Feu Mohamed Khemisti conserva alors qu’il fut l’initiateur du Mouvement estudiantin durant la guerre de libération nationale son poste au ministère des affaires étrangères environ six(06) mois où il fut désigné dans le gouvernement du 26 Septembre 1962 suite auquel il fut ciblé par une tentative d’assassinat où il laissa la vie le 11 Avril 1963 et jusqu’à l’heure actuelle le dossier de cet horrible crime reste inexpliqué et demeure parmi les énigmes de l’Algérie indépendante
Certes, on appréhenda le criminel présumé qui fut présenté devant la justice avant qu’il ne soit examiné par M. Belmiloud, docteur psychologue qui finit par conclure que le dénommé ZENATI est une personne maniaque pour son penchant sur l’assassinat des émirs et le 11 Avril 1963, ce dernier cherchait à apaiser sa rancœur et le destin a voulu que Mohamed Khemisti soit sur son chemin ,et ce qui devait arriver, arriva. Sauf que l’important, c’est la position dans laquelle se trouvait le ministre défunt et son rôle à travers l’étape principale des étapes de son activité en faveur du président de la République, mis à part ses diverses relations qui étaient très bonnes avec l’élite universitaire.
Mohamed Khemisti est né à Maghnia (Tlemcen) le 11 Aout 1930. Il est issu d’une famille de classe moyenne assoiffée de liberté et d’une vie digne et paisible. Sous l’égide du régime colonial français et sachant que l’ainé de ses frères en l’occurrence Mekki s’est engagé dans la police de sa ville natale et ne pouvant supporter cela, termina sa scolarité du cycle primaire à Maghnia (Tlemcen) pour aller continuer son cursus scolaire dans la ville de Tlemcen. Il adhéra avec les jeunes au mouvement national révolutionnaire avec son ami Ahmed Medeghri qui choisit un autre chemin contrairement à celui que choisit son père combattant qui activait au sein du Parti du manifeste (Ferhat Abbas) à Saida. Après sa réussite à l’examen du Baccalauréat, il choisit la Faculté de Médecine de Montpellier (France) durant la période universitaire entre 1952 et 1953. A travers le témoignage du Docteur M. Messaoud Djennas qui l’avait précédé à la même faculté que le nouvel étudiant était prédisposé aux études universitaires ainsi qu’au militantisme national en même temps. Par ailleurs, il l’a connu par l’intermédiaire de son ami Mohamed FERRADI (originaire de Mascara) qui l’informa du ralliement d’un nouveau étudiant très engagé selon ses dires. Juste après le premier contact, et qu’il était devant un jeune qui regorgeait d’ambitions très fortes dans le devoir du militantisme engagé.
Le Leadership …. Mouvement estudiantin :
Cette prédisposition militante fut exprimée par lui dès le déclenchement de la Révolution et c’était le précurseur dans les contacts avec les représentants du Front de Libération Nationale et l’initiateur dans la coordination avec eux dans la mise en place des premières cellules estudiantines dans la région. C’est aux environs du printemps 1955 probablement que la Fédération du FLN en France commença à structurer ses bases en France en même temps que le déclenchement de l’opération d’organisation du mouvement estudiantin dans le cadre de l’Union Générale des Etudiants Musulmans Algériens (U.G.E.M.A). Par ailleurs, l’association des Etudiants Musulmans Maghrébins lança à partir de l’Algérie et plus précisément le 27 Février de la même année un appel dans le même sens qui reçu un grand écho au sein des étudiants algériens en France qui organisèrent une conférence préparatoire à Paris le 04 du mois d’Avril prochain . Feu Mohamed Khemisti contribua avec ses compagnons à l’Université de Montpellier d’une façon effective à la préparation de cette conférence et il était le plus engagé dans le secret qu’il se l’imposa avec la collaboration de la plupart des étudiants algériens du fait d’être musulman. C’est ce qui caractérisait l’Algérien à l’époque après que le colonisateur l’empêcha du droit de s’identifier à son pays l’Algérie. Après avoir mis en place la Fédération en Juillet 1955, Mohamed Khemisti et ses compagnons s’empressèrent de créer une section au sein de leur université dont il devint le leader et le président de cette section après avoir eu la chance d’être le seul candidat. Immédiatement, il convoqua le Front de Libération Nationale précisément au sein de la gauche française pour une solution à l’amiable sur le conflit qui existait depuis le 1er Novembre 1954 par une négociation. Après quoi, la section participa aux grèves du 20 Janvier 1956 contre les cours et de la faim en protestation aux campagnes d’oppression du colonialisme en organisant une conférence suivie de débats ouverts sur la cause algérienne dans la bourse du travail à Montpellier. Quant aux étudiants extrémistes issus de la droite française, menés par Jean Marc Mousseron président d’honneur de l’union nationale des étudiants français ont manifesté pour empêcher cette conférence de se tenir.
