Nouveaux médicaments interdits à l’importation,Spectre de pénurie en vue

Nouveaux médicaments interdits à l’importation,Spectre de pénurie en vue

Lejour2 (1).jpgLes intervenants dans les produits pharmaceutiques ont affiché à l’unanimité une appréhension certaine face à la nouvelle décision gouvernementale consistant à interdire l’importation de quelque 111 médicaments à partir de janvier 2011.

En fait, n’ayant pas pu contacter les opérateurs et syndicats du domaine de la pharmacie, une virée auprès des différentes pharmacies et officines d’Alger a fait ressortir ce sentiment de crainte et d’inquiétude exprimé par les pharmaciens vis-à-vis de cette nouvelle liste de médicaments interdits à l’importation parce que fabriqués localement. Selon eux, cette nouvelle liste pourrait accentuer la situation de pénurie et perturbation que connaît le médicament en Algérie depuis plus d’une année.

Supprimer le Crédoc pour faciliter l’accès à la matière première

Ainsi, les différents pharmaciens se sont montrés septiques par rapport aux conséquences qu’engendrerait cette décision. Un pharmacien d’Alger-Centre dira qu’«on constate déjà une véritable rupture de médicaments, notamment ceux destinés aux maladies chroniques. Le produit Saidal est à 40% de rupture. Avec la nouvelle liste, le problème se fera ressentir davantage». Et de souligner qu’«avant d’interdire, il aurait fallu d’abord exiger la fabrication locale. Surtout que la majorité des médicaments inscrits sur la nouvelle liste touchent à des pathologies chroniques sans qu’aucune autre alternative médicale ne soit prévue en cas de rupture». Pour cet autre pharmacien, «la situation va s’aggraver parce que le problème se pose d’ores et déjà vu que la production nationale actuelle n’arrive pas à répondre à la demande à cause du manque de matière première». Citant l’exemple du Digoxine, «un médicament générique destiné aux malades cardiaques et qui permet de faciliter la contraction du cœur, est souvent en rupture de stock parce que les producteurs nationaux manquent de matières premières et les mesures incluses dans le Crédoc ne leur facilitent pas l’accès». Pour ce pharmacien, «il faut supprimer cette mesure de Crédoc pour permettre aux producteurs locaux de s’approvisionner rapidement en matières premières afin d’éviter des ruptures de production». «C’est cela le véritable nationalisme», lâchera-t-il.

La production nationale ne répondra pas à la demande

Par ailleurs, il s’interrogera sur la capacité réelle des producteurs locaux à répondre efficacement à la demande. De plus, il soulignera que «même au niveau du processus de fabrication, il faut du temps pour passer d’une fabrication médicamenteuse à une autre». Un temps considérable qui se répercutera sur la production, la distribution et donc forcément sur la disponibilité des médicaments sur les étals. D’où la pénalisation des malades qui verront leurs traitements interrompus, quand on sait que les malades chroniques doivent quotidiennement prendre leur traitement de manière régulière, et que tout arrêt pourrait leur porter préjudice.

Un pharmacien de la rue Hassiba Ben Bouali interrogé sur le sujet lancera dans la même lignée qu’«il est bien beau d’aller vers le générique, mais il faut faciliter l’accès à la matière première». Et d’ajouter que «Saidal, leader national dans la production du médicament, prend la locomotive pour encourager et créer un groupe pour la distribution». Ce qui, selon lui, «viendrait conforter d’une manière efficace le réseau actuel de distribution».

Quant à cette pharmacienne de la place Audin, elle dira sur ce sujet que «le médecin est mis au courant de cette nouvelle liste. C’est à lui de prescrire et de remplacer les médicaments interdits par ceux disponibles, et en cas de rupture ou de pénurie, c’est à lui (ndrl le médecin) de réclamer auprès des autorités compétentes son arsenal pharmaceutique». Ajoutant : «Nous les pharmaciens, on est là pour servir ce qui est prescrit par l’ordonnance».

Somme toute, la mise en application de cette nouvelle liste semble susciter des réserves assurées dans le milieu du médicament à cause de l’inaptitude des producteurs locaux à satisfaire la demande nationale, notamment en ce qui concerne les maladies chroniques et cancéreuses. Pourtant, le premier responsable du secteur de la Santé depuis son arrivée à la tête du ministère de la Santé n’a cessé de réitérer à chaque occasion son «engagement solennel auprès des plus hautes autorités du pays pour éviter toute pénurie de médicaments essentiellement ceux des maladies chroniques et des cancéreux».

Pour rappel, le gouvernement a interdit dans une première liste, en 2008, l’importation de plus de 1 200 médicaments. Une décision qui a été suivie par de multiples pénuries et ruptures sur le marché national du médicament dont l’unique victime reste le malade.

Par Lynda N.Bourebrab