Synthèse – Huit jours après le séisme, Haïti a subi une nouvelle secousse mercredi. L’ONU craint de nouvelles victimes. Des secouristes français ont par ailleurs été agressés.
Nouveau séisme. La secousse, de magnitude 6, a été enregistrée à 11h30 GMT (6h30, heure locale), son épicentre localisé 42 km à l’ouest-nord-ouest de la ville de Jacmel. Elle a créé la panique, la population se précipitant dans la rue.
Au moins trois bâtiments se sont effondrés à Port-au-Prince mercredi, sans faire de victime. Mais ailleurs, les équipes de secours sont « parties immédiatement quadriller Port-au-Prince » pour rechercher d’éventuelles nouvelles victimes, a indiqué l’ONU. Certaines lignes téléphoniques ont été coupées, tout comme Internet.
Le port de Port-au-Prince rouvre progressivement au trafic, a indiqué mercredi soir (heure française) l’armée américaine.
4.000 soldats US supplémentaires. Les Etats-Unis vont envoyer 4.000 soldats supplémentaires en Haïti pour participer aux opérations de secours, ont indiqué mercredi des sources militaires à Washington. Ces troupes devaient initialement être déployées en Europe et au Moyen-Orient.
Les Américains disposent déjà de quelque 12.500 hommes sur place et de plusieurs navires, dont un porte-avions nucléaire et un bateau-hôpital.
Patrouille sur les lieux de pillages. Des militaires américains patrouillaient mercredi les rues commerçantes du centre de Port-au-Prince, où ont eu lieu ces derniers jours des pillages entachés de violences.
Des secouristes français menacés. Des secouristes français ont été menacés mardi après-midi à Port-au-Prince par des hommes armés, essayant même un tir à balle qui n’a pas fait de blessé.
Un membre du Comité de secours internationaux (Cosi), une petite ONG ardéchoise, a précisé que le véhicule de sept secouristes, qui était escorté par des véhicules de policiers, a été bloqué par un autre véhicule qui s’est inséré dans le convoi. Des hommes ont alors menacé de leurs armes les secouristes français, tirant même une balle qui n’a pas fait de blessé, sans que l’on puisse connaître les raisons de cette agression.
Le Cosi a alors décidé de suspendre sine die les activités de son équipe à Haïti, une douzaine d’hommes (secouristes, médecin, infirmiers) et cinq chiens de catastrophe, qui s’est pour l’heure repliée en République dominicaine voisine. Créé en 1986, le Cosi est intervenu ces dernières années, notamment en Thaïlande ou en Birmanie, lors de catastrophes naturelles.
370.000 sans abri à Port-au-Prince. Plus de 300 campements improvisés regroupent environ 370.000 personnes dans la capitale, selon l’Organisation internationale pour les migrations (OIM). Elles vivent « dans des abris de fortune, sans accès à des réseaux d’eau ».
Si l’on assiste à des scènes d’exode, la population effrayée tentant par tous moyens de fuir (voir la vidéo), les agences américaines de surveillance des frontières ont indiqué mercredi ne pas avoir observé d’afflux massif d’embarcations d’Haïtiens.
L’excitation de la foule empêche deux camions de livrer leur aide. Deux camions contenant de la nourriture, arrivés mercredi matin à Léogâne, à 30 km à l’ouest de Port-au-Prince, n’avaient toujours pas pu distribuer leur chargement en fin d’après midi en raison de bagarres, a constaté un journaliste de l’AFP.
En revanche, les Nations unies ont défendu mercredi leur rôle dans la coordination de l’aide aux rescapés du séisme en Haïti, précisant que le Programme alimentaire mondial (PAM) avait distribué un million de rations alimentaires aux sans-abri. L’ONU qui déplore dans ses rangs 49 victimes. Plus de 300 de ses employés sont en outre encore portés disparus.
Un plan Marshall selon DSK. Dominique Strauss-Kahn, le directeur général du Fonds monétaire international, a appelé les Etats du monde à lancer « une sorte de plan Marshall » pour Haïti, en référence au plan de reconstruction de l’Europe après la Seconde guerre mondiale.
