Un accord sur la régulation du nucléaire iranien a été trouvé dans la nuit de samedi à dimanche entre les pays du G5+1 et l’Iran. La question du droit de l’Iran à enrichir de l’uranium était au cœur des discussions.
Les négociateurs sur le nucléaire iranien réunis à Genève sont venus à bout de quatre jours de discussions difficiles en concluant un accord dans la nuit de samedi à dimanche 24 novembre. C’est Catherine Ashton, la diplomate en chef de l’Union européenne, qui a lu à la presse le communiqué commun. « Nous sommes parvenus à un accord sur un plan d’action », a-t-elle annoncé, aux côtés du ministre iranien des Affaires étrangères Mohammad Javad Zarif. Les ministres du G5+1 [États unis, Chine, Russie, Grande Bretagne, France et Allemagne] et Mohammad Javad Zarif se sont ensuite chaleureusement congratulés.
L’information a été largement relayée sur le réseau social Twitter. « Nous sommes parvenus à un accord » a ainsi écrit Michael Mann, le porte-parole de la diplomate en chef de l’Union européenne. Le ministre iranien des Affaires étrangères Mohammad Javad Zarif a lui aussi annoncé cet accord par un tweet.
« Le vote du peuple en faveur de la modération et de l’engagement constructif ainsi que les efforts infatigables des équipes de négociation vont ouvrir de nouveaux horizons », a également salué, sur son compte Twitter, le président de la République islamique, Hassan Rohani, qui a lancé une politique d’ouverture vers l’Occident après sa victoire électorale en juin.
De son côté, le président de l’Union européenne Herman Van Rompuy a salué dimanche le « courage » montré par l’Iran et les grandes puissances pour limiter le programme nucléaire iranien. Il a toutefois souligné que l’important était sa mise en œuvre « dans les temps ».
L’enrichissement d’uranium en question
Les 5+1 négociaient, depuis le 20 novembre à Genève avec l’Iran, un accord intérimaire de six mois, qui apporterait des garanties sur le caractère pacifique du programme nucléaire iranien, avec en contrepartie un allégement « limité » des sanctions qui frappent l’économie iranienne.
Au cours des dernières heures, les discussions ont été bloquées par les divergences sur un « droit » à l’enrichissement de l’uranium revendiqué par l’Iran. Cette question est au cœur des inquiétudes des pays occidentaux et d’Israël, qui craignent que l’uranium enrichi à 20 % soit utilisé par l’Iran pour obtenir de l’uranium à 90 % à usage militaire. Téhéran affirme que cet uranium est destiné à son réacteur de recherche et à des fins médicales.
Différentes interprétations
Cette question a d’ailleurs fait l’objet de différentes interprétations à la sortie des négociations. L’accord conclu avec l’Iran est « une première étape », a souligné John Kerry lors d’une conférence de presse, martelant que le texte « ne dit pas que l’Iran a le droit à l’enrichissement [d’uranium], quoique que disent certains commentaires ». Avant de poursuivre « l’Iran a accepté de suspendre l’enrichissement d’uranium au-delà de 5 % […], et a accepté de dégrader ou de convertir son stock d’uranium enrichi à 20 % », a détaillé le secrétaire d’État américain.
Son homologue iranien Mohammad Javad Zarif venait tout juste d’affirmer que le texte contenait une « référence claire selon laquelle l’enrichissement va continuer » en Iran. M. Zarif, qui s’exprimait à la télévision iranienne Press TV, a en outre jugé que les sanctions internationales contre Téhéran finiraient par être entièrement levées, et il s’est engagé à accroître la coopération de Téhéran avec l’Agence internationale de l’énergie atomique [AIEA]. « Le droit à la technologie nucléaire est un droit inaliénable », a encore indiqué le ministre, en ajoutant que le « combat que nous avons mené depuis plusie
urs années avait pour but que la communauté internationale reconnaisse » que l’Iran exerce ce droit.
Nouvelles inspections
Selon un haut responsable américain s’exprimant sous couvert de l’anonymat, cet accord intérimaire « arrête les progrès du programme nucléaire » de l’Iran et ne « reconnaît pas le droit à l’enrichissement » du pays. Il prévoit de « neutraliser les stocks [de combustible nucléaire, NDLR] enrichi à 20 % », et énonce le principe d’ »inspections poussées » des sites nucléaires iraniens.
Depuis la Maison blanche, le président Barack Obama a confirmé que « pour la première fois en presque une décennie, nous avons arrêté les progrès du programme nucléaire iranien, et des volets cruciaux du programme seront annulés. […] De nouvelles inspections donneront un large accès aux équipements nucléaires iraniens et permettront à la communauté internationale de vérifier si l’Iran tient ses engagements. »
« Grâce à cet accord, l’Iran ne peut pas utiliser les négociations pour couvrir les avancées de son programme », soupçonné d’avoir des visées militaires, a ajouté le dirigeant américain. « De notre côté, les États-Unis et leurs alliés se sont mis d’accord pour accorder à l’Iran un allègement modeste [des sanctions], tout en continuant à appliquer les plus sévères », a-t-il assuré. À ce titre, Obama a exhorté le Congrès à s’abstenir d’adopter de nouvelles sanctions contre Téhéran, comme certains élus le souhaitaient après l’échec des premières négociations à Genève.
L’État hébreu a réagi très vite à l’annonce de cet accord, dénonçant une « erreur historique ». « Israël n’est pas engagé par l’accord de Genève. L’Iran menace Israël et Israël a le droit de se défendre », a affirmé le ministre de l’Économie Naftali Bennett, dirigeant d’un parti d’extrême droite, à la radio militaire.