Sonatrach a un nouveau PDG. Retour sur la carrière d’un homme du secteur et questions sur sa capacité à rétablir l’autonomie de décision du management de Sonatrach…
Nordine Cherouati n’était pas le plus attendu au poste de PDG de Sonatrach où il remplace, après un petit intérim d’Abdelhafid Feghouli, Mohamed Meziane mis en cause dans des malversations présumées dans des contrats de services liés à l’activité transport par canalisations TRC.
Noureddine Bouterfa, Ali Hached, Rafik Babaghayou étaient sur la liste des PDG potentiels.
Ali Hached, Rafik Babaghayou, du fait de leur meilleure familiarité avec les activités opérationnels, amont et aval, paraissaient avoir des meilleurs atouts. Il semble que leur relative indépendance a joué contre eux. Les décideurs ont finalement porté leur dévolu sur un «homme de compromis».
Traditionnellement, le ministre de l’Energie propose un panel de trois noms à la présidence de la République qui tranche parmi les trois candidats. Mais le profil «politique» du nouveau PDG ne se lit pas aisément.
«Ce n’est pas l’homme de Chakib Khelil. Le ministre de l’Energie aurait préféré son propre candidat, plus docile.
Le choix de la présidence a été autre. Cherouati n’est pas un mauvais choix. Il n’est sponsorisé par personne.
Il était proche pendant les années 90 du général Fodhil Cherif. Mais ce dernier est aujourd’hui décédé», confie un ancien cadre de Sonatrach.
UN ENFANT DE LA «MAISON»
Diplomé de l’Ecole Polytechnique d’Alger, Cherouati a débuté sa carrière à Sonatrach en 1973, précisément à la division engineering. «C’est un ancien cadre de Sonatrach, il connaît bien Sonatrach, il ne peut lui faire du mal», estime un ancien conseiller du PDG de Sonatrach.
L’homme a été successivement directeur au ministère de l’Energie de 80 à 90 , délégué à l’industrie au ministère de l’Industrie et des Mines au début des années 90, conseiller du PDG de Sonatrach, Bouhafs en 95-96 et DG de Naftal en 96. En 2001- 2002, Chakib Khelil le nomme Secrétaire général du ministère de l’Energie.
Il est désigné ensuite Administrateur délégué de Mariconsult, une filiale de Sonatrach et de l’Eni basé à Milan, chargé de l’exploitation du gazoduc Transmed reliant l’Algérie à l’Italie via la Tunisie, entre 2002 et 2005.
Il est enfin nommé président de l’Autorité de régulation des hydrocarbures ARH. Durant ce mandat, il a développé des connaissances sur la réglementation en matière d’hygiène, de sécurité et d’environnement ainsi que des contentieux.
Il a surtout piloté une étude sur l’évolution de la demande domestique de carburants à long terme.
L’étude conclut qu’à l’horizon 2027, l’Algérie ne sera plus exportatrice de produits raffinés et sera importatrice nette d’essence dans un scénario de laisser faire. Son agence est également la cheville ouvrière d’un comité interministériel chargé d’élaborer une réglementation encourageant l’usage de véhicules plus propres et de produits énergétiques moins polluants.
REMOBILISER DES TROUPES TÉTANISÉES
Ses connaissances de l’amont semblent plus limitées. Il s’appuiera sur les nouveaux vice-présidents pour bien tenir le gouvernail.
Saïd Sahnoun, le vice-président amont est présenté comme un jeune cadre très compétent, ayant une expérience du terrain : il a été responsable de la région de Hassi R’Mel avant d’occuper le poste de directeur des associations. A l’aval, Abdelkader Benchouia accumule une longue expérience dans le raffinage.
Il a été en effet PDG de Naftec, la filiale de Sonatrach spécialisée dans le raffinage, puis premier responsable de la division raffinage à Sonatrach. Le nouveau PDG sera-t-il l’homme qui permettra de sortir de la crise de gouvernance à Sonatrach ? Son principal atout est une expérience de près de vingt ans dans la maison et de plus de 30 ans dans le secteur de l’énergie.
L’enjeu est de s’imposer dans le cadre de ses prérogatives face à un ministre omniprésent. Le groupe Sonatrach doit en effet rassurer des partenaires étrangers troublés par les «affaires», remobiliser des troupes quelque peu tétanisées, trouver des solutions techniques pour des gisements vieillissants et enfin renouer avec la dynamique à l’international.
En un mot, sortir de l’état de quasi-paralysie actuel. Nordine Cherouati semble, selon des sources concordantes, avoir la capacité de le faire. Il faudra cependant attendre quelques mois pour être fixés sur la direction prise par le top management de Sonatrach.
PAR SALIM DALI