C’était sans conteste le plus grand pôle industriel de tout le territoire steppique.
L’unité de production et de commercialisation de semoule et de farine issue de la meunerie « Moulins de Djelfa », appartenant au groupe Eriad de Tiaret, vient de fermer ses portes après plus de 26 ans d’activité.
En effet, lorsqu’ils avaient été créés en 1983, les Moulins de Djelfa ne disposaient que d’une unité de production de farine d’une capacité de 2 500 q/j, avant d’étendre, en 1986, leur champ d’activité à la production de pâtes, avec 1 600 q/ j et une semoulerie d’une capacité de production de 3 600 q/j.
S’étalant sur une superficie de 14 hectares, ces moulins qui employaient pas moins de 800 travailleurs, et qui avaient coûté au groupe la mirobolante somme de 700 milliards de centimes, couvraient les besoins de plusieurs wilayas de l’intérieur et du nord du pays, dont des entreprises publiques et privées, et même des établissements militaires de Blida, Tipasa, Laghouat et M’sila.
Cependant, après avoir tourné à plein régime, les moulins feront entendre leurs premiers grincements en 2000 lorsque, sous l’effet des créances qui n’étaient alors que de 74 milliards de centimes, faute de procéder au recouvrement de la dette, l’administration décide de licencier des centaines de travailleurs.
Conséquence, 724 d’entre eux seront sacrifiés sur l’autel du laxisme et de la mauvaise gestion.
En dépit de cette grosse alerte, la politique de la fuite en avant va pourtant continuer, puisque 44 autres milliards de centimes de crédits seront bizarrement accordés, portant les créances à un seuil inimaginable avec 120 milliards de centimes en 2006.
Les desseins de la tutelle commençaient à se faire de plus en plus clairs, et la cession au privé n’était plus qu’une question de jours.
En effet, le groupe Eriad se désistera de l’unité de la manière la plus rocambolesque qui soit, opérant un bradage en bonne et due forme en la cédant, tenez-vous bien, à la modique somme de 54 milliards de centimes.
Le prix d’ouverture fixé à 115 milliards n’ayant même pas été respecté et la vente de l’unité à un entrepreneur du bâtiment, sur qui pèsent de lourdes charges fiscales et qui n’a aucun lien avec le domaine, s’inscrit en violation directe des lois sur la privatisation.
Autant de données qui justifieront les craintes des travailleurs qui avaient déjà enterré tout espoir de voir un jour le bout du tunnel.
Pis encore, l’entrepreneur en question, non content d’avoir outrepassé la période transitoire de paiement de six mois stipulée par la loi régissant la privatisation des entreprises publiques, disparaîtra définitivement des regards vers la fin de l’année 2008 après avoir payé les travailleurs de l’argent de ses redevances envers l’assurance et les impôts.
Une dernière et ultime tentative de louer l’unité à une société privée étant restée sans suite, les moulins tourneront dans le vide et les travailleurs broieront du noir jusqu’à la liquidation totale et définitive de l’entreprise, en se posant beaucoup de questions sur les tenants et les aboutissants de cette mise à mort programmée.