Le secrétaire général de la Commission nationale consultative de promotion et de protection des droits de l’Homme (CNCPPDH), Abdelwahab Merdjana, a indiqué jeudi dernier, lors de la tenue d’un atelier sur la protection des mineurs et des catégories vulnérables à Oran, que le flux continu de migrants vers l’Algérie et leur fixation dans plusieurs de ses régions depuis plusieurs années déjà démontre que «notre pays n’est plus une zone de transit».
«L’amélioration de plusieurs facteurs socio-économiques, ajouté à la paix et à la stabilité politique (dont jouit le pays) attire de nombreux migrants vers l’Algérie eu égard aux crises et aux conflits que vivent le continent africain et le monde arabe», a-t-il argumenté. Pour M. Merdjana cette question (flux de migrants) «mérite une étude rationnelle et claire qui prenne en considération la protection de la dignité humaine des migrants avec, en prime, l’humanisation des relations avec cette catégorie, afin de lui garantir la protection et l’aide humanitaire nécessaire». De son côté, la présidente de la sous-commission de la CNCPPDH, Mme Yasmina Taba, a invité les participants à mieux diagnostiquer les flux migratoires vers l’Algérie, mettant en exergue l’expérience algérienne en matière de protection des migrants, de prise en charge des groupes mobiles et les réfugiés et de maturité de sa politique, comme c’est le cas, a-t-elle soutenu, dans les camps des réfugiés sahraouis à Tindouf. Pour sa part, le directeur du Conseil italien pour les réfugiés (CIR), Christopher Hein, a mis l’accent sur la nécessité de ren-dre «cohérentes les législations des pays concernés par ce phénomène, dont ceux de l’Afrique du Nord et du Sahel avec les conventions et les recommandations internationales», soulignant que le flux de migrants vers l’Algérie «exige un traitement rationnel et une coopération régionale». La représentante de l’Union des juristes italiens pour la défense des droits de l’Homme (UFTDU), Mme Alice Sironi, a abordé la question sensible de la prise en charge des réfugiés mineurs sur les plans social et psychologique. Elle a indiqué dans sa communication intitulée «Mineurs, victimes de violence et du trafic et autres catégories vulnérables dans le droit international» que l’augmentation du nombre de migrants mineurs «est due aux crimes de trafic humain qui nécessitent le renforcement des institutions afin d’éradiquer ce phénomène». De leurs côtés, Reda Sbahiya et Mme Amel Mir Ali, représentants du Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (UNHCR), ont évoqué la situation des réfugiés mineurs en Algérie, la qualité de leur prise en charge et les efforts consentis pour leur intégration, notamment en matière d’enseignement et de santé.
Appel à la création d’une instance de défense des mineurs migrants
En outre, les participants à l’atelier sur «La protection des mineurs et des catégories vulnérables des migrants» ont recommandé, à l’issue de leurs travaux jeudi à Oran, la création d’une instance en Algérie spécialisée dans la défense des droits des mineurs et des enfants migrants.
Les intervenants ont indiqué, lors de cette rencontre qui a vu la participation d’experts nationaux et étrangers, que les enfants et les mineurs ont besoin d’une instance qui les défende. Ils ont insisté sur la nécessaire prise en charge convenable des mineurs en leur ouvrant droits aux soins, à l’enseignement, à la formation et à un poste d’emploi après avoir atteint l’âge de travailler et en leur offrant l’aide psychologique et sociale et divers autres droits dont jouissent les enfants dans leurs pays. Les participants ont également recommandé de mettre les mineurs réfugiés et sans parents «dans des centres sécurisés adaptés à cette frange et de ne pas les reconduire à leurs pays d’origine sauf après avoir confirmé l’existence d’un tuteur légal», et ce, en collaboration avec les services consulaires de leurs pays.
