Pour une fois, le Mouvement de la société pour la paix (parti islamiste et membre de l’Alliance présidentielle) défend les positions d’un parti qui se situe entre «l’opposition et l’adhésion», celui des travailleurs.
Il y a deux ans, le parti de Ahmed Ouyahia, en l’occurrence le RND (parti de l’Alliance présidentielle), avait signé un pacte de coopération avec le Parti des travailleurs dans le cadre du renouvellement partiel de la composante du Conseil de la nation intervenu fin 2009, une alliance qui a attisé la colère du FLN alors que le MSP était hors-jeu. Et voilà qu’en 2011, à la veille des élections législatives, un nouveau «faux» couple est né. Il s’agit du couple PT-MSP.
Il faut dire que les réformes politiques annoncées le 15 avril dernier par le Président Bouteflika ont bouleversé la vie politique. D’ailleurs, des mouvements de dissidence se sont renforcés et de nouveaux partis naissent tous les jours. Ce n’est pas tout, car la sixième législature du Parlement s’adapte aussi au changement, ou s’agit-il simplement d’un coup de théâtre puisque cela n’influence en rien sur le sort des textes soumis par le gouvernement. D’ailleurs jusqu’à mardi dernier, quatre projets de loi organiques relatifs aux réformes politiques ont été adoptés avec les retouches du FLN. Il s’agit notamment des projets portant sur le régime électoral, les partis politiques, la représentation des femmes aux Assemblées élues et l’incompatibilité du mandat parlementaire.
Cependant et pour une fois, le Mouvement de la société pour la paix (parti islamiste et membre de l’alliance présidentielle) défend les positions d’un parti qui se situe entre «l’opposition et l’adhésion», celui des travailleurs. Une alliance qui n’est pas déclarée officiellement mais constatée avec le rapprochement des positions. D’ailleurs, les deux partis se sont abstenus mardi de voter trois projets de loi portant sur les réformes politiques. Une manière de dire non au projet de loi organique sur les partis politiques. De plus, le MSP annonce déjà qu’il dira «non» aux prochains projets de loi qui seront soumis au vote et portant notamment sur les associations et le code de l’information. Dans un communiqué rendu public lundi soir, M. Soltani a appelé également à l’organisation d’un référendum sur les réformes politiques pour les sauver. Dans ce document il est indiqué que «les résultats des consultations ont noyé les réformes, taillées sur mesure dans le volet technique, et ont été vidées de leur substance par la mentalité du tutorat et la logique de la majorité. Une situation qui pourrait amplifier le boycott des prochaines élections». De ce fait, «le peuple attend beaucoup», mais jusque-là il est «déçu des résultats des réformes». Sans citer ses amis-ennemis (le FLN et le RND), le MSP rejette la responsabilité sur des partis impliqués «qui se jouent de l’espoir de la Nation» et avertit sur les conséquences du «ratage de cette occasion historique».
Avanta lui, c’est la secrétaire générale du PT qui avait appelé le président de la République à intervenir pour sauver les réformes qui, selon elle, «sont déviées et vidées de leur sens».
Mme Hanoune réclamait même une deuxième lecture des textes des réformes politiques, un sujet qu’elle aurait abordé avec le président de la République. Invitée de la Radio nationale hier, elle s’est attaquée aux islamistes, à commencer par Abdallah Djaballah, leader du Front pour la justice et le développement (non encore agréé). Elle dira : «Nous avons déjà vécu la gestion des communes par les islamistes en 1990. Nous avons fait l’expérience du partage de pouvoir entre islamistes et nationalistes, démocrates et autres. Ennahda, du temps d’Abdallah Djaballah, a participé au gouvernement. Le MSP est islamiste et est au gouvernement. Nous avons tout essayé. Ce n’est pas nouveau et en plus, nous avons eu une tragédie nationale. En Tunisie et en Égypte, il y a absence d’une véritable alternative démocratique. Au Maroc, ceux qui ont voté pour le courant islamiste voulaient sanctionner les partis qui étaient au gouvernement».
Avec ses déclarations, il est clair que le courant ne passe pas entre Hanoune et les islamistes mais c’est l’enjeu d’un repositionnement qui laisse croire à un rapprochement entre le MSP et le PT.
Il faut dire que le divorce déclaré par le MSP avec l’alliance présidentielle au niveau de l’APN n’a aucun effet sur l’avenir des textes du gouvernement puisque la majorité est assurée par le FLN et le RND. Mais la sortie de Soltani pourrait lui permettre d’attirer la sympathie des «islamistes» et des «opposants» afin d’assurer un bon score lors des prochaines législatives.
Dans ce cadre, le ministre de l’Intérieur, Daho Ould Kablia a souligné mardi dernier à propos des déclarations visant à «mettre en doute ou à minorer» les lois relatives aux réformes politiques, qu’elles «ne sont en fait que des répliques d’un séisme qui a ébranlé ceux qui sont habitués à pêcher en eau trouble». A ce sujet, il a ajouté : «Si d’aucuns veulent se positionner ou se repositionner, ça les regarde, mais cela doit se faire de façon convaincante».
Par Nacera Chenafi