 de la revue le lien , édition 2018, vient de paraître : Un florilège de réflexions

les articles proposés interrogent tout à la fois la spécificité identitaire et culturelle de chacune des deux rives et montrent, ce faisant, leur complémentarité.

Le numéro 4 de la revue Le Lien, édition 2018, vient de paraître avec, comme à l’accoutumée, un éditorial de la ministre de l’Éducation nationale qui souligne l’intérêt qu’elle porte à la revue et l’insigne honneur qu’elle lui fait. Fidèle à la logique et à la démarche qui la caractérisent, cette publication allie deux qualités cardinales: la signifiance de sa thématique en cohérence avec les missions du service E.L.C.O. dont elle est la carte de visite et le miroir, d’une part, et, de l’autre, la hauteur de vue analytique de ses auteurs. Sur la pertinence des objets sur lesquels elle a focalisé l’attention, on observera qu’elle offre comme un florilège de réflexions sur ce qui a trait à la science, à la pédagogie et à la culture perçues sous l’angle de la dynamique de la production intellectuelle et artistique traversant la Méditerranée du nord au sud et du sud au nord. En cela elle demeure fidèle à son titre qui connote une passerelle enjambant la Méditerranée.

C’est dire que les articles proposés ici interrogent tout à la fois la spécificité identitaire et culturelle de chacune des deux rives et montrent, ce faisant, leur complémentarité. Cependant, un élément majeur démarque la rive européenne de la rive africaine: sur la première vit et s’épanouit une diaspora nombreuse et marquante issue de la seconde. Cette Algérie en miniature démographique déracinée, mais d’un poids intellectuel remarquable, représente somme toute le trait d’union le plus lisible et le plus précieux entre l’Arc latin et le littoral algérien. C’est en grande partie à cette humanité algérienne géographiquement déplacée que s’intéressent particulièrement les auteurs de cette revue qui sont majoritairement des universitaires. Sur les échanges entre les deux rives, le va-et-vient des hommes et de leurs productions est appréhendé à partir de problématiques dont le dénominateur commun est l’apport fécond de l’un à l’autre. Le professeur Noureddine Toualbi-Thaâlibi, coordonnateur du service E.L.C.O, se penche sur la contribution de l’Algérie à l’enseignement de la langue arabe en France et, dans une réflexion prospective, dessine des lignes directrices pouvant configurer le profil et le statut de cette langue dans l’Hexagone à brève et moyenne échéance. S’agissant du concours à la recherche en France de l’élite scientifique algérienne, Abderrahmane Tadjeddine, directeur de recherche émérite au Cnrs et Abdelkader Djeflat, professeur à l’université de Lille, montrent l’effort productif d’une intelligentsia algérienne qui stimule la recherche en France et encadre des thèses dans de nombreuses universités algériennes et françaises. Les professeurs Youssef Nacib et Abdelmadjid Merdaci se sont intéressés pour leur part à l’aide apportée par le corps enseignant français à l’école algérienne débutante en 1962 et à l’université d’Alger qui disposait alors d’un personnel enseignant algérien insuffisant en nombre et en qualification. De son côté, la professeure Christiane Achour-Chaulet analyse avec une minutie remarquable l’itinéraire et l’oeuvre de Assia Djebar, symbole de rencontres intellectuelles entre les deux rives par la médiation de la langue de Molière, ce qui a valu à la romancière et essayiste son élection à l’Académie française. Dans le domaine de la littérature et des arts, le professeur Rachid Guerbas explique avec pédagogie le sens et l’histoire de la musique andalouse en évoquant, par la relation d’expériences vécues, le succès de la musique algérienne en France. Pour sa part, Slimane Benaïssa, dramaturge, acteur et metteur en scène, s’intéresse au concept d’identité étudié à partir de son propre vécu théâtral en France. Il traite en particulier d’un problème qui concerne l’émigration algérienne en France: l’arabe dialectal. Son analyse percutante fait écho à la posture défendue sur ce thème pendant deux décennies par le premier dramaturge de l’indépendance: Kateb Yacine. Enfin. El-Hocine Messadek, ancien directeur et fondateur du journal arabophone El-Massa, décrypte les données et les répercussions de la distribution de la presse algérienne en France. Il voit d’ailleurs dans Le Lien un échantillon de cette presse algérienne.

Au total, le numéro 4 du Lien fait corps avec les trois numéros qui l’ont précédé puisque en s’intéressant toujours aux rapports entre l’Algérie et la France, il complète les contenus des éditions précédentes en enrichissant la réflexion sur le voyage des cultures, les innovations intellectuelles et les conditions de vie et d’épanouissement de la communauté algérienne en France. Le Lien ne fait pas dans la politique. Il situe son impact sur le terrain des rapports humains en tant qu’ils sont régis par l’éducation, la science et la culture. Ce sont trois domaines qui peuvent positivement impacter la décision politique parce qu’ils consolident et préservent le goût, la sensibilité, la créativité et l’intelligence qui sont en partage chez tous les peuples et sur tous les continents. La découverte de l’Autre à travers sa culture c’est déjà la fin du mépris et le début de l’estime. Puisse ainsi Le Lien apporter sa modeste pierre à l’édification d’une compréhension et d’un respect mutuels entre les rives sud et nord de la Méditerranée. S’il y parvient avec humilité, il aura pleinement accompli son rôle.