En dépit d’une conjoncture économique et politique difficile Pouvoir-opposition : l’impossible dialogue

En dépit d’une conjoncture économique et politique difficile Pouvoir-opposition : l’impossible dialogue

Autant les partis de l’opposition, dans ses différents courants, formulent des propositions de sortie de crise, autant le pouvoir s’entête dans sa fuite en avant.

Le récent tweet de Manuel Valls aura finalement mis en évidence l’état de santé du Président, malgré les cris d’orfraie des gardiens de la Cour : le président Abdelaziz Bouteflika s’est rendu, hier, à Genève pour une “visite privée” durant laquelle, il effectuera des “contrôles médicaux”, selon un communiqué de la présidence de la République. Officiellement, il s’agit donc d’un contrôle de routine. Mais rien ne dit que son état de santé ne se soit pas brusquement détérioré au regard de l’image qui nous a été donnée de voir dans le fameux tweet du Premier ministre français.

À l’inverse du communiqué du mois de décembre dernier, lorsque Bouteflika s’était rendu à la clinique d’Alembert de Grenoble, la Présidence ne précise pas si le séjour sera cette fois de “courte durée”. Seule suggestion : le choix de Genève laisse à penser que “l’acte désobligeant” de Valls a poussé Alger à un sursaut d’orgueil, maintenant que l’image de la première institution et, par ricochet, du pays a été écornée. Mais au-delà des interrogations et autres supputations, ce nouveau séjour à l’étranger ne manquera pas de donner du grain à moudre à l’opposition qui n’a pas cessé d’appeler depuis 2013, dès la première hospitalisation du Président au Val-de-Grâce, à l’application de l’article 88 (devenu 102 dans la nouvelle mouture), avant de réclamer une élection présidentielle anticipée, puis enfin, une période de transition. Il reste que ses appels étaient assimilés à des prêches dans le désert. Ils ont été combattus avec une rare violence par l’entourage du Président, les partis du pouvoir et leur satellite, laissant entendre qu’un éventuel dialogue avec l’opposition relève de l’impossible. Pourtant, au regard de la conjoncture, les multiples défis auxquels est confronté le pays, au double plan économique et sécuritaire, il devenait impérieux que le pouvoir tende la main à l’opposition dans un effort d’exploration de quelques solutions pour une sortie de crise.

Il y a quelques jours encore, c’est le chef de cabinet de la Présidence qui stigmatisait l’opposition, accusée d’agir “en relais de l’adversité extérieure revancharde”. “Et nous venons d’avoir une nouvelle preuve avec cette histoire de photo du président Bouteflika”, a-t-il dénoncé. “En fait, il s’agit d’une manœuvre coordonnée par certains entre Paris et Alger”, a-t-il accusé. Si avec les partis regroupés au sein de la CNLTD, la légitimité du Président et l’organisation de la transition, qui signifieraient la fin du régime, semblent constituer la principale pomme de discorde, il est à se demander pourquoi les autorités ne s’inscrivent pas dans l’autre initiative qui est la construction d’un consensus, d’autant qu’elles ne manquent pas d’appeler à la constitution d’un large front intérieur contre les menaces extérieures. Dans son allocution à Oum El-Bouaghi, le premier secrétaire du FFS, Mohamed Nebbou, a laissé entendre, à demi-mot, que ce consensus est non seulement très laborieux, mais aussi risque de ne pas aboutir en raison principalement de l’entêtement du pouvoir.

“Nous allons continuer à faire le tour du pays, commune par commune s’il le faut, pour parler avec nos compatriotes, entendre d’eux ce qu’ils ont à nous dire et partager avec eux nos craintes et nos espoirs. Mais nous prenons à témoin nos compatriotes qu’un parti politique engagé pour la construction démocratique d’un État de droit n’a pas vocation à jouer les pompiers pour les incendies qu’allume un pouvoir que l’histoire a déjà condamné. Notre combat est celui de la construction d’un consensus national pour une sortie pacifique et ordonnée de la crise. Nous allons continuer à le porter. Mais tout le monde doit savoir que désormais le temps est compté pour le pays. La crise a trop duré. À chacun de prendre ses responsabilités.” En attendant, c’est tout le pays qui se demande de quoi sera fait demain au moment où, en raison de l’absence du Président, sur le plan diplomatique, l’Algérie reçoit des coups, comme cette récente résolution des pays du Golfe soutenant l’initiative marocaine dans le conflit du Sahara occidental ou encore le regroupement des cinq pays du Sahel sans nous, tandis que les solutions à la crise libyenne s’esquissent en Tunisie et au Maroc.