Le président égyptien, parti avec sa famille à Charm-el-Cheik, remet le pouvoir à l’armée et doit s’exprimer ce soir. Scènes de liesse en Egypte mais aussi à Tunis et Gaza.
Le point sur la situation en Egypte, vendredi 11 février.
En politique intérieure. Le président égyptien Hosni Moubarak a démissionné vendredi et remis le pouvoir à l’armée. Annonce faite par le vice-président et général Omar Souleimane. Moubarak a quitté Le Caire pour Charm-el-Cheikh avec sa famille, où le président possède une résidence secondaire, a indiqué un porte-parole du PND, le parti au pouvoir.
Plus tôt dans la journée, le député travailliste israélien Binyamin Ben Eliezer a affirmé que le président égyptien lui avait dit, au cours d’une conversation téléphonique jeudi soir peu avant son allocution télévisée, qu’il cherchait « une porte de sortie honorable ». « Il sait que c’est fini, que c’est la fin de la route », a ajouté ce proche de Moubarak.
Jeudi, le chef de l’Etat égyptien, sous la pression d’une contestation populaire sans précédent, avait tenté de calmer la contestation de la rue lors d’une allocution télévisée, en déléguant une partie de ses prérogatives au vice-président. « La transition du pouvoir va d’aujourd’hui à septembre », avait déclaré Hosni Moubarak, la voix parfois tremblante, visiblement affecté, en référence à la date de l’élection présidentielle à laquelle il a promis de ne pas se présenter après 29 ans de pouvoir.
L’armée égyptienne a elle assuré qu’elle garantirait des « élections libres et honnêtes », mais mis en garde contre toute atteinte à la sécurité du pays et des citoyens, selon un communiqué lu vendredi à la télévision d’Etat. Elle a également appelé à un retour à la vie normale et s’est portée garante des réformes promises par le président Hosni Moubarak.
Jeudi, Hosni Moubarak a en outre annoncé l’amendement de cinq articles controversés de la Constitution et l’annulation d’un sixième article. Ces articles imposent notamment des conditions très restrictives de candidature à l’élection présidentielle, ou permettent de se représenter à la présidence sans limitation du nombre de mandats.
D’autres articles limitent les possibilités de recours après des élections législatives, ou permettent au président d’ordonner que des civils accusés de terrorisme soient traduits devant un tribunal militaire. L’article 189 stipule que seuls le président de la République et le président du Parlement peuvent proposer des amendements constitutionnels.
Sur place. Les manifestants place Tahrir ont explosé de joie à l’annonce de la démission de Moubarak, eux qui avaient réagi avec colère jeudi soir quand le président avait dit vouloir rester jusqu’en septembre. La nouvelle a été accueillie par des concerts de klaxons et des scènes de liesse, dans toute l’Egypte.
A l’international. Israël espère que la période de transition qui s’ouvre en Egypte après l’annonce de la démission du président égyptien Hosni Moubarak se fera « sans secousse ».
La chef de la diplomatie européenne Catherine Ashton a également a salué cette démission qui ouvre ainsi la voie à des « réformes plus rapides et plus profondes ».
Dans la bande de Gaza, la nouvelle a été accueillie par des scènes de liesse. Le Hamas a réagi, estimant que c’était le « début de la victoire de la révolution égyptienne ».
Le nombre de victimes. Depuis le 3 février, les manifestations se déroulent le plus souvent dans le calme. Des heurts entre policiers et manifestants pendant les premiers jours de la contestation, puis entre militants favorables et opposés à Hosni Moubarak le 2 février, ont fait près de 300 morts ainsi que des milliers de blessés selon l’Onu et Human Rights Watch.
La révolte a touché une ville à 400 km au sud du Caire, El Kharga, où cinq personnes, blessées dans des heurts entre manifestants et policiers ayant fait usage de balles réelles, ont succombé, selon des sources médicales.
Des conséquences économiques. La crise risque de coûter cher à l’économie du pays le plus peuplé du Moyen-Orient, l’instabilité ayant fait fuir les touristes et pouvant refroidir durablement l’ardeur des investisseurs étrangers. Le directeur de l’Organisation mondiale du tourisme a déclaré mercredi ne se faire « aucun souci » quant à l’attractivité de l’Egypte comme destination touristique. Aucun assureur ne garantit la perte d’exploitation liée à des troubles ou le remboursement de frais supplémentaires pour rapatrier des touristes. Des voyagistes réclament la constitution d’un fonds de mutualisation à l’image de ce qui existe aux Pays-Bas.
Le nouveau gouvernement égyptien a approuvé, par ailleurs, une hausse de 15% des salaires des fonctionnaires ainsi que des retraites des militaires et des civils. Ces augmentations entreront en vigueur à partir du 1er avril.
La réouverture de la Bourse du Caire a été reportée à dimanche.
Les consignes de sécurité. Le ministère des Affaires étrangères, notant « des signes d’une reprise d’activités » en Egypte, a indiqué mercredi que les expatriés pouvaient commencer à « préparer » leur retour dans ce pays, dans une actualisation de sa rubrique Conseils aux voyageurs de son site internet. Pour le tourisme, le Quai d’Orsay continue d’inviter les Français « à reporter leur voyage afin de s’assurer que les évolutions actuelles se confirment dans les jours qui viennent ». A noter que les voyagistes français ont décidé de prolonger jusqu’au 14 février inclus, la suspension de tous les départs de vacanciers pour la Tunisie et l’Egypte, départs suspendus depuis le 28 janvier pour l’Egypte et depuis mi-janvier pour la Tunisie.