Mokrane Aït Larbi à propos des caricatures de “Charlie Hebdo” “Il faut criminaliser l’atteinte aux religions et aux prophètes”

Mokrane Aït Larbi à propos des caricatures de “Charlie Hebdo”  “Il faut criminaliser l’atteinte aux religions et aux prophètes”

Dans une contribution publiée hier sur sa page facebook, l’avocat plaide pour une action des pays musulmans auprès des instances  internationales, en vue de faire des blasphèmes et des atteintes aux religions des actes criminels.

Les attentats contre le journal français Charlie Hebdo puis la publication des caricatures attentatoires à la personne du Prophète Mohamed (QSSSL) et la vague de colère qu’elles ont provoquée dans la plupart des pays musulmans ont relancé de nouveau le débat sur la liberté d’expression. “La liberté d’expression doit-elle être absolue ou avoir des limites ?” Telle est la question posée par Mokrane Aït Larbi dans un texte publié hier sur sa page facebook. “D’aucuns soutiennent que la liberté d’expression doit être absolue, alors que d’autres estiment qu’il faut lui imposer des limites dans certains cas”, commence par relever l’avocat en écho à ce débat aussi vieux que l’expression elle-même. L’auteur du texte fait, à ce propos, un parallèle entre les pays anglo-saxons et la France en relevant les différences qui les caractérisent. “Aux USA, la liberté d’expression est absolue en vertu du premier amendement de la Constitution américaine. Aucune autorité n’est en droit de poser une limite à cette liberté, aucune législation n’est permise dans ce domaine. En revanche, le journaliste américain professionnel s’impose lui-même des limites et des lignes rouges qu’il ne saurait franchir, convaincu du fait que liberté est aussi responsabilité.” La règle est aussi valable en Angleterre, note l’avocat, qui souligne, a contrario, le cas de la France. “Pour la France, la liberté d’expression doit s’exercer par tous les moyens. Cependant, l’État français lui a posé une ligne rouge à ne pas franchir lorsqu’il s’agit de l’antisémitisme ou du négationnisme, par rapport à la Shoah.”

À l’inverse, note à juste titre Me Aït Larbi, “l’islamophobie et le blasphème des prophètes et des religions sont considérés comme des actes de création découlant de la liberté d’expression”. Ces deux parallèles posés, l’avocat rappelle que “rien ne justifie la mort, rien ne justifie le terrorisme. Chacun doit dénoncer les crimes quelles que soient leurs causes, chacun doit dénoncer le terrorisme quelles qu’en soient les victimes”. Me Aït Larbi revient ensuite au factuel pour s’arrêter sur les marches pacifiques de protestation organisées dans la plupart des pays musulmans en réaction à la publication de la caricature du Prophète Mohamed.

Des marches émaillées d’actes de violence, dont des incendies d’églises, en réponse aux attaques contre les lieux de culte musulman en France. “Si en tant que musulmans nous refusons l’amalgame entre l’islam et le terrorisme et si on ne cesse de répéter que l’islam n’a rien à voir avec les actes perpétrés en France et dans d’autres pays, nous devons dire aussi qu’il n’existe pas de relations entre le christianisme et les caricatures publiées par Charlie Hebdo, ni les crimes commis par l’État israélien en Palestine”, écrit encore Aït Larbi, soulignant la position du pape qui a dénoncé les insultes contre les religions et aussi ces citoyens juifs qui n’ont de cesse de condamner les crimes israéliens à Gaza. L’auteur du texte estime, par ailleurs, que “tout acte terroriste dans les pays occidentaux est de nature à entraîner des préjudices contre les communautés musulmanes dans ces pays, et ce, à travers la mise en place de législations plus contraignantes qui entraveront la liberté de ses membres”.

À ce propos, il rappelle les législations d’exception instaurées aux USA après les événements du 11 septembre, notamment les prisons de Guantanamo et Abou Ghraïb et d’autres lieux d’incarcération des pays arabes et musulmans, où la torture est systématisée. Cela au nom du Patriot Act institué par le président G. W. Bush. Et Me Aït Larbi de faire d’abord une recommandation : “Si nous voulons défendre nos intérêts, notre dignité, notre sécurité, nous devons impérativement nous servir de notre intelligence et du droit international.”

En l’occurrence l’article 19 du pacte international des droits civiques et politiques qui stipule que “tout individu a droit à la liberté d’opinion et d’expression, ce qui implique le droit de ne pas être inquiété pour ses opinions et celui de chercher, de recevoir et de répandre, sans considérations de frontières, les informations et les idées par quelque moyen d’expression que ce soit”.

Mokrane Aït Larbi estime que le blasphème pourrait constituer une menace à l’ordre public, répandre la haine entre les peuples et conduire, in fine, à des guerres. D’où sa proposition, à savoir une initiative des pays musulmans au niveau des Nations unies et de l’UE en vue de parvenir à la criminalisation des blasphèmes et des atteintes aux religions, au nom de la liberté d’expression. Car en définitive, il s’agit, pour l’avocat, de “préserver l’ordre public, empêcher la haine et privilégier le dialogue entre les religions et les civilisations, car toute haine enfante la guerre et toute guerre menace la paix dans le monde”.

O. O.