La Banque d’Algérie dévalue simultanément le dinar à la fois par rapport au dollar et à l’euro
La valeur du dinar sur le marché parallèle ou celui des cambistes de plus en plus florissant.
Depuis 1995, le dinar continue sa descente aux enfers. Les cotations hebdomadaires officielles des billets de banque et des chèques de voyage, communiquées par la Banque d’Algérie, donnent un aspect de ce dérapage de la monnaie nationale par rapport à l’euro et le billet vert. Un euro qui s’achetait contre 98,18 DA à partir du 20 novembre dernier est monté à 99, 49 dinars à compter du 18 décembre, puis passant au-dessus de la barre des 100 dinars, soit 101,90 DA à partir du 25 décembre. Le billet vert a connu également une tendance haussière. De 72,96 DA l’unité en fin novembre de l’année écoulée, il a progressé jusqu’à 73,71 DA à l’achat à la dernière semaine du mois de décembre. La dépréciation du dinar est d’autant plus ressentie que la facturation de nos importations se fait en euros et les exportations en dollars. La dégringolade est beaucoup plus prononcée dans la sphère informelle qui brasse 40% de masse monétaire en circulation, soit «environ 13 milliards de dollars», selon les chiffres avancés par les experts. Depuis quelques années, l’écart entre l’échange officiel et parallèle, du reste anormal, est très important.
La valeur du dinar sur le marché parallèle ou celui des cambistes de plus en plus florissant à l’ombre d’absence de bureaux de change réglementaires, est encore moins lotie en comparaison avec l’échange officiel. Bon an mal an, un euro s’échangait contre 140 à 150 dinars et entre 95 et 100 DA pour le dollar. Selon les économistes, «la Banque d’Algérie a fait le choix de laisser glisser le taux de change pour freiner le taux d’inflation tiré en haut par les augmentations de salaires et l’accroissement des importations». «Le coûp de revient de nos produits, dont les intrants sont payés en devises fortes, augmente un peu plus à chaque nouvel approvisionnement en matières premières qui suit l’épuisement des stocks. Après cette courte période, qui ne dépasse pas généralement 2 mois, l’augmentation est automatiquement répercutée sur le prix final du produit sur le marché local», a témoigné Slim Othmani en sa qualité d’opérateur économique. Les importations couvrent «70/75% des besoins des ménages et des entreprises dont le taux d’intégration ne dépasse pas 10/15% et 97/98% des exportations sont le résultat des hydrocarbures à l’état brut et semi-brut», selon le Pr Abderrahmane Mebtoul. Pour lui, il existe «une dialectique des liens entre la logique rentière et l’extension de la sphère informelle qui favorise la dépréciation du dinar: l’évasion fiscale. Ce qui constitue inévitablement un véritable frein au véritable développement hors hydrocarbures. Le dinar est une monnaie presque dépendante du dollar, étant donné que les revenus en devises sont issus à 97% des hydrocarbures. Il est à noter par ailleurs que le volume des réserves de change placées aux Etats-Unis est estimé à 173,6 milliards de dollars à la fin juillet. Ceci dit, le moindre dérapage de la valeur du dollar américain impactera sur la facture des exportations et par ricochet sur les recettes financières de l’Algérie.
Par ailleurs, les importations de l’Algérie, principalement payées en euros, ont franchi la barre de 40 milliards de dinars depuis l’année 2010 contre 39,29 milliards de dollars en 2009. La transition vers l’économie de marché concurrentielle est possible, pour peu, disent les experts, que «se réalisent les mutations systémiques nécessitant un profond réaménagement dans les structures du pouvoir qui repose essentiellement sur la rente, la distribution de revenus sans contreparties productives pour une paix sociale fictive et éphémère». Puisque les ventes dhydrocarbures sont reconverties du dollar en dinars, tout dérapage rampant du dinar par rapport au dollar, «gonfle artificiellement le Fonds des recettes et voile l’importance du déficit budgétaire», indique le Pr Mebtoul. Cet artifice d’écritures explique que bien que «la cotation du dollar et de l’euro n’évoluent pas dans le même sens, souvent la Banque d’Algérie dévalue simultanément le dinar à la fois par rapport au dollar et à l’euro, ce dernier renchérissant les importations des produits également écoulés sur le marché national en dinars auquels la valeur finale, sans compter les coûts des circuits de distribution, est amplifiée par les taxes douanières calculées sur la valeur import en dinars», explique-t-il. Par ailleurs, le délégué général de l’Abef, Abderrahman Khalfa, a indiqué que «le marché de change informel viendra à disparaître petit à petit au fur et à mesure que la sphère formelle grignote sur ces parts du marché car il n’est ni structurel ni durable.
Quant aux transactions il faut dit-il, les traiter par des mécanismes juridiques et réglementaires.»