Les flux de migrants vers l’Algérie nécessitent un double traitement
Par ailleurs, le conseiller à la présidence de la République, Kamel Rezzag Bara, a appelé, jeudi à Oran, à adopter une double approche humanitaire et sécuritaire en matière de traitement du phénomène des flux de migrants vers l’Algérie. «Il est nécessaire d’adopter une double approche qui repose sur la vigilance sécuritaire, d’une part, et la prise en charge humanitaire, d’autre part, dans le traitement des conséquences des flux de migrants fuyant les conflits et les crises dans leurs pays respectifs», a indiqué M. Rezzag Bara à l’APS, en marge des travaux de l’atelier sur «La protection des mineurs et des catégories vulnérables des migrants». L’aide humanitaire et la prise en charge efficace de ces flux de migrants, à l’instar de ceux affluant des pays du Sahel, «nécessite la contribution au retour de la stabilité et de la quiétude dans leurs pays, afin de les aider à y retourner volontairement», a-t-il ajouté.
Les «flux de migrants à l’intérieur de notre région impose une meilleure étude»
Le conseiller à la présidence de la République a souligné que ces «flux de migrants à l’intérieur de notre région impose une meilleure étude pour connaître davantage la nature de cette migration, sa diversification et ses mutations, surtout que l’Algérie s’est transformée de pays de transit en celui de stabilisation des migrants». Un diagnostic approfondi de ce phénomène «est indispensable même si l’Algérie est consciente de son ampleur», a-t-il encore affirmé, ajoutant qu’il est impératif d’élaborer une stratégie complémentaire encourageant le retour des migrants à leur pays d’origine en respectant les principes de la préservation de la dignité humaine. M. Rezzag Bara a souligné, à ce sujet, que «l’Algérie refuse l’adoption de modèles prêts en matière de traitement du phénomène», déclarant : «Nous soutenons le partenariat et la coopération internationale dans ce domaine, mais nous veillons, d’un point de vue pratique, à prendre en considération nos composantes et spécificités nationales éducatives et sociales». Il a par ailleurs mis en exergue certains dangers pouvant résulter de ce phénomène comme le trafic des humains, des armes, de drogue et les crimes et tout ce qui nourrit le terrorisme, appelant à l’élargissement des initiatives régionales à tous les pays concernés afin de renforcer la coordination des opérations et des renseignements régionaux. Cette rencontre technique, organisée à l’initiative de la Commission nationale consultative de promotion et de protection des Droits de l’Homme (CNCPPDH) et le Conseil italien pour les réfugiés (CIR), s’inscrit dans le cadre du Programme thématique de coopération avec les pays tiers dans le domaine des migrations et de l’asile soutenu par l’Union européenne, notamment le projet «Algérie : renforcer la protection des migrants et les capacités de gestion des flux migratoires» réalisé dans le cadre de la coopération entre la CNCPPDH, partie algérienne, et le Conseil italien pour les réfugiés (CIR) et l’Union des juristes italiens pour les Droits de l’Homme (UFTDU). Cet atelier auquel a assisté le conseiller auprès de la présidence de la République, Kamel Rezzag Bara, le secrétaire général de la CNCPPDH, Abdelwahab Merdjana, le directeur du CIR, Christopher Hein, les représentants du bureau des Nations unies pour les réfugiés et des experts, vise à renforcer la compréhension et les capacités de gestion de la protection des mineurs et groupes vulnérables conformément aux standards internationaux. Cette rencontre d’une journée, abritée par le siège de l’APC d’Oran, qui a vu la participation d’experts dans ce domaine, aborde des thèmes liés notamment aux axes : «Mineurs victimes de violence et du trafic et autres catégories vulnérables dans le droit international» et «Protection des réfugiés mineurs dans le code pénal Algérien». Elle traite également des procédures d’accueil des réfugiés en matière de protection sociale ainsi que la promotion et la protection des mineurs réfugiés en milieu urbain.
Plusieurs communications ont été présentées lors de cet atelier, dont notamment «Les mineurs victimes de la violence et le commerce des humains» et «Les lois internationales gérant les droits des mineurs réfugiés».
Cet atelier a regroupé des experts de plusieurs instances nationales et internationales à l’instar des représentants de la présidence de la République, de la Sûreté nationale, du ministère de la Solidarité nationale et de la Famille en plus de représentants de l’Union des juristes italiens pour la défense des droits de l’Homme et le Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés.
Par Rabia H.