Mouammar Kadhafi :une mort et plusieurs versions

Mouammar Kadhafi :une mort et plusieurs versions

Mouammar Kadhafi est mort, c’est une certitude. Cependant, les circonstances dans lesquels l’ex-guide libyen a péri jeudi dernier à Syrte, sa région natale distante de 360 km à l’est de Tripoli, font l’objet de controverses.

Plusieurs versions sont avancées aussi bien de la part des responsables des pays de l’OTAN, de ceux du Conseil national de transitions (CNT) et la version du médecin qui a examiné le corps de Kadhafi qui contredit celles des nouvelles autorités de Libye. A cela s’ajoutent les images circulant sur les télévisions du monde montrant Kadhafi couvert de sang et empoigné par des combattants surexcités.

Ce qui sème davantage le doute sur les circonstances exactes de sa mort. Un haut responsable de l’Organisation des Nations unies a mis l’accent hier sur la nécessité de lancer une enquête pour déterminer avec exactitude les circonstances de cette mort.

Le médecin qui a examiné le corps de Kadhafi a déclaré qu’ «il a été touché mortellement par balle au niveau des intestins après avoir été capturé». Selon ce médecin, «Kadhafi était vivant quand il a été capturé et a été tué ensuite. La balle à l’origine de sa mort a pénétré son intestin», a-t-il dit, ajoutant qu’«il a ensuite reçu une deuxième balle dans la tête qui a traversé son crâne.

Concernant Mouattasim, un des fils du guide, «son corps présente une blessure, une grande ouverture au-dessus du torse et juste en dessous du cou. Il présente trois blessures dans le dos et à l’arrière de la jambe. Il y a également une blessure causée par un éclat d’obus sur sa jambe mais qui remonte à plusieurs jours», a précisé le médecin.

CNT : «Mort d’une balle dans la tête dans une fusillade»

De son côté, le chef de l’exécutif du CNT, Mahmoud Jibril a déclaré que Kadhafi a été tué d’une balle dans la tête lors d’un échange de tirs jeudi à Syrte. «Quand il a été retrouvé, il était en bonne santé et portait une arme», a-t-il dit lors d’une conférence de presse à Tripoli, ajoutant qu’il avait ensuite été conduit vers un pick-up.

«Quand le véhicule a démarré, il a été pris dans un échange de tirs entre ses proches et des révolutionnaires, et a été tué d’une balle dans la tête». Il a ajouté que Kadhafi était vivant jusqu’à son arrivé à l’hôpital de Misrata. Au sujet de Saif El-Islam, son autre fils, il aurait réussi à prendre la fuite en direction du Niger, selon un responsable militaires du CNT. «Les combattants dans la région sont en alerte», a ajouté le même responsable qui croit savoir que Seïf El-Islam se déplacerait dans un convoi composé de trois véhicules armés.

L’autre version liée aux circonstances de la mort du guide libyen est celle dont a fait part le ministre français de la Défense, Gérard Longuet. Il a déclaré lors d’une conférence de presse que «ce sont des avions français qui ont identifié et stoppé la colonne de véhicules dans laquelle se trouvait Kadhafi». Il précisera plus tard qu’au moins un avion français faisait partie de l’unité de l’Otan qui a mené l’assaut, ce qui a forcé la colonne de véhicules à se scinder.

Selon lui, «une partie de la colonne a alors affronté une brigade du CNT, et c’est dans ces affrontements que des véhicules ont été détruits, des personnes blessées et tuées et parmi elles se trouvait le colonel Kadhafi. Une quatrième version a été relatée par un responsable US selon lequel «c’est un drone de son pays qui a tiré un missile Predator sur le convoi dans lequel Kadhafi prenait la fuite, le forçant à s’arrêter.

Des images filmées de ce qui apparaît comme ses dernières secondes de vie offrent toutefois quelques indications sur sa mort. Kadhafi était encore vivant lors de sa capture près de Syrte. Dans une vidéo filmée par une personne présente au milieu de la foule, on distingue Kadhafi tiré hors du capot d’un véhicule et jeté par terre et tiré par les cheveux. «Laissez-le en vie ! Laissez-le en vie !» crie une voix. Puis on entend des coups de feu. Dans le chaos, les images changent alors de plan et ne filment plus l’ancien leader libyen. D’autres coups retentissent alors.

L’ONU exige une enquête

Hier, le Haut commissariat de l’ONU aux droits de l’homme, Amnesty et Safia Kadhafi ont demandé la mise sur pied d’une enquête sur les circonstances entourant la mort de l’ex guide. «A propos de la mort de Kadhafi, les circonstances ne sont toujours pas claires. Nous estimons qu’une enquête est nécessaire», a déclaré le porte-parole du Haut commissariat, Rupert Colville, se référant aux vidéos qui ont été publiées jeudi dernier par les médias.

«Il devrait y avoir une enquête compte tenu de ce que nous avons vu jeudi», a-t-il insisté. Ainsi, il a estimé que les deux vidéos de Kadhafi publiées jeudi, «une de lui vivant, une de lui mort, étaient très inquiétantes», a-t-il déclaré. M. Colville n’a toutefois pas indiqué qui devait se charger de mener l’enquête, rappelant que le Conseil des droits de l’homme de l’ONU avait mandaté cette année une commission d’experts pour faire la lumière sur les violences en Libye.

K. A./agences