La section algérienne répliqua énergiquement aux provocations en s’alliant à tous les étudiants du Maghreb arabe ainsi que ceux des autres colonies françaises en général. Khemisti eut l’honneur de présider le deuxième congrès de l’union générale qui s’est tenue entre le 24 et le 30 Mars de la même année où il fut élu comme secrétaire général à côté du nouveau président en l’occurrence M. Mouloud Belahouane qui remplaça Ahmed Taleb El Ibrahimi. Le congrès fut un tournant décisif sur le devenir du mouvement estudiantin après avoir déclaré dans son communiqué sur son attachement à l’indépendance de l’Algérie et son appel vers la libération de tous les prisonniers nationaux et de négocier avec le FLN seul représentant légal et unique du peuple algérien. En conclusion, le président du congrès affirma que la priorité revenait à la question politique en déclarant : Comment peut –on étudier, si on traine derrière nous les chaines de l’esclavage du colonialisme ? en ajoutant : « Les étudiants musulmans algériens déracinés de leur souche après avoir été atteint dans leur personnalité ainsi qu’ exclus de leur langue et de leur passé demandent en premier lieu le droit à leur identité, d’avoir droit à l’enseignement de leur langue et le retour à leurs origines culturelles en concluant : « Notre cause avant tout est une affaire de liberté et de souveraineté qui prime sur tout ». Ce discours sert de plate forme claire à la grève du 19 Mai prochain où Khemisti joua un grand rôle de par sa position de secrétaire général de la Fédération ainsi que dans la section de Montpellier le rôle du commandant. Le docteur Messaoud Djennas dira dans ce contexte, que Khemisti se dirigea après que la section d’Alger se déplaça vers Paris où il a assisté à une réunion de la commission de la Direction qui décida à la majorité absolue de généraliser les partis à travers toutes les universités françaises et au-delà et retourna avec une position ferme. On ne se rétractera pas sur la décision d’une grève illimitée et il ne nous reste plus devant nous qu’à convaincre ce qui reste de nos compagnons de cela. A cet effet, une assemblée générale de la section s’est tenue et ne trouva personne pour approuver les décisions des dirigeants de la Fédération qui se fit en coordination avec les dirigeants du FLN.
Selon des sources françaises qui déclarent que la section de Montpellier a réalisé un taux record des adhérents qui se sont ralliés au Parti du Front de Libération Nationale de Montpellier. Ces fervents adhérents qui ont gravé leurs noms en or dans presque toutes les différentes régions : Atamna en première position, puis Toumi fut la deuxième, Lalyame la troisième , Aroua la quatrième et Lazreg fut la cinquième. Mohamed Khemisti continua après la grève sa mission combattante à partir du secrétariat général de la Fédération qui était en contact permanent avec la Fédération de France sachant que le docteur Ahmed Taleb (premier président de la Fédération) a rejoint la direction de cette dernière sauf que l’activité militante incessante s’est arrêtée subitement le 11 novembre 1957 juste après l’incarcération du secrétaire général de la Fédération durant un mois environ avant la tenue du troisième congrès vers la fin du mois de décembre prochain . Khemisti fut emprisonné en premier à la prison de la Santé à Paris puis on le transféra vers l’Algérie où il fut maintenu à la prison d’El Harrach où l’étudiant ne trouva aucune difficulté pour s’acclimater avec le nouveau milieu où il trouva des responsables qui ont pu organiser la vie et les affaires des prisonniers à l’intérieur même de la prison et à la tête de ces derniers le premier responsable de la wilaya 4 en l’occurrence M.Rabah Bitat qui englobait la capitale du pays et lorsque ce dernier fut transféré en France en 1958, c’est Mohamed Khemisti qui le remplaça vu sa compétence et qu’il était l’homme de la situation et cela malgré la réserve du groupe de Yacef Saadi selon certains témoignages . Ceci poussa les autorités françaises à transférer une deuxième fois l’étudiant responsable vers la prison de Marseille pour bénéficier juste après de la liberté provisoire. Après quoi, il put en fin de compte quitter la France et rejoindre la Lausanne où il passa un séjour pour se traiter et par là même poursuivre ses études et choisir l’économie politique afin de se préparer à servir et construire le pays car on était aux portes de l’indépendance de l’Algérie. Après le cessez le feu et la fin des combats, Mohamed Khemisti entra dans le monde politique en intégrant le comité exécutif provisoire qui était plus connu sous le nom de gouvernement de Boumerdes . Tout d’abord il s’intégra dans le groupe de Belaid Abdeslam à l’époque responsable des affaires économiques, puis en tant que directeur de cabinet du président politique du gouvernement provisoire en l’occurrence M. Abderrahmane Fares. A partir de là, une nouvelle étape se dessine à savoir qu’il est plus que nécessaire d’appuyer Ahmed BENBELLA et essayer d’avoir le plus de partisans et surtout que les vents lui étaient favorables du fait que feu Houari boumediène alors chef des forces armées de l’armée de libération nationale son fidèle allié.
