Mehri rame à contre courant de la diplomatie algérienne

Mehri rame à contre courant de la diplomatie algérienne
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L’ancien secrétaire général du Front de libération nationale (FLN) Abdelhamid Mehri, n’est pas d’accord avec les positions exprimées par le gouvernement algérien sur les question régionales, notamment les révolution arabes. Et il ne se prive pas de le dire publiquement. Profitant de son passage jeudi en soirée au cycle de rencontres qu’organise notre confrère Algérie news, autour du thème «Algérie, quelles perspectives ? », M. Abdelhamid Mehri a clairement marqué ses distances vis-à-vis des choix diplomatique fait par les autorités qu’il n’a pas hésité à qualifier de «faux».

«Notre compréhension de la politique étrangère est fausse. Et c’est ce qui fait la faiblesse de la position algérienne sur le plan international. Le président ne fait pas de politique étrangère mais la dirige. La politique doit être le fruit du consensus d’une nation », a asséné en effet l’ex ambassadeur d’Algérie à Paris.

L’invité d’Algérie News, dont la prestation a été religieusement suivie par l’assistance, n’a pas hésité à mettre les pieds dans le plat en allant carrément à contre sens de la politique étrangère telle que pratiquée par le gouvernement de Bouteflika. Pour lui, l’Algérie gagnerait à soutenir le mouvement de changement dans tous les pays arabes «contre le monopole du pouvoir par un parti, une famille ou une communauté religieuse».

Abdelhamid Mehri en veut pour preuve que le régime de Kadhafi n’est pas soluble en démocratie. «Je ne sais pas comment on pourra construire l’Union du Maghreb arabe (UMA) avec un régime comme celui de Kadhafi. Notre choix doit être très clair, si les responsables actuels se sentent gênés, c’est autre chose », a‑t‑il expliqué. Pour cet ancien ministre, l’Algérie ne reconquerra sa place sur plan international qu’à travers «la concrétisation de l’un des objectifs de sa révolution et qui est l’Union Maghrébine».

C’est dire que la sortie médiatique de l’ex numéro un du FLN, a quelque peu brisé l’unanimisme sur la position de l’Algérie à l’égard du mouvement de changement chez ses voisins. Une prise de position pas très diplomatique, sans doute au goût du ministre des affaires étrangères Mourad Medelci voire même du président de la république. Dans ses réponses aux nombreuses questions, M. Mehri n’a pas non plus semblé donner crédit aux réformes politiques annoncées ni au changement du système au plan interne.

Changement en Algérie ? Je ne le pense pas…

«Je ne perçois pas pour l’instant une réelle volonté au sein du système de répondre à l’aspiration du peuple pour le changement. Je dis bien changement et non pas réformes », a –t-il tranché. Et d’ajouter : «pourtant, il faudrait bien avoir la conscience et le courage nécessaires pour dire que ce système ne peut plus durer (…) surtout si le destin a fait que nous avons eu certaines responsabilités dans le passé ».

Abdelhamid reprend la même analyse contenue dans sa lettre qu’il a adressée au président de la république en juin dernier. Il rappelle ainsi que «Tous ceux qui ont participé dans la gestion du pays d’une manière ou d’une autre assument une partie de la responsabilité ». Et de plaider pour une démarche globale de sortie de crise qui devrait faire attention à l’exclusion «de certaines parties du processus, quelles soient dans l’opposition – même islamiste – ou dans l’armée.

« Tout le monde doit participer ! », a ‑t‑il insisté. Abdelhamid Mehri dont la lettre au président n’a reçue aucune réponse, estime en outre que le projet de réforme du système doit «impérativement faire l’objet d’un consensus entre les différentes forces politiques». Et d’ajouter « Cela ne servira à rien » de le faire contre des responsables en place dans une allusion évidente aux décideurs civils et militaires.

Par ailleurs, l’ex chef du FLN, s’est exprimé sans réserve sur de nombreuses questions qui agitent l’actualité. Ainsi sur la liberté d’expression, condition sine qua non d’un Etat démocratique, Mehri estime qu’on a «une liberté d’expression, mais de façade, à travers laquelle on peut tout aborder, à part les vrais problèmes ». Pour la centaine de personnes qui a écouté l’orateur, ce fut une belle soirée ramadhanesque. Pour Mehri, ce fut un coup de pied dans la fourmilière d’une république unanimiste.