Abdelhamid Mehri, ancien secrétaire général du FLN, est revenu hier, lors d’une conférence de presse animée au siège du Front des forces socialistes (FFS) sur la lettre qu’il a récemment adressée au président de la République pour réclamer un «changement pacifique en Algérie».
Mehri a rapelé les grandes lignes de son initiative politique avant de passer aux questions-réponses avec les journalistes. D’emblée, Mehri explique que «la revendication du changement de régime n’est pas une accusation dirigée contre une personne, un parti, une institution ou une génération précise. Ce n’est pas non plus une opposition à ceux qui assument les responsabilité du pouvoir ou un règlement de comptes personnel avec quiconque».
Selon lui, le «changement est inévitable» dans la situation actuelle. «Le sentiment de la nécessité d’un changement pacifique est général. Il existe aussi chez mes frères qui sont au pouvoir», dit-il. Dans ce cadre, l’ancien SG du parti unique a cité le Mouvement de la société pour la paix (MSP) et le FLN qui ne cessent de réclamer ces derniers jours la révision de la Constitution. «C’est un signe parmi d’autres qui confirme que le pouvoir a admis l’idée du changement».
Visiblement convaincu d’un changement certain du régime, l’orateur n’a pas cité d’autres cercles qui «planifient» ce changement. «Il y a plusieurs visions sur le fond ce changement», assure-t-il. L’ancien négociateur des accords d’Evian a affirmé que Bouteflika «n’a donné aucune suite à son plan de sortie de crise». «Lorsqu’une réponse sera donnée, je m’engage à ce que l’information soit connue de tous», dit-il. Cependant, le conférencier a souligné que sa lettre «a eu des échos» positifs de la part de la classe politique ainsi que de personnalités. Dans ce cadre, Mehri n’a pas omis de remercier le président du FFS, Hocine Aït Ahmed, «pour l’intérêt qu’il porte à son initiative politique». Mehri a appelé à la multiplication des initiatives populaires émanant de la société et soutenant la demande de changement pacifique.
«Le changement se fait avec Bouteflika»
Abdelhamid Mehri a affirmé avoir toujours préféré «le changement du système» à «la chute du système». «Bouteflika et tous les symboles du pouvoir en Algérie sont indispensables pour mener le changement.
Je ne pense pas qu’un changement sans lui puisse réussir. Le changement se fera avec lui (le président), mais il ne nous dictera pas la nature de ce changement», dit-il, soulignant que son initiative «n’exclura aucune partie, contrairement à ceux qui prônent la rupture et l’exclusion de l’autre», allusion faite au Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD) qui ne cesse de réclamer la chute du régime. Mehri soutient également que pour construire un Etat démocratique il faut un changement du système politique.
«Le départ de Bouteflika ou une autre personne n’est pas une solution. Dans les années 80, les voix se sont élevées pour la chute de Chadli. Son départ n’a rien changé, le régime est resté le même», soutient-il encore, précisant que le système actuel est «incapable de répondre aux aspiration des Algériens et bâtir un Etat moderne». Abdelhamid Mehri a souhaité que les responsables prennent conscience de la nécessité de changer et de ne pas entraver cette action pacifique visant le changement du régime. «Pacifique ne veut pas dire qu’elle est superficielle, amoindrie ou complaisante avec une personne ou une institution», a-t-il relevé.
«L’axe Bouteflika-Aït Ahmed et Mehri, c’est de la comédie»
Abdelhamid Mehri a battu en brèche les rumeurs selon lesquelles une «alliance» entre lui, le président du FFS et Bouteflika est en phase de constitution pour venir à la rescousse du chef de l’Etat. «C’est une comédie. Cette analyse est fausse. Ni moi ni Aït Ahmed n’avons le pouvoir de sauver le régime. Et si nous nous mettons du côté de ce régime, nous coulerons tous», a-t-il déclaré.
Il a soutenu qu’il a toujours préféré que ses positions politiques soient publiques. «Dans les années difficiles de violence politique dans le pays, j’ai veillé à ce que les positions prises par le Bureau politique du FLN soient les mêmes que celles exprimées devant les responsables de l’Etat. Dans les questions d’intérêt public, il n’y a pas de secret», a-t-il noté. Interrogé sur les informations faisant état d’une rencontre qu’il aurait eue avec le président de la République après la publication d’une lettre, à la mi-février 2011, le conférencier répond par la négative. «Non, je n’ai pas rencontré Bouteflika. Si cette audience a lieu, cela ne se fera que dans le cadre d’une consultation générale qui ne me concerne pas uniquement. Si cela est possible, je souhaite que tout se fera publiquement», a-t-il affirmé.
Par Hocine Larabi