Le bras droit de Benbella :
Abderrahmane Fares a sollicité lui-même les bons offices de feu Mohamed Khemisti pour lui organiser une rencontre avec le président Ahmed Benbella à Tlemcen. Ce qui fut fait, car il fut reçu avec tous les honneurs et avec enthousiasme à l’aéroport de la ville où il constata le président Ahmed Benbella en personne en train de l’attendre entouré de Khider et du wali Ahmed Medeghri. Toujours dans le cadre de la rencontre avec Ahmed Benbella, Mohamed Khemisti prit contact avec certains de ses amis et connaissances pour leur proposer des postes. C’est ce qu’il fit avec le docteur Djennas et mohamed Mechati à qui il a demandé leur participation pour la constitution de l’Amicale des algériens en France et quand l’ordre fut bien établi pour Benbella et ses compagnons qui ont pu marginaliser le gouvernement provisoire et se sont alliés à Krim Belkacem et Mohamed Boudiaf pour élire Mohamed Khemisti sur la liste de l’Assemblée Nationale Constituante et il fut élu député représentant la ville de Tlemcen et juste quelques jours après il fut désigné en qualité de ministre des affaires étrangères dans le premier gouvernement du président Ahmed BENBELLA qui fut proclamé le 26 Septembre 1962. De par sa nouvelle fonction, Mohamed Khemisti accompagna le président Ahmed BENBELLA lors de sa visite à New York au mois d’octobre de la même année afin de présenter la candidature de l’Algérie indépendante pour devenir membre des Nations- Unis. Par ailleurs, il dirigea après son retour des premières visites officielles des négociations avec les autorités françaises concernant la situation sur les accords d’Evian objet d’exécution. A partir de cet instant, l’Algérie commença à négocier et cela continua à Paris et le 11 Mars 1963, Mohamed Khemisti a tenu une première conférence de presse pour donner un petit aperçu et la vision de son ministère sur la politique étrangère de l’Algérie avec de plus amples explications sur certains concepts à titre d’exemple, la notion de l’unité arabe ou celle des non alignés . A la fin de ce même mois, il accompagna Boumediène qui était à l’époque vice premier ministre et ministre de la Défense Nationale dans une tournée en Egypte et dans certains pays arabes du golfe. En son absence, le budget de son ministère fut discuté par la commission financière de l’Assemblée Nationale constituante où Abderrahmane Fares membre de la commission à l’occasion constata que Ahmed KAID alors président de la commission des affaires étrangères s’attaqua à Mohamed Khemisti à plusieurs reprises sans preuves tangibles. A son retour, Khemisti fut informé de la situation et mis en garde en même temps, mais le jeune ministre le rassura en disant : Ne t’inquiète pas, je saurai l’affronter si nécessité oblige. En date du 11 Avril 1963 selon M. Abderrahmane Fares, Mohamed Khemisti revenant exténué d’une visite effectuée au Moyen Orient projetait de sortir en congé vers la fin de la semaine pour se reposer en compagnie de sa famille à El Koléa mais le destin avait décidé autrement pour le forcer à un repos éternel. Alors que Mohamed Khemisti s’apprêtait à monter en voiture en compagnie de son épouse députée, quand soudain un inconnu fit son apparition et lui tira dessus devant l’assemblée pour l’atteindre grièvement par des balles meurtrières auxquelles il succomba deux semaines après qui coïncida avec la visite du président égyptien Djamel Abdelnaceur en Algérie pour la première fois. Son épouse qui n’est autre que la veuve du chahid colonel Lotfi a préféré que son défunt mari soit inhumé dans sa ville natale Maghnia ( Tlemcen). Son compagnon Abderrahmane Fares qui assista aux funérailles de Mohamed Khemisti en le conduisant à sa dernière demeure dira en substance : « C’est un jeune qui n’a fait de mal à personne, il était très brillant et avait un bel avenir devant lui » en ajoutant « Certes, un inconnu a été appréhendé dénommé « Zenati » qui fut jugé et emprisonné , puis relâché. Qui est le vrai criminel ? Quand saurons-nous la vraie histoire de Mohamed Khemisti qui reste toujours une énigme dans les annales de l’histoire algérienne, l’avenir, un jour nous le dira !?.
Benyahia El Houcine