Depuis le message de félicitations que Ben Laden avait adressé aux islamistes tunisiens le 16 janvier 2011 via Al Jazeera, alors à son apogée, le terrorisme s’est développé en Tunisie qui est également devenue un fournisseur généreux de djihadistes pour l’Europe et ailleurs.
La mise en garde est balancée par le ministre tunisien de l’Intérieur : “la Tunisie risque des attentats aux ceintures explosives, et des membres gouvernementaux, des journalistes, artistes, députés et figures politiques, sont dans la ligne de mire des terroristes”.
L’aveu du premier responsable de la sécurité intérieure en Tunisie est survenu au lendemain d’une embuscade à la frontière centre-ouest avec l’Algérie ciblant une unité “d’élites”, faisant 8 morts parmi les soldats tunisiens en plus de plusieurs blessés dont trois suite à l’explosion d’une mine. Ben Jedou a même confirmé être lui-même une cible d’assassinat et condamné par Abou Iyadh, leader de la mouvance salafiste-djihadiste Ansar Charia en Tunisie, une branche d’Al-Qaïda. La presse tunisienne proche de la troïka au pouvoir, c’est-à-dire, d’Ennahda, succursale des Frères musulmans égyptiens, et ses deux compères, dont le parti du président Marzouki, comme pour exorciser ses propres peurs, a, en effet, pointé du doigt notre pays ! Une accusation qui sied, par ailleurs, aux politiciens de la troïka empêtrés qu’ils sont dans la crise politique qui paralyse la Tunisie, aggravée par les incessantes pressions de mouvements sociaux républicains et séculiers exigeant l’arrêt de la transition menée par Ennahda, la reprise de l’idéal du printemps du Jasmin, à savoir un large consensus pour trouver des résolutions à l’actuelle crise qui secoue le pays et concevoir au plus vite possible une feuille de route claire évitant toute exclusion.
Or, tout le monde le sait même à Tunis, sans la locomotive de ce parti islamiste, les deux autres formations «alibis» ne pèsent pas grand-chose sur l’échiquier politique, ni son avenir.
Rached Ghannouchi à la baguette
Tout le monde est conscient de l’appétit de Ghannouchi qui ne veut rien lâcher même si Ennahda est traversé par l’onde de choc de la chute de Morsi en Egypte. Aux manifestations anti-pouvoir, de plus en plus massives et violentes, s’est ajouté le terrorisme qui est sorti des bois depuis plus d’une année. Rien de plus facile que d’accuser la main étrangère, nos autorités en abusent également.
La frontière entre l’Algérie et la Tunisie a été fermée et les forces algériennes veillent nuit et jour le long des 1 300 kilomètres. En outre, les deux pays coopèrent dans le domaine de la lutte et de la prévention antiterroriste. Alger fait bénéficier son voisin de son expertise. Il reste que, selon des spécialistes du terrorisme dans la région, Ansar Charia ne prend pas ses ordres chez Aqmi, même si dans ses rangs des djihadistes du Mali y ont trouvé refuge après avoir été chassés de l’Adrar des Ifoghas suite à l’opération Serval menée par le président français pour débarrasser ce ventre mou du Sahel d’Aqmi, Mujao, Ansar dine et consorts. En effet, de la cellule tunisienne «Tarik ibn Ziad», dirigée par Abou Zeïd, un des chefs d’Aqmi, il ne reste rien.
Abou Zeid, éliminé dans l’intervention française au Mali, sa brigade a été pratiquement décimée, et si quelques survivants y ont échappé, ils se sont fondus dans d’autres groupes, dans le Sud libyen, le nord du Niger ou probablement dans les rangs d’Ansar Charia du mont Chaâmbi de Tunisie, à l’instar des djihadistes tunisiens chassés de Syrie. Pour les armes, ce n’est plus un secret, il y a les arsenaux du Sud libyen, dénoncés par les présidents du Niger et du Tchad, et des armes remontées du Mali. Quant à l’expérience, il ne fait pas oublier que des Tunisiens ont fait leurs écoles djihadistes dans les divers théâtres de guerre salafiste, de l’Afghanistan à la Syrie, en passant par l’Algérie, l’Irak, la Libye et le Sahel. Leurs interrogations, ces médias tunisois devraient plutôt les adresser à leurs autorités.
Ali Laarayedh voulait intégrer les salafistes au pouvoir
Leur actuel Premier ministre, ancien ministre de l’Intérieur, l’islamiste Ali Laarayedh, n’avait-il pas souhaité intégrer en 2012 dans le pouvoir des salafistes radicaux qui pourtant commençaient à se rassembler dans le mont Chaâmbi, au prétexte d’éviter leur radicalisation ? Sa manœuvre a paralysé les services de sécurité et l’armée contre toute action sérieuse de nettoyage de cette zone. Aujourd’hui ce n’est plus le cas. Ali Larayedh a changé d’avis et pense qu’il n’a plus aucun espoir de les récupérer. Il avait commencé à interdire les invitations et les séjours des prédicateurs venus des pays du Golfe qui ont une action importante sur le terrain.
Depuis la révolution en Tunisie, il y a eu un afflux d’un certains nombre d’imams et de prédicateurs radicaux, voire salafistes purs et durs, qui ont tenu des conférences et ont rempli des stades. Mais pour l’instant, Ennahda a du mal à récupérer le terrain occupé par les salafistes. Et puis, il y a le tout nouveau contexte régional depuis le rejet par plus de la moitié des Egyptiens de la sauce islamiste. Tunis a donc décidé de faire le ménage, en déclarant la guerre aux salafistes, avec la contre offensive dans le mont Chaâmbi et ses villes de Kasserine et de Thala.
Le renseignement allemand déjoue un plan terroriste d’étudiants tunisiens
Enfin, pour remettre à leur place ces médias tunisiens, rappelons que le service allemand de renseignements intérieurs (BFV), spécialisé dans la traque de l’extrémisme et du terrorisme islamiste, avait déjoué en début d’année un plan terroriste préparé par des étudiants tunisiens d’origine, venus de Tunisie, visant à attaquer par voie aérienne la région de Stuttgart, au sud-ouest de l’Allemagne, à la manière des attentats de septembre 2001 à New York.
L’enquête s’est prolongée en Belgique où une cellule également tunisienne était en charge de financement du djihad international, sur la base de blanchiment d’argent.
Le 12 juin 2013, 5 Tunisiens ont terminé sous les verrous en Espagne pour apologie du terrorisme : plus de 400 documents (vidéos, photos et textes), des explications sur la confection d’explosifs, des exercices d’entraînement. Toujours en juin, les autorités américaines ont dévoilé qu’une opération d’infiltration avait permis d’arrêter des terroristes tunisiens en lien avec le complot avorté pour faire dérailler un train de VIA Rail entre Toronto et New York.
Ces étudiants tunisiens auraient planifié, en plus du complot contre le train de VIA Rail, une attaque à l’arme chimique sur le sol américain afin de tuer 100 000 personnes en contaminant l’air ou l’eau. Leur chef, un Tunisien, a été arrêté à l’aéroport JFK de New York le 22 avril 2013, le même jour où les autorités canadiennes mettaient la main sur deux autres suspects dont le Tunisien Chiheb Esseghaier. Sans oublier l’implication d’un Tunisien dans l’attentat contre le complexe gazier de Tiguentourine, dans le sud algérien.
D. B