MOHAMED GHARBI : La noire solitude d’un Patriote

MOHAMED GHARBI : La noire solitude d’un Patriote

Dans les geôles où il est jeté et enfermé depuis février 2001, pour avoir abattu Ali Merad, un terroriste de l’AIS amnistié qui le menaçait, Mohamed Gharbi, ce vieillard qui a le patriotisme à fleur de peau, doit assurément méditer cette érosion qui a rouillé les ressorts de la résistance citoyenne. Les élans de soutien et de solidarité dont il avait bénéficié les premiers temps sont devenus désormais ténus, presque inexistants.

Sa condamnation à mort confirmée définitive par un arrêt de la Cour suprême rendu en date du 22 juillet 2010, Mohamed Gharbi sait qu’il ne devra plus rien attendre du côté de la justice. La procédure est bouclée, sans qu’il lui soit concédé un pouce d’indulgence. Condamné en première instance à 2 ans de prison ferme, Mohamed Gharbi a vu sa peine s’alourdir au fil des procès en cassation, passant de 2 ans à 20 ans de prison, puis à la prison à perpétuité et enfin à la peine capitale.

Cet homme, ancien moudjahid et officier de l’ANP à la retraite qui, au début des années 1990, guidé par sa fibre patriotique, a repris les armes pour la sauvegarde de la république menacée par l’hydre terroriste, aura raison de se sentir seul. La solidarité qui a essaimé les premières semaines, voire les premiers mois qui ont suivi son arrestation s’est estompée au fil des ans. La mobilisation n’a pas été au rendez-vous lors des longues années de procédures judiciaires et de procès. Ni dans Souk Ahras sa ville natale, ni ailleurs. C’est à conclure que les segments de la société qui furent à l’avant-garde du combat républicain durant les tristes années du terrorisme ont subi le formatage d’adaptation au mode de la réconciliation nationale et de l’amnistie générale au profit des terroristes.

On a rarement entendu les associations des victimes et des familles des victimes de terrorisme prendre cause pour Mohamed Gharbi, se mobiliser contre sa condamnation aggravée à chaque procès. Hormis quelques journaux qui ont maintenu d’alerter l’opinion sur le calvaire  d’un homme, un Patriote qui, ne pouvant endurer sans réagir le harcèlement d’un ancien terroriste, voisin de cité, s’est fait justice lui-même, non sans avoir au préalable sollicité en vain la protection des autorités contre les provocations répétées de sa victime. Mohamed Gharbi aura été totalement seul si, par ailleurs, des pétitions pour sa libération ne circulaient sur le Net. A l’instar de celle toute récente, lancée après l’arrêt de la Cour suprême et qui réclame sa libération. Mais il faudra assurément davantage de mobilisation pour espérer faire retrouver à Mohamed Gharbi la lumière du jour.

Une victime de la réconciliation nationale

Le combat de Mohamed Gharbi ne saurait être un combat solitaire. Il est une victime de la réconciliation nationale qui a blanchi le crime terroriste à travers la grâce amnistiante qui l’a extrapolée. Une grâce amnistiante qui, avec d’autres mesures adjacentes, a aménagé des places de choix dans la société pour les terroristes et a en même temps poussé les Patriotes, les membres des groupes de légitime défense notamment (GLD) à se résigner à un profil bas. Réhabilités, beaucoup de terroristes se sont sentis au-dessus de la loi, agissant comme des intouchables.

Une attitude qu’illustre parfaitement le comportement de Ali Merad qui, réinséré dans la société, blanchi de ses crimes terroristes, s’est acharné à harceler Mohamed Gharbi. Les provocations, petit à petit, se sont mues en claires menaces. Comme celles proférées en cet hiver 2001, lorsque, revenant d’une veillée funèbre, Mohamed Gharbi a été suivi par une voiture à bord de laquelle se trouvaient Ali Merad et un acolyte. Ce jour-là, Ali Merad s’est fait on ne peut plus menaçant : «Ton jour viendra», aurait-il lancé à Mohamed Gharbi.

Ce dernier, prenant la menace très au sérieux, est allé se plaindre auprès des autorités. En vain. Personne n’a voulu bouger le petit doigt. Il a décidé alors de faire justice lui-même. Et le 11 février 2001, armé de sa kalachnikov, il abat Ali Merad d’une rafale. Son crime est qualifié de «crime crapuleux». La justice ne lui a reconnu aucune circonstance atténuante. La clémence, depuis la réconciliation nationale, va aux terroristes repentis.

Par S. A. I.