La chicha a conquis «les poitrines» des Oranais
Tout le monde trouve son compte depuis l’avènement de la chicha et l´ouverture des cafés, salons de thé et restaurants orientaux.
«Ils se privent de toute nourriture du matin au soir et commencent à se droguer dès que l’imam annonce la rupture du jeûne.» Tel est le constat relevé par des Oranais ahuris par les nouveaux comportements ayant pris une allure phénoménale ces dernières années.
Ces comportements sont apparus le premier jour de Ramadhan. La consommation de la drogue et des psychotropes explose durant chaque mois sacré. Un peu partout dans la ville d´Oran, le papier massa, type Bob Marley, et le bout de plaquette marocaine se substituent à la hrira épicée du ftour. Dès que le muezzin appelle à la rupture du jeûne, des jeunes, moins jeunes, adultes et même des jeunes filles accourent aussitôt vers leurs cachettes, retirent des bouts de cannabis pour réaliser leurs fantasmes «interdits» pendant toute la journée de jeûne, rouler des joints dont ils raffolent énormément tout en scrutant les mouvements des policiers. Ces drogués, se mettant en petits groupes, se passent leurs joints à tour de rôle, on les retrouve un peu partout, dans les entrées, caves et terrasses des immeubles.
D´autres libertins agissent audacieusement en additionnant cette dose habituelle de drogue, comme ingrédient principal dans le menu du ftour. La consommation de kif est perceptible de visu un peu partout dans la plupart des quartiers composant la ville d’Oran. Sa commercialisation n´est pas un fait nouveau dans une wilaya qui est devenue une plaque tournante du trafic et du transit de cannabis, vu son voisinage avec la wilaya frontalière, Tlemcen. On est allé donc dans une cité qui fonctionne, aussi bien curieusement, que paradoxalement. Ses habitants continuent à peiner quant à se retrouver socialement. Comment contenir ces milliers de badauds pendant la saison des grandes chaleurs et de grande morosité? L’APC et la direction de la culture d’Oran continuent dans leurs programmations des animations culturelles alors que la Police et le Croissant-Rouge poursuivent leurs sorties d’informations et de sensibilisation sur les effets dévastateurs de la drogue. Hélas! Jeudi dernier, soit au 2e jour de Ramadhan seulement, la ville d’Oran grouillait de monde, son tramway ne cessait de faire des va-et-vient à un rythme effréné transportant, à chacune de ses navettes, plusieurs centaines de personnes. Hommes et femmes, jeunes et moins jeunes fuient la chaleur suffocante dégagée par les murs de leurs habitations pour se rendre en ville et goûter à la fraîcheur de la mer. Le Front de mer et ses somptueuses crémeries sont envahis par les noctambules. Les serveurs, eux, peinent à satisfaire une clientèle affluant en nombre important.
Frimer pour séduire!
Les terrasses des cafétérias du centre-ville proposent des rafraîchissants ou du thé à la menthe. Ces dernières années, le café turc, la chicha et la chamia se sont greffés comme dans la culture des Oranais notamment chez les jeunes. Les couche-tard ne peinent pas quant à choisir entre le Salon «Une heure à Beyrouth», ou celui de «Layali Baghdâd» ou encore «Hala» situé dans la Cité Djamel. Les salons à l´orientale sont les mieux ciblés, aussi bien par les hommes que par les femmes vu leur discrétion et les commodités qu’ils offrent tels les fauteuils et les tables basses luxueux et le narguilé, appelé dans le jargon local la ranguila ou tout simplement la Chicha. La chicha est cette petite machine à vapeur qui a pu avoir ses adeptes dans une ville où la consommation de la drogue est devenue banale. Les villes orientales ainsi que la ville turque d´Istanbul, qui s´y sont invitées, se sont définitivement installées dans la ville d’El Bahia. Tout le monde trouve son compte depuis l´ouverture des cafés, salons de thé et restaurants orientaux.
Au beau milieu du centre-ville, la course pédestre est des plus acharnées pour prendre place dans ces cafés et ces salons où un thé coûte 20 DA dans les cafés des rues Larbi-Ben Mhidi et Khemisti et passe au quintuplé dans ces endroits huppés. Ajouter la succulente chamia tunisienne, prendre un café turc et aspirer la vapeur produite par la chicha égyptienne, sous la bonne et douce musique orientale donne lieu à une facture souvent douloureuse. Ces endroits, en véritables fumoirs qu’ils sont, constituent les lieux de prédilection des amoureux de circonstance. Prendre place dans le salon «Layali de Baghdâd» ou encore dans celui appelé «Une heure à Beyrouth» constitue l’illusion principale de certaines femmes et hommes. Prestige oblige vu la «notoriété» de ces lieux dans toute l´Oranie. «N’est pas homme friqué celui qui n’invite pas sa copine dans de tels salons hyper-ciblés», dira la majorité des jeunots rencontrés. Ces derniers axent souvent leurs discussions juvéniles autour des marques de belles voitures à acquérir prochainement. Adultes, jeunes et moins jeunes, garçons, filles, et mêmes des mineurs s´y rendent tout en pressant le pas, aussitôt sortis de la maison.
Le café turc ici, est préparé sur de la braise, vante-t-on. Son coût est fixé à 150 DA/tasse alors que le thé est coté à 120 DA/ petit verre tandis que le prix de la chicha varie entre 300 et 600 DA. La consommation, en bonne compagnie, de la chamia et de la chicha (ranguila) est devenue un comportement sublime dont il ne faut pas s’en passer après la rupture du jeûne. Cette nouvelle mode est vaniteusement pratiquée par les deux sexes de tous âges.