Moussa Naït Amara, militant de la démocratie, à l’expression: “Il n’y a aucun intérêt dans la fusion des partis”

Moussa Naït Amara, militant de la démocratie, à l’expression: “Il n’y a aucun intérêt dans la fusion des partis”

Les partis de la mouvance démocratiques tirent chacun de son côté. Pourtant, plus qu’un idéal, ils partagent aussi l’essentiel de leurs positions sur plusieurs questions. Pourquoi ne convergent-ils pas? Moussa Naït Amara tente d’apporter des éléments de réponse dans cette interview.

L’Expression: Une convergence des partis de la mouvance démocratique dans une perspective de fusion est-elle objectivement possible?

Moussa Naït Amara:

A mon avis, elle sera effectivement possible quand on arrivera à converger sur «qui sont les partis de la mouvance démocratique?». En attendant, je crois qu’elle sera possible sur des échéances et des conjonctures bien définies, mais dans la perspective d’une fusion, la démarche me semble utopique, du moins pour le moment. Nous devons encore gagner en maturité politique. Nous traînons encore dans la phase de l’apprentissage démocratique. Les anciennes élites des partis comme le RCD et le FFS se retrouvent aisément dans d’autres cadres, mais les appareils sont encore figés.

Quels sont, selon vous, les partis de la mouvance démocratique?

Je considère au moins le RCD, le FFS, le MDS, Talaïe El Hourriet et Jil Jadid comme étant des partis de la mouvance démocratique.

Des partis comme le RND le MPA et l’ANR, inscrivent leurs programmes et leurs visions respectives dans le cadre de ce que l’on appelle les valeurs démocratiques. Leur proximité du pouvoir et leur soutien inconditionnel à toutes ses politique leur dénient-ils, selon vous, leur appartenance à la mouvance démocratique?

Il est inconcevable de se taire devant les atteintes aux libertés les plus évidentes telles que la liberté de la presse, l’emprisonnement sans jugement, les arrestations pour délit d’activité sur les réseaux sociaux et se considérer comme porteur des idéaux démocratiques. Ces partis n’ont jamais dénoncé une atteinte aux libertés démocratiques, donc pour moi ils ne peuvent pas être des partis démocrates.

La mouvance démocratique est présentée souvent, à tort, comme étant un bloc monolithique. Or, entre le MDS, le RCD, le FFS, Talaïe El Hourriet et Jil Jadid, il existe de grandes divergences idéologiques. Ne pensez-vous pas que ces divergences idéologiques pèsent aussi dans l’équation de rapprochement qui peine à se réaliser?

Effectivement, des divergences idéologiques existent en fonction des courants politiques. Ça peut exister même au sein d’un même parti d’ailleurs. Mais je ne crois pas que cette diversité politique peut empêcher une convergence autour d’un Smig démocratique et républicain clairement défini. Quand on parle de convergence, cela sous-entend à mon sens que ça sera autour d’une plate- forme politique. Dans cette conjoncture de réincarnation de la dictature et de l’Etat policier par le pouvoir en place, les aspects de convergence démocratique sont nombreux, donc aucune divergence idéologique ne peut être un obstacle pour un quelconque rapprochement. Il suffit de réfléchir sur le déclic et les mécanismes nécessaires pour un tel rapprochement.

Et pour ce qui est d’une fusion, comme celle que le MSP et le Front du changement de Menasra s’apprêtent à faire? Ceci est- il souhaitable ou, du moins, possible pour les partis de la mouvance démocratique?

Je ne vois aucun intérêt dans la fusion des partis. Bien au contraire, la diversité fait la force. Il faut laisser vivre tous les courants politiques mais il faut savoir être opportun pour réaliser des convergences quand il le faut. L’union ne veut pas dire l’unicité. Il faut justement savoir s’unir dans la diversité.

Certains observateurs parlent du leadership comme étant l’un des plus importants obstacles à l’union des partis de la mouvance démocratique. Qu’en est-il selon vous?

Oui, certainement, les questions de leadership pèsent sur cette situation de désunion des forces démocratiques. Mais, devant cette situation catastrophique provoquée par le pouvoir sur tous les volets, la maturité doit primer.

Personnellement, je salue par exemple la disponibilité d’une personnalité de la mouvance démocratique comme Saïd Sadi qui ne ménage aucun effort depuis quelque temps pour dissiper toutes ces questions de leadership et de divergences d’ordre personnel.

La présence du RCD, de Talaie El Houriat, de Jil Jadid, etc., au sein de la Cltd et l’Icso à coté de partis islamistes, y compris des cadres de l’ex-fis, ne dessert-elle pas la convergence démocratique souhaitée?

Je ne vais pas me substituer aux responsables de ces partis qui sont les mieux placés pour expliciter leur présence à Cltd et à l’Icso, mais il me semble que j’ai déjà répondu sur la faisabilité des «alliances» et des «regroupements politiques conjoncturels». Quand ce genre d’actions se basent sur des plates-formes politiques documentées où tous les participants s’engagent à respecter les minima démocratiques, je ne vois aucun problème, y compris avec des mouvances avec lesquelles on diverge sur l’essentiel. A Mazafran, nous avons vu presque toute l’opposition démocratique.