Né en Algérie, le journaliste de Canal+ prend les rênes d’une émission-phare de la chaîne cryptée. Portrait d’un passionné de football.
C’est la rentrée à Canal+. Et tandis que ses collègues reprennent tout juste le chemin des plateaux, devant et derrière les caméras, Messaoud Benterki est déjà au travail depuis deux semaines, reprise de la saison de football oblige. Fraîchement nommé à la tête de L’Équipe du dimanche, émission mythique consacrée au football européen, l’homme ne se départit pas de son air bonhomme. Tranquille, la mine détendue et l’oeil curieux, il nous accueille dans les couloirs en pleine effervescence de la chaîne cryptée.
Mais, pudeur oblige, pour parler, se raconter, Benterki préfère nous inviter à boire un café dans un endroit tranquille. La discussion commence alors. Tout y passe : ce football qui le passionne tant, le regard tendre qu’il porte sur l’Algérie de son enfance, mais surtout son nouvel horizon professionnel. Ses nouvelles attributions, Messaoud Benterki les accueille de son propre aveu assez tranquillement, presque comme un vieux routard du petit écran. Il faut dire que faire de la télévision ne constituait pas, pour ce grand gaillard qui choisit soigneusement ses mots, la première des options.
« Ce n’était pas forcément un objectif de faire de la télé. J’étais à l’école au Celsa. Il fallait faire un stage à l’issue de la deuxième année et comme j’aimais bien le foot, j’ai cherché à intégrer une rédaction portée sur le sport. Je me suis ainsi retrouvé en stage à But !, un bihebdomadaire consacré au football. À l’issue du stage, on m’a proposé de rester, j’ai accepté, j’avais 20 ans », dit-il avant d’ajouter : « Avec le recul, je me demande comment j’ai pu faire ce pari plus que risqué : je ne suis plus retourné à l’école. But ! constituait une aventure formidable. Je me suis retrouvé rédacteur en chef à un mois du début de la Coupe du monde en France, par un concours de circonstances. » Et le journaliste de poursuivre, dans le même élan : « La presse écrite vous suit à jamais. C’est une super école. Exigeante, rigoureuse, où, contrairement à la télé, on ne peut pas se cacher derrière des images. »

De la presse écrite à la télé, de la L1 à la Premier League
La télévision justement, Benterki ne tardera pas à y débarquer. D’abord à InfoSport, puis à Canal+. Sans tarder, son style retient l’attention des téléspectateurs. Durant quatre ans, le journaliste présentera Jour de foot, vaste tour des stades les soirs de matches, consacré au Championnat de France de football. De week-end en week-end, la touche Benterki se pose et en impose. En 2013, l’envie de changer d’air et d’aller voir du côté du football anglais est forte. L’odeur du fish and chips, le cortège de tacles appuyés, de gardiens maladroits, et de frappes lourdes décochées de l’extérieur de la surface séduisent Messaoud Benterki qui change alors d’horizon. Le journaliste passe des pelouses françaises au gazon anglais avec Match of ze day, large couverture de la Premier League servie par Canal+ Sport. Les affiches sont alors premiums et Benterki, en maître de cérémonie, offre une ribambelle de buts et de rebondissement aux abonnés, jusqu’à devenir un des nouveaux piliers de la chaîne à péage. Inspirée, la direction de Canal+ ne va pas tarder à surfer sur cette cote d’amour grandissante. À l’occasion de cette nouvelle saison de football qui commence, Messaoud Benterki change une nouvelle fois de maillot. Cette fois, il succède à l’homme-orchestre Thomas Thouroude à la présentation de L’Équipe du dimanche. Football anglais, allemand, espagnol, italien : tout y passe, le dimanche soir de 23 h 15 à minuit.
Son Algérie natale, terre des premiers émois autour du football
Mais voilà, derrière la façade médiatique, il y a une histoire méconnue. Elle se passe en terre kabyle. Des souvenirs que le journaliste se remémore avec malice. « La passion pour le foot naît vraiment en 1982. Avec la Coupe du monde. J’étais dans mon petit village de Mansourah à regarder le fameux match RFA-Algérie de 82. C’est de là que tout est parti. » « J’avais 7 ans, poursuit-il, et j’étais un dingue de football jusqu’à m’en faire peur aujourd’hui avec le recul ! (rires) » « Je ne voulais rater aucun match, rien. Alors, quand une partie n’était pas diffusée, on se retrouvait avec des amis autour d’un transistor pour essayer de choper les résultats des championnats qui n’étaient pas couverts à la télévision », ajoute-t-il. Quiconque connaît le football africain sait à quel point les Algériens sont des passionnés par le jeu. Une passion à laquelle il est « dur d’échapper », de l’aveu même du journaliste qui se souvient des écoles qui fermaient parfois en plein après-midi, lorsque des matches étaient retransmis à la télévision.
Les minutes passent. Au fil de la discussion, Benterki évoque naturellement la force des racines et du souvenir. « L’endroit d’où on vient crée des attaches qui marquent. Cela peut être la Kabylie, la Corse, la Normandie, peu importe. Il faut être fier de l’endroit où on est né, de ses origines ! Les souvenirs que j’ai de mes jeunes années en Algérie sont extraordinaires », évoquant des grands-parents qui lui ont inculqué « beaucoup de valeurs », « des gens simples, honnêtes, bienveillants », poursuit-il. De quoi faire revivre dans son coeur et son esprit la maison familiale à Mansourah… « Cela me manque terriblement. Les parties de foot derrière la maison, pieds nus, avec des ballons qu’on fabriquait comme on pouvait, des souvenirs fabuleux ! » dit-il. Aujourd’hui encore, le nouveau présentateur de L’Équipe du dimanche suit les performances de la sélection nationale algérienne. Des Fennecs sur lesquels il pose un regard positif : « La sélection avait jadis un fonctionnement très cyclique, avec quelques belles performances puis de longues traversées du désert… C’en est aujourd’hui terminé grâce au gros travail de la fédération. L’organisation s’est professionnalisée, rationalisée. Les moyens consentis pour la sélection nationale sont désormais remarquables : les coachs sont intéressants, le centre d’entraînement est ultra-moderne et un avion spécialement affrété par la fédération suit désormais l’équipe dans ses déplacements. L’Algérie est aujourd’hui revenue sur la carte du football, c’est une nation forte du continent africain », poursuit-il fièrement.
Une passion pour le football européen qui vient de loin
Arrivé en France en 1982, le journaliste raconte avoir d’abord été fan des Girondins de Bordeaux, avant d’avoir observé avec attention les épopées européennes de l’Olympique de Marseille des années 1990. Là-dessus, le voilà qui livre une dernière anecdote qui illustre son intérêt pour les joutes européennes : « Mon père était assez strict au sujet de la télé et je manquais beaucoup trop de matches à mon goût. Adolescent, je me suis donc retrouvé, avec la complicité de ma mère, à acheter un petit poste de télé que je cachais dans ma chambre, pour pouvoir regarder les matchs de Coupe d’Europe en semaine. »
Avec L’Équipe du dimanche, bien des années plus tard, cette passion du foot semble avoir payé. Le gamin de Mansourah peut toucher du doigt et interroger bien des stars qui font rêver sur la planète foot.