L’opposition politique reste grandement sceptique quant à la volonté du pouvoir de légiférer, s’agissant de la mise en conformité des lois avec la nouvelle Constitution, dans le sens du renforcement de la démocratie et des libertés publiques.
Le ministre de l’Intérieur, Noureddine Bedoui, a annoncé, avant-hier, la révision prochainement de l’ensemble des lois organiques régissant la vie politique du pays, telles que les lois sur les partis, les associations, les codes communal et de wilaya, ou encore le code électoral. Une perspective qui enchaînera avec la révision de la Constitution, dont le projet n’attend plus que le quitus du Conseil constitutionnel avant que n’intervienne, ensuite, son adoption par le Parlement.
Si la majorité des partis politique, ceux de l’opposition notamment, ne s’oppose pas au principe d’adaptation de l’ensemble des lois organiques à la nouvelle Constitution, elle appréhende, cependant, de voir les futures lois contenir autant de “contradictions” que celles déjà relevées dans différentes dispositions du projet de révision de la Constitution. “Lorsqu’on voit les contradictions déjà contenues dans bien des articles du projet de la révision de la Constitution que le pouvoir compte bientôt faire adoptée par le Parlement sans prendre en considération les critiques et les observations formulées à la fois par la classe politique, les experts et la société civile, il faut s’attendre à des lois organiques aussi contradictoires”, a averti Djelloul Djoudi, membre de la direction du Parti des travailleurs (PT), qui relève, à titre indicatif, la contradiction contenue dans l’article 100 ter relatif au “nomadisme”, sinon à la “transhumance” politique, pour reprendre son propos.
Abondant dans le même sens, Athmane Mazouz, secrétaire national chargé de communication au RCD, juge, lui, que l’annonce faite par le ministre de l’Intérieur n’est que de la “poudre aux yeux” et que “les nouvelles lois dont ils parlent ne feront que verrouiller davantage le libre exercice politique des partis et les activités des associations”. Le responsable au RCD en veut pour preuve le sort qui a été réservé par la direction de l’Onci, à la demande d’autorisation d’un meeting du RCD à la salle Atlas. Il regrette aussi que le projet de la révision de la Constitution soit déjà “un verrou supplémentaire pour la liberté et la démocratie”, puisque, explique-t-il, “il véhicule la négation même du respect du choix populaire et la fermeture des espaces d’expression”, le représentant du RCD juge que le ministre de l’Intérieur confirme, à travers son annonce, que “désormais, en plus de tout ce que contient la nouvelle Constitution comme verrouillage et contradictions, il faudra s’attendre à d’autres excès contre les libertés démocratiques”.
À son tour, Soufiane Djilali, président de Jil Jadid, s’étonne de “l’accélération” du processus des réformes exclusivement conçu par le pouvoir en cette période marquée par la grogne sociale, conséquence de la loi de finances 2016. M. Djilali y décèle une volonté du pouvoir de préparer sa succession dans la “confusion”. De son côté, Lakhdar Benkhellaf, député du Front pour la justice et le développement (FJD), juge que la révision des lois organiques “ne vont rien apporter de nouveau”, estimant que la nouvelle Constitution est déjà “verrouillée”. Amara Benyounès, secrétaire général du Mouvement populaire algérien (MPA), lui, revendique, notamment en prévision de la révision de la loi sur les partis politiques, l’instauration du système déclaratif pour la création d’un parti. “Toutes les démocraties du monde ont adopté ce système dans la création de partis politiques”, a-t-il dit, ajoutant que cela n’empêchera pas, au préalable, le respect de certaines lois et certains articles de la Constitution. Cela, tout comme il réclame “un financement public des formations politiques”, et ce, à même, dit-il, d’éviter dorénavant “l’intrusion de l’argent sale dans la sphère politique”.
Enfin, Nabil Yahiaoui, chargé de communication de Tajamou Amel El-Djazaïr (Taj), se contente, quant à lui, de relever que la sortie du ministre de l’Intérieur est “cohérente”, car répondant “aux directives du président Bouteflika dont l’objectif est l’adaptation des lois à la nouvelle Constitution”.