Sous l’effet de la baisse des prix du baril, de la demande et de la production des hydrocarbures, le département de Karim Djoudi compte passer aux actes.
Les Algériens vont-ils être amenés à serrer leur ceinture? Au moment où l’inflation bat tous les records, que les prix du pétrole ont connu une nette régression, et que le front social est en ébullition, le gouvernement semble revoir sa copie. Après les augmentations en cascade des salaires dont tous les secteurs ont bénéficié, le ministère des Finances estime qu’une telle politique mènerait le pays vers la faillite. D’ailleurs, le ministre des Finances n’a pas écarté l’éventualité, avant-hier, de geler toutes les augmentations de salaires et d’opérer des coupes dans les budgets d’équipement de certains projets.
Le gouvernement prône la prudence, car la tendance à la baisse de la demande et des prix du pétrole qui se confirme de plus en plus, aura un impact certain sur les capacités financières du pays. Dans ce contexte, le ministre a averti en marge d’une séance plénière de l’APN, contre «l’effet d’une augmentation démesurée des salaires dans les prochaines années». «Si on dépense trop, on va tout perdre», a-t-il dit en réponse à une question sur l’orientation du gouvernement quant aux dépenses de fonctionnement et notamment les salaires. Les augmentations de salaires, décidées en 2009, ont été faites soit pour un besoin de rattrapage soit pour un besoin de restructuration, a-t-il rappelé. Cependant, pour ce qui est du rattrapage, «il faut être très prudent car si on va au-delà, on mettra en difficulté l’avenir de nos équilibres budgétaires», a-t-il prévenu.
La prudence «nous oblige aujourd’hui à être beaucoup plus nuancés sur les augmentations de salaires», a affirmé le ministre des Finances. En cas d’une baisse importante et confirmée des prix du pétrole, les recettes algériennes vont certes baisser et ce sont alors les dépenses de fonctionnement qui vont creuser le déficit public, a-t-il encore mis en garde. L’autre tendance du gouvernement: il n’a pas fait obligation d’un recrutement massif aux entreprises publiques sous l’effet de la pression des chômeurs, notamment au sud du pays.
A une question pour savoir si les dernières mesures du gouvernement au profit des wilayas du Grand Sud allaient fragiliser les situations budgétaires des entreprises publiques, il a répondu: «On ne demande pas aux entreprises de recruter plus, on leur demande juste, dans le cadre des programmes qui sont les leurs, de favoriser au maximum la main-d’oeuvre locale.»
Le député du FJD, Lakhdar Benkhellaf, interpellait le ministre sur les déclarations fiscales faites par les compagnies pétrolières en Algérie. Lesquelles échapperaient, selon ce parlementaire à tout contrôle ou vérification à posteriori. Il s’est également interrogé sur un éventuel transit hors circuit officiel du pétrole, en se référant aux constats faits par un rapport de la Cour des comptes élaboré en 2011. Le ministre a expliqué que «le système fiscal en Algérie était un système déclaratif mais qui n’empêchait pas un contrôle a posteriori rigoureux».
L’incompréhension de certaines dispositions fiscales par les compagnies pétrolières étrangères activant en Algérie est à l’origine d’un manque à gagner en matière de fiscalité pétrolière, a-t-il reconnu. Entre 2009 et 2011, l’administration fiscale a pu récupérer l’équivalent de 60 millions de dollars d’impôts grâce au redressement de la situation fiscale de 19 compagnies étrangères et celle de quatre sociétés dépendant de la Sonatrach, a-t-il fait savoir. «Mais il ne s’agit pas d’une évasion fiscale volontaire. Ce sont juste des infractions essentiellement dues à l’incompréhension, par ces sociétés, de certaines dispositions fiscales», a-t-il dit. «Parler d’évasion fiscale dans le secteur des hydrocarbures ou alors de contrebande me semble infondé», a-t-il indiqué. La nouvelle loi sur les hydrocarbures adoptée en 2012 introduit un nouvel article qui considère les partenaires de Sonatrach comme des «sujets fiscaux» les soumettant de ce fait à d’éventuels contrôles fiscaux. Alors que sous l’ancienne loi, seul le groupe algérien (Sonatrach) était considéré comme sujet fiscal et devait ainsi assumer seul d’éventuels redressements.