En confiant la charge de l’intérim du premier ministère à Youcef Yousfi, le président de la république, lui-même candidat, entend visiblement donner des gages à ses adversaires sur la neutralité de l’exécutif pendant la campagne électorale et le scrutin du 17 avril. Car de tous les profils, il incarne le parfait technocrate.
Sa nomination, en plus de faire le consensus parmi les candidats en lice, se veut également comme un message fort aux capitales occidentales et au marché de l’énergie, très sensible aux remous politiques. A cela s’ajoute son pédigrée qui allie des connaissances économiques, pour avoir dirigé la puissante compagnie Sonatrach et le ministre de l’énergie et des mines, diplomatiques, plusieurs fois ambassadeur mais aussi ministre des affaires étrangères, et politiques en occupant notamment le poste stratégique de chef de cabinet sous Liamine Zeroual en 1996.
Natif de Batna, en 1941, Yousef Yousfi est titulaire d’un doctorat d’Etat en Sciences physiques de l’université de Nancy (France), ingénieur diplômé de l’Ecole nationale supérieure des Industries chimiques de Nancy et d’un diplôme en économie. Maître de conférences, puis professeur de Génie-Chimique à l’Ecole nationale polytechnique d’Alger et à l’Université des Sciences et de la Technologie Houari Boumediene (Bab Ezzouar) où il a dirigé, également, l’Institut de Chimie, entre 1973 et 1978, il occupe le poste de vice-président de Sonatrach en 1979 avant de devenir son directeur général en 1985.
Directeur de cabinet à la présidence de la République, en 1996, il devient député RND, en 1997, puis ministre de l’énergie et des mines du 24 juin 1997 au 23 décembre 1999. Président de l’OPEP entre 1998 et 1999, il est nommé ensuite ministre des affaires étrangères. Ministre délégué entre 2000 et 2001, puis ambassadeur au Canada jusqu’à 2005, Yousfi devient représentant permanent aux Nations-Unies de 2006 à 2008. Avant de revenir au département de l’énergie et des mines à partir de 2010, il va occuper pendant deux ans, soit à partir de 2008 le poste d’ambassadeur à Tunis. Et son rappel, faut-il sans doute le rappeler, intervenait après les affaires qui ont éclaboussé Sonatrach.
Depuis, l’homme, réputé pour sa réserve et sa fermeté, a repris les choses en main et engagé un vaste programme de modernisation et de moralisation de Sonatrach. Sa nomination ce jeudi peut donc se décliner comme un couronnement d’une carrière très riche pour ce connaisseur des enjeux économiques. IL aura la lourde tâche de rassurer l’opinion nationale et internationale sur la volonté du gouvernement d’organiser un scrutin libre et transparent.
Sofiane Tiksilt