Il est inadmissible que l’Algérie s’implique dans un conflit aux côtés de l’ancienne puissance coloniale
Si intervention algérienne il y aurait, dans quel cadre interviendrait-elle et sous l’égide de quelle force? Car, il est anormal, voire inadmissible, que l’Algérie s’implique dans un conflit aux côtés de l’ancienne puissance coloniale.
Au sixième jour de l’intervention militaire française au Mali, la situation se complique. Un conflit sans images qui risquerait de s’embourber dans les sables mouvants du Sahel où toute solution immédiate s’avère être un mirage. Au moment où les avions de chasse pilonnent les positions rebelles, Ansar Eddine – le premier à avoir ouvert les hostilités – ne semble pas impressionné par l’offensive en cours. Il se permet même de récupérer la ville de Diabali, l’une des dernières grandes villes sur la route de la capitale Bamako. Au point où certains observateurs s’interrogent à quel point la France pourrait, à elle seule, tenir tête à des groupes rompus au terrain. Sur un autre chapitre, et contrairement à l’Irak, en Afghanistan…et tout récemment en Libye, la guerre que mène la France ne s’inscrit pas dans le cadre d’une coalition. Même les pays européens hésitent à s’impliquer dans un conflit, dont on connaît le début, mais pas la fin. C’est ce qui inquiète, aussi bien l’état-major de l’armée française que la classe politique. Car, quelques jours seulement après le début de l’offensive aérienne, Jean-Yves Le Drian songe à remettre le «témoin» aux troupes de la Cédéao, composée de pas moins de 4000 hommes. Le conflit étant à ses frontières, l’Algérie qui, depuis le début des hostilités au nord du Mali, s’est attelée à éviter à tout prix le recours à la solution armée. La négociation demeure pour Alger l’«arme» idéale pour sortir de la crise née du coup d’Etat militaire contre l’ex-président malien, Amadou Toumani Touré. La série de réunions tenues à Alger entre le Mouvement national de libération de l’Azawad (Mnla) et Ansar Eddine visaient à trouver un terrain d’entente entre les différents belligérants et le gouvernement malien. Et c’est paradoxalement au moment où les pourparlers s’orientaient vers un dénouement heureux que Iyad Ag Ghaly lance ses jihadistes contre Bamako. Ce qui a mis l’Algérie devant une situation autant inédite qu’inattendue. Mais, qu’est-ce qui fait, qu’une semaine après l’entrée en action des troupes françaises dans la région, l’Algérie a choisi de camper sur ses positions. Celle d’abord de renforcer la sécurité à ses frontières et surtout de continuer à agir en faveur d’une solution politique du conflit, sous l’égide de l’ONU. Aussi, fidèle au principe de non-intervention militaire et de non ingérence dans des pays souverains – une des principales constantes de son action diplomatique – l’Algérie, dont l’Armée nationale populaire demeure garante de l’intégrité territoriale, s’interdit de se lancer dans un conflit dont elle ne détient pas tous les «secrets». Autre raison et non des moindres qui motive la position d’Alger, est de ne pas mettre en péril la vie de ses diplomates, pris en otage depuis dix mois. Par ailleurs, si intervention algérienne il y aurait, dans quel cadre interviendrait-elle et sous l’égide de quelle force? Car, il est anormal, voire inadmissible que l’Algérie s’implique dans un conflit aux côtés de l’ancienne puissance coloniale. Ce qui ne manquerait pas de réveiller les vieux démons, d’autant plus que le pays célèbre le Cinquantenaire de son Indépendance. Un avis partagé par une écrasante majorité d’Algériens qui craignent que l’Algérie soit entraînée dans un conflit aux conséquences désastreuses. Même si des avions de chasse français ont utilisé l’espace aérien algérien pour rejoindre le théâtre des opérations, il reste que cette opération est loin d’être «sans limites» comme l’avait déclaré le ministre français des Affaires étrangères, Laurent Fabius. Ce dernier n’a-t-il pas été «recadré» par le président François Hollande lors de sa visite au Emirats arabes unis. «Le président Abdelaziz Bouteflika a autorisé le survol de l’Algérie par un certain nombre de nos avions», a affirmé Hollande lors d’une conférence de presse. A noter que la secrétaire générale du Parti des travailleurs s’est dite hostile à toute intervention militaire algérienne au Mali. Elle a tenu à souligner la nécessité de l’«attachement aux positions de principe» de l’Algérie concernant la situation au Mali. Elle a affirmé, à ce propos, que le peuple algérien «soucieux de la souveraineté nationale soutient l’Armée nationale populaire (ANP) dans la défense de l’intégrité territoriale du pays et refuse que celle-ci soit entraînée dans le cercle de l’intervention étrangère». En somme, si l’Algérie a vaincu seule le terrorisme, il reste que toute intervention dans le Sahel pourrait être interprétée comme une déclaration de guerre contre la nébuleuse (Mujao, Al Qaîda et autres factions). Ce qui ne manquera pas d’avoir un impact sur sa sécurité intérieure.