Le port opérationnel dans deux semaines ? Le ministre américain de la Défense, Robert Gates, a indiqué mercredi avoir ordonné à ses hommes de nettoyer le port de Port-au-Prince, dans l’espoir de le remettre en service « d’ici une semaine ou deux ».
Cinq miraculés. Après Elisabeth, 23 jours (!), retrouvée par une équipe de secouristes français dans les décombres de sa maison à Jacmel, dans le sud d’Haïti (Ecoutez le témoignage du vice-président de Pompiers de l’urgence internationale, dont une équipe faisait partie des sauveteurs), après Anne Zizi, une femme de 70 ans tirée des décombres de la cathédrale de Port-au-Prince, après Hoteline Losana, une femme de 25 ans, les sauveteurs ont retrouvé un petit garçon et sa soeur (lire notre article : « deux nouveaux miraculés »).
« Il reste l’espoir et la prière »
Ces cinq sauvetages pourraient bien être les derniers. L’armée américaine a prévenu que la fin des recherches était proche. Dans de nombreux chantiers, les secours savent que ce sont les toutes dernières heures. Certains ferment dans la tristesse, sous l’oeil de familles figées.
Quand les bulldozers arrivent, c’est signe qu’il n’y a plus d’espoir – même si parfois, en dégageant le béton, des survivants sont découverts. « C’est un sentiment de grande déception. Mais c’est notre boulot. Il y a aussi un danger de maladies avec tous ces cadavres donc on n’a pas le choix », dit un major.
Selon l’Onu, 121 personnes ont été sorties vivantes sous les décombres par les 52 équipes de sauveteurs venues des quatre coins du monde qui sont à pied d’oeuvre à Port-au-Prince. Le séisme du 12 janvier a a fait 75.000 morts, 250.000 blessés et 1,5 million de sans abri en Haïti. Quelque 75.000 corps ont déjà été enterrés.
14 ou 17 victimes françaises ? Selon le nouveau bilan, toujours provisoire, diffusé mercredi matin par le Quai d’Orsay, 17 Français sont morts dans le séisme. En revanche, lors du conseil des ministres, Bernard Kouchner a parlé de 14 morts. Le précédent bilan était de 12 victimes. 16 sont toujours portés disparus.
Le président haïtien admet des problèmes de coordination. René Préval, qui se félicite que l’aide internationale soit « arrivée très vite », estime néanmoins qu’il y a un « problème de coordination ». « L’aide arrive et on n’est pas préparé à la recevoir. Quand elle arrive, on nous dit : où sont les camions pour la transporter, où sont les dépôts ? L’aide va aller en augmentant. C’est la coordination de l’aide, pour savoir en quelles quantités, quand et comment la distribuer, qui est importante », a-t-il déclaré sur RFI.
Interrogé sur l’omniprésence américaine, dont les soldats ont débarqué mardi devant le Palais présidentiel en ruines, il écarte toute critique. « Il y a des blessés et des endroits pour les mettre. Si la pelouse du palais présidentiel peut servir à sauver des vies, je crois que les élans idéologiques doivent faire place à la charité. (…) C’est sur la pelouse du palais qu’ils doivent recevoir des soins, c’est ça qui est essentiel », souligne-t-il.
Un avion de MSF encore détourné ? L’organisation française affirme qu’un de ses avions, transportant du matériel médical vital, a été empêché d’atterrir à trois reprises à Port-au-Prince.
« Ces 12 tonnes faisait partie d’une cargaison initiale de 40 tonnes transportées dans un avion qui n’avait pas reçu l’autorisation d’atterrir dimanche matin. Depuis le 14 janvier, cinq avions de MSF ont été déroutés de leur destination de Port-au-Prince vers la République dominicaine. Ces avions transportaient 85 tonnes de matériel médical au total », indique MSF. « Cinq patients sont décédés au centre médical de Martissant à cause du manque de matériel médical qui se trouvait à bord de cet avion « , ajoute l’ONG.