NABNI veut des mesures aussi « audacieuses » que la nationalisation des hydrocarbures en 1971

NABNI veut des mesures aussi « audacieuses » que la nationalisation des hydrocarbures en 1971

Le groupe de réflexion Notre Algérie Bâtie sur de Nouvelles Idées (Nabni), invité pour la première fois à la tripartite de jeudi, propose une révolution dans la gouvernance publique. Il s’agira pour l’Etat, d’assumer ses échecs, d’instaurer la transparence dans la gestion des dépenses publiques et oser des mesures audacieuses pour couper les cordons de la rente pétrolière. En urgence.

Dans un document rendu public à l’issue de la réunion qui a regroupé jeudi le Premier ministre Abdelmalek Sellal aux syndicats des travailleurs, aux représentants du patronat et d’organisations de la société civile, les animateurs de Nabni considèrent qu’il est urgent d’engager l’Algérie dans la voie du sevrage aux hydrocarbures. Car Nabni estime, « sur la base d’hypothèses optimistes », que d’ici 2020, « les finances publiques pourraient ne plus soutenir le rythme des investissements publics et celui des transferts sociaux, face à une demande de plus en plus pressante de la société ».

Nouveau modèle de croissance

Les propositions de Nabni résumées dans l’intervention de son porte-parole sont largement inspirées des initiatives rendue publiques auparavant. Pour ce groupe de réflexion, il est impératif « d’inventer un nouveau modèle de croissance qui ne dépende plus des hydrocarbures » car « la fenêtre d’opportunités » qui s’offre aujourd’hui au pays « pourrait se refermer ». Pour cela, l’Etat doit reconnaitre l’échec de ses politiques. Et ne pas se limiter à des « mesures ponctuelles » et de « réformes marginales », car les chiffres de cet échec sont sans appel : une production industrielle d’à peine 5% du PIB et 70% des besoins alimentaires du pays importés. « Au vu de cette expérience, pourquoi espérer qu’une nouvelle batterie de mesures aient plus d’impact que tout ce qui a été tenté au cours de la dernière décennie ? », s’interroge Nabni.

Passer à une nouvelle gouvernance économique

Dans sa série de recommandations pour sortir l’Algérie de son syndrome hollandais, Nabni propose de s’attaquer rapidement à l’origine de l’échec, à commencer par une rupture progressive du « cordon de la rente » pétrolière. Une sorte de thérapie de groupe où l’Etat, la société et les acteurs économiques et sociaux sont invités « à se défaire de la rente ». Nabni préconise un « pacte national devant aboutir à des mesures contraignantes sur les dépenses publiques et l’utilisation de la rente ».

Pour donner force à ces mesures, Nabni propose un saupoudrage économique à la révision constitutionnelle en gestation en y inscrivant, entre autres, une « règle d’or budgétaire qui limite progressivement la part du budget de l’Etat provenant de la fiscalité des hydrocarbures, jusqu’à la ramener à zéro en 20 ans ». Autre mesure susceptible d’être constitutionnalisée, le plafonnement de l’endettement public, afin d’empêcher l’Etat de s’endetter de manière excessive « pour continuer à financer un niveau de dépenses non soutenable ». Nabni propose ensuite qu’une partie significative des recettes en devises provenant des exportations d’hydrocarbures (20% dans une première phase) soient investie dans la création d’un fonds d’investissement international.

Transparence et redevabilité

Pour Nabni, l’instauration d’une transparence totale dans l’affectation des aides et subventions publiques aux institutions et aux entreprises publiques et privées est susceptible de mettre un terme aux dépassements dans la gestion des dépenses publiques. La transparence devrait accroître le sentiment de redevabilité des responsables devant la société, pour leur gestion des deniers publics. La transparence doit également être appliquée aux appels d’offre et aux décisions d’attribution des contrats publics. « La transparence génère les garde-fous qui permettent d’alerter les acteurs et de changer de cap quand l’Etat fait fausse route », précise Nabni.

Bannir les politiques « à huis clos »

Nabni considère que l’échec des mesures économiques gouvernementales est le résultat de l’exclusion par l’Etat, des acteurs économiques et sociaux dans la réflexion et la prise de décisions majeures. Le groupe de réflexion propose d’y remédier en « institutionnalisant la concertation comme mode de conception, de suivi et de mise en œuvre des politiques économiques».

Pour donner forme à cette concertation, Nabni propose d’instituer au niveau du Premier ministère ou de la Présidence de la République, «une unité de coordination et de mise en œuvre stratégique des politiques économiques », une sorte de task-force qui sera « ouverte à la concertation continue avec les partenaires sociaux et la société civile » afin « d’identifier les blocages et de proposer des arbitrages ou des ajustements à l’Exécutif. »