A partir d’aujourd’hui les électeurs égyptiens sont appelés à élire les membres l’Assemblée du peuple (chambre des députés), puis ceux du Sénat (Choura). L’ensemble de ce processus électoral durera près de quatre mois.
Dans ce contexte, et à la veille des premières élections législatives depuis la chute du régime de Hosni Moubarak en février dernier, le mouvement des Frères musulmans, principale force de l’opposition en Egypte, a tenu hier un congrès pour exprimer son soutien au gouvernement de Kamal El-Ganzouri désigné vendredi dernier par le Conseil suprême des forces armées (CSFA), actuellement au pouvoir, a affirmé le secrétaire général du Mouvement, Djamal Tah El-Malissi. Le Mouvement a également réclamé pour que le prochain gouvernement soit formé par la majorité parlementaire issue du scrutin. A ce propos, le porte-parole des Frères musulmans, Mahmoud Ghozlane, a estimé que «le futur Parlement est supposé représenter le peuple», et que «le Conseil militaire doit charger le parti qui remporte la majorité des voix de former le prochain gouvernement». Le porte-parole a ajouté que son mouvement était favorable à un régime parlementaire au lieu du régime présidentiel en place.
Par ailleurs, ce congrès a vu également la participation d’autres formations politiques en vue de soutenir le gouvernement d’El-Ganzouri.
Aussi, des appels à des rassemblements sur la place Tahrir au Caire, épicentre de heurts qui ont fait 42 morts en Egypte en une semaine, et dans toute l’Egypte, ont été lancés hier par la Coalition de la jeunesse de la révolution pour une manifestation d’un «million de personnes pour la légitimité révolutionnaire», et pour réclamer à nouveau le départ des militaires au pouvoir et la formation d’un gouvernement de «salut national».
C’est ainsi que des dizaines de milliers d’Egyptiens s’apprêtaient hier à manifester pour réclamer la fin du pouvoir militaire, à la veille des premières élections de l’après-Moubarak considérées comme cruciales pour la transition politique du pays.
A noter que cette mobilisation, qui réclame pour la dixième journée consécutive un transfert immédiat du pouvoir à un gouvernement de «salut national», intervient au lendemain d’un appel de Mohamed El Baradei, ancien chef de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) et prix Nobel de la Paix, pour être chargé par les militaires de former un tel cabinet. Ce à quoi il dira être «prêt à renoncer à l’idée d’être candidat à la présidentielle au cas où il lui serait demandé officiellement de former ce gouvernement».
En réponse, le pouvoir militaire égyptien a affirmé qu’il ne tolèrerait aucune pression. En ces termes, le maréchal Hussein Tantaoui avertira : «Nous ne permettrons à un quelconque individu ou une quelconque partie de faire pression sur les forces armées».
Le maréchal Tantaoui, à la tête du Conseil suprême des forces armées (CSFA) et chef d’Etat de fait, a, à ce propos, tenté d’apaiser la contestation ayant suivi la nomination d’El Ganzouri, en rencontrant avant-hier El Baradei et Amr Moussa, ex-chef de la Ligue arabe et candidat déclaré à la présidentielle. Appelant même ces derniers à soutenir le Premier ministre Kamal El-Ganzouri.
Depuis vendredi des contre-manifestations de soutien à l’armée ont parallèlement eu lieu, notamment au Caire, rassemblant des dizaines de milliers d’Egyptiens. Ces rassemblements rivaux font redouter que le scrutin législatif qui débute aujourd’hui soit émaillé de violences.
A ce sujet, le quotidien gouvernemental Al-Akhbar mettra en garde contre ces violences, affirmant : «Ce que nous craignons, c’est que ces divergences ne se transforment en divisions et de là en guerre entre des groupes qui étaient il y a quelques mois un seul bloc appelant à la chute du régime». Estimant que d’ores et déjà «le pays est au bord d’un fossé qui se creuse (…). La situation actuelle est dangereuse (…) et l’avenir l’est encore plus».
D’un autre côté, la campagne pour les élections législatives s’est achevée dans les gouvernorats appelés à voter pour le premier tour des élections législatives à compter d’aujourd’hui, notamment le Caire et Alexandrie. Quelque 40 millions d’électeurs sur 82 millions d’Egyptiens sont appelés à élire lors de ce scrutin 498 membres de l’Assemblée du peuple (chambre des députés), tandis que 10 autres seront nommés par le maréchal Tantaoui. A souligner que l’Egypte est découpée en 27 gouvernorats divisés en trois groupes qui voteront successivement sur deux tours.
Lynda Naili Bourebrab