Ils reprennent des forces
La fable des Frères musulmans n’aura duré qu’une seule année au pays des pharaons. Mais, en rallongeant leurs chéquiers, les pays du Golfe veulent perpétuer cette fable.
Sous la houlette de son nouveau président Abderzzak Mokri, le MSP a organisé avant-hier, un meeting de solidarité avec le régime islamiste du président égyptien Mohamed Morsi destitué par l’armée. A Tunis, Rached Ghannouchi mobilise des milliers de ses fidèles sous la bannière de son parti Ennahda au pouvoir, pour dénoncer le renversement par l’armée du président Morsi.
Une manifestation qui se veut comme un avertissement à l’armée tunisienne qui serait tentée par un éventuel scénario de destitution à l’égyptienne surtout que le mouvement «tamaroud» a pris racine le 4 juillet dernier, en Tunisie. Et en Egypte, les Frères musulmans ont franchi le Rubicon en appelant au «soulèvement» à la suite du «massacre» de plus de 50 de leurs militants ce qui aggrave le climat d’extrême tension.
Entre le meeting d’Alger, la marche de Tunis et l’appel au soulèvement au Caire, il doit bien y avoir une intention inavouée qui consiste d’abord à reconstruire le puzzle islamiste en réelle agitation depuis les révoltes arabes. Incapables d’adapter le dogme au pragmatisme quand ils ont été confrontés à l’exercice du pouvoir, les islamistes ont lamentablement échoué. La fable des Frères musulmans n’aura duré qu’une seule année au pays des Pharaons. Mais, en rallongeant leur chéquiers, les pays du Golfe veulent perpétuer cette fable. Une pluie de pétrodollars s’abat sur un pays en panne économique. Une bagatelle de 12 milliards de dollars, 5 milliards des Saoudiens auxquels s’ajoutent 3 milliards des Emiratis et 4 des Koweïtiens pour sortir l’Egypte de la situation de quasi faillite et soutenir la transition. Cet empressement à venir au chevet de l’Egypte est évidemment une façon, pour ces monarchies, de rasseoir leur influence sur ce pays pivot du Moyen-Orient.
Soit! Mais il rappelle un épisode douloureux de l’histoire d’un autre pays musulman qui traverse une épreuve autrement plus grave et plus douloureuse durant les années 1990. Il s’agit bien de l’Algérie qui n’avait pas, à l’époque, de quoi payer cash un bateau de blé. Le pays crevait la dalle. Aucun pays musulman, encore moins les monarchies du Golfe, ne sont venus à son secours au moment où elle sombrait dans la violence terroriste. Prise en sandwich entre la violence islamiste et les griffes du FMI, l’Algérie n’a été secourue ni par les Arabes ni par les musulmans. Il a fallu l’intervention de la France qui s’était porté garante auprès du Club de Paris pour que l’Algérie soit maintenue sous perfusion. C’était dans cette épreuve dramatique que l’Arabie Saoudite avait trouvé le filon pour renforcer le wahhabisme en Algérie où le terrorisme carburait aux pétrodollars. Au mépris de la République algérienne souveraine, l’Arabie Saoudite entretenait de solides relations avec l’ex-FIS dissous. Le tapis rouge était déroulé aux deux leaders de cet ex-parti, Ali Benhadj et Abbassi Madani. Ils recevaient un soutien financier en millions de dollars. Cet argent qui a servi à consolider l’idéologie salafiste soutenue depuis les années 1980, était versé par le biais d’organisations humanitaires et caritatives islamiques, ou présentées comme telles, ou via des membres de la famille royale, des hommes d’affaires ou des responsables religieux. Une autre méthode de financement consistait à faire des dons pour la construction de mosquées et des édifices religieux pour ensuite en faire de hauts lieux de prêche du wahhabisme. Le fait n’était pas méconnu des spécialistes, des experts, des diplomates et des services de renseignements occidentaux. Il s’accordaient tous à dire que les pétrodollars saoudiens sont la principale source de financement de la mouvance salafiste. C’est l’éternel recommencement. Les mêmes méthodes et les mêmes procédés sont reconduits en Egypte…