«Nourrices», dealers et fournisseurs,La nouvelle guerre des stups

«Nourrices», dealers et fournisseurs,La nouvelle guerre des stups

A la Brigade des stups de Châteauneuf on poursuit les petits trafiquants qui mettent en place une nouvelle technique pour appâter et fournir les jeunes, le deal à domicile.

L’Algérie a-t-elle les moyens pour lutter efficacement contre les trafiquants de drogue ? Ce sont la brigade des stupéfiants, les GGF, et l’Office national de lutte contre les stupéfiants qui traquent les dealers et leurs fournisseurs.

Quelles sont leurs méthodes pour infiltrer les réseaux ? Comment s’y prennent-ils pour identifier les trafiquants et mettre la main sur leurs stocks ? L’action de ces brigades et leurs obligations de résultats sont nécessaires pur une raison au moins, les consommateurs sont de plus en plus jeunes et parmi eux, les drogues dures commencent à faire des ravages. Où et quand procurent-ils les produits interdits ? Pourquoi défient-ils la loi ? En Algérie, de nouvelles drogues font leur apparition, leurs effets sont redoutables et leurs dégâts souvent irréparables.

On parle ici de crack, morphine, cocaïne, héroïne, ecstasy et bien d’autres encore. Ciblant le flagrant délit en pleine rue, chaque jour la brigade des stups lance des opérations contre les poches de l’empire du mal. Des opérations qu’elle maîtrise à force d’en avoir effectuées même si au final c’est une saisie minime mais révélatrice sur le trafic de drogue en Algérie. Aujourd’hui, la drogue marocaine est partout, les trafiquants ont fait du cannabis leur produit phare. A la brigade des stups de Châteauneuf, on poursuit les petits trafiquants qui mettent en place une nouvelle technique pour appâter et fournir les jeunes, le deal à domicile. La guerre contre le trafic de drogue est une bataille, il faut avoir du souffle et de la patience.

En 2010, les policiers ont procédé à 50 000 interpellations dans des affaires de stupéfiants. Chaque jour, partout sur le territoire, des saisies à répétition. Le travail de fourmi des policiers a conduit pour le seul bilan de cette année au démantèlement de plus de 100 réseaux de trafic de drogue et à la saisie de plus de 23 tonnes de cannabis. Quand on apprend que deux kilos de cannabis ont une valeur marchande de 120 millions de centimes, cela révèle l’importance des revenus de la drogue aux fournisseurs et dealers.

Chaque jour, les policiers procèdent à des perquisitions aux domiciles des dealers, dans le but de récupérer des quantités de cannabis et de cocaïne, d’autant qu’elles se font sur la base d’informations très précieuses, avec l’accord du procureur de la République. Il y a quelques semaines, une perquisition a été faite au domicile d’un dealer, à Alger.

Sur place, les policiers ont découvert plusieurs kilos de cannabis, des armes blanches et une arme automatique. Les armes chez les jeunes dealers sont fréquemment utilisées, les trafiquants sont de plus en plus violents, les policiers le constatent. Notre interlocuteur, qui a préféré garder l’anonymat, est policier depuis onze ans ; c’est un des piliers de la brigade des stups de Châteauneuf. Ce policier chevronné a intercepté une discussion téléphonique entre un dealer et son fournisseur. Les deux hommes parlaient en code afin de brouiller les pistes. C’est le départ d’une filature pour les enquêteurs.

Les nourrices, ces mineurs au service des fournisseurs de drogue

A chaque opération d’enquête portée contre les dealers et leurs fournisseurs, les policiers commence par une filature où la patience est la première qualité requise, les trafiquants qu’ils suivent se montrent toujours prudents. Après des heures d’attente, les voitures suspectes arrivent. Pour ne pas éveiller les soupçons, les policiers se cachent dans les «sous-marins», les voitures blindées banalisées qui permettent de voir sans être vu, utilisées spécialement pour la surveillance. Les trafiquants tombent dans le piège des policiers.

Mais le plus important pour les policiers c’est d’arriver à localiser le stock de drogue. Le gardien de la marchandise est appelé «nourrice», il guette la circulation des personnes afin que ses acolytes préparent la drogue pour leurs clients. Les nourrices sont souvent de jeunes mineurs, âgés entre 16 et 17 ans, très bien payés par les réseaux de trafic de drogue. Selon les enquêteurs, les trafiquants de cannabis récompensent les nourrices jusqu’à 10 000 dinars pour chaque opération de vente aux dealers.

Deux policiers se planquent dans un appartement afin de surveiller la «nourrice» des trafiquants. Armés de patience, ils surveillent toutes les allées et venues de l’immeuble. Ils assistent au ballet incessant des acheteurs qui sortent avec leurs doses.

Par Sofiane Abi