Medjani : «A 17 ans, Valence, Manchester United et le Bayern Munich me voulaient aussi»

Medjani : «A 17 ans, Valence, Manchester United et le Bayern Munich me voulaient aussi»

Carl, à votre arrivée vous avez déclaré que l’accession pourrait se jouer jusqu’au dernier match, vous aviez raison puisque cela s’est concrétisé à une journée de la fin, un commentaire ?

L’objectif du club était de retrouver la Ligue 1, cette année, et terminer champion de Ligue 2, cela s’est concrétisé et on en est très contents. Je pense qu’on a accompli notre mission de belle manière puisqu’on a quand même terminé avec une avance considérable sur le 4e et avec cinq points d’avance sur le dauphin. Dans un championnat assez difficile, je pense qu’on a bien maîtrisé notre sujet.

Pouvez-vous nous parler des étapes les plus marquantes de cette accession ou de ce titre arraché avec Monaco, depuis votre arrivée, bien entendu ?

Je dirais que c’était lors de cette mauvaise période où on avait enchaîné quatre matchs sans la moindre victoire. On avait concédé trois nuls de suite, donc on n’a pas paniqué, on a su remettre les choses en place et enchaîner par une série de victoires derrière.

Sur le plan personnel, quel bon et mauvais souvenir retenez-vous de cette accession ?

Je vais commencer pas le mauvais. Il y a eu cette déconvenue face à Caen au stade Louis II qui m’a vraiment fait mal, parce que c’était ma seule défaite avec Monaco depuis que je suis venu ici. Après, on n’a pas gambergé, on est allés chercher une belle victoire à Nîmes, qui nous a permis de valider notre ticket en Ligue 1, en la présence de ma famille là-bas.

Quittez la Ligue 1 pour rejoindre un club de Ligue 2, ce n’était finalement pas pour rien…

C’est clair, si j’ai accepté ce challenge, c’est parce que j’en connaissais les tenants et les aboutissants. Je savais que j’arrivais dans un grand club, avec un gros projet sur les années à venir. Ce n’était pas, comme le pensent certains, sur une durée de quatre ou six mois. J’étais aussi convaincu que l’équipe avait de grandes chances de monter en Ligue 1, elle était bien placée pour le faire. Et à présent, je suis comblé par ce titre de champion de Ligue 2. Maintenant, j’ai atteint un premier objectif, à savoir m’imposer à Monaco en Ligue 2, et maintenant j’espère le faire en Ligue 1.

On parle beaucoup de joueurs de classe mondiale à Monaco, pratiquement dans chaque compartiment, des appréhensions ?

Je n’appréhende rien, au contraire, je pense déjà que tout le monde sera fier de voir un Algérien jouer aux côtés de grands joueurs, l’année prochaine. Après, la concurrence sera la même, comme cela se passe dans tous les clubs.

Oui, mais dans votre poste, par exemple, beaucoup de stars sont annoncées, ce ne sera pas simple de s’imposer…

C’est sûr que pour moi la concurrence sera beaucoup plus forte avec l’arrivée peut-être de joueurs de talent mondial, mais ça sera quand même un autre challenge intéressant. Si j’arrive à avoir du temps de jeu avec mon équipe, cela veut dire que j’aurais fait le bon choix. Si par malheur ça ne se passe pas aussi bien qu’on le souhaite, je trouverai des solutions et je travaillerai plus dur pour rester compétitif.

Justement, cette appréhension d’être un second choix la saison prochaine est confirmée par plusieurs observateurs de l’EN en Algérie qui ont aussi remis en cause votre choix de jouer en Ligue 2…

Je sais, on a dit aussi que je serai moins compétitif. Mais comment peut-on perdre sa forme en optant pour un club qui joue la première place du championnat de France de Ligue 2 ? Après, ces mêmes personnes qui disent ça, il faudrait qu’elles m’expliquent quelle est la différence entre une équipe qui joue le haut du tableau en Ligue 2 et l’équipe qui se bat pour ne pas descendre en Ligue 2.

Ça vous a touché, apparemment ?

Non, mais ces mêmes personnes, je leur donnerai raison le jour où on fera le bilan de ma prochaine saison en Ligue 1 avec Monaco. Si je ne vais pas jouer, ils pourront dire que j’ai fait le mauvais choix. Si je serai encore titulaire avec mon club, ils diront : «Eh ben voilà, Medjani a fait une bonne saison et aussi un bon choix en optant pour un club de Ligue 2, l’année d’avant.»

Dites-nous un peu comment les Monégasques sont venus vous chercher à Ajaccio…

Au fait, je n’étais pas là. J’étais en sélection en Afrique du Sud. Après, je sais que le coach me connaissait bien. Après mon arrivée, j’ai su qu’il avait demandé au statisticien de l’équipe de lui préparer des images vidéo sur mes matchs avec Ajaccio, pour avoir une meilleure idée de ce qu’on lui avait dit de moi.

C’est pour cela qu’il vous a directement titularisé ?

Tout  à fait, il était bien fixé sur mes qualités. Je sais aussi que j’étais apprécié ici à Monaco. Maintenant, l’objectif c’est de m’imposer la saison prochaine et me montrer avec Monaco en

Ligue 1.

On l’a vu, vous parlez beaucoup à l’entraînement, comment est votre relation avec Claudio Ranieri ?

Elle est très bonne, on a passé quatre mois formidables ensemble. On a gagné beaucoup de choses ensemble aussi. On a atteint les objectifs. C’est un très grand coach, je n’ai pas besoin de vous le dire, je pense.

Qu’est-ce qu’on ressent lorsqu’on est drivé par un entraîneur de cette envergure ?

C’est quelque chose d’exceptionnel, Ranieri n’est plus à présenter, il n’y a qu’à voir son palmarès et son CV, les joueurs et les clubs qu’il a entraînés pour se rendre compte qu’il fait partie de la liste restreinte des meilleurs entraîneurs au monade. On ne peut que respecter cet entraîneur qui m’a beaucoup apporté.

En quatre mois, justement, qu’a-t-il pu changer en vous, ou qu’a-t-il pu apporter à votre jeu ?

En arrivant, d’abord, j’ai senti qu’il connaissait presque tout sur moi. En quatre mois, j’ai l’impression que j’ai énormément progressé, notamment dans le placement défensif et aussi sur le plan tactique. Pour un défenseur central comme moi, franchement, il m’a inculqué des choses que je découvrais pour la première fois. Il m’a transmis cette rigueur à l’italienne qui a fait et qui fait encore la force du football italien. Je suis satisfait d’avoir été entraîné par ce grand monsieur.

L’année prochaine, c’est la Ligue des champions, Monaco ne peut pas se contenter d’autres rôles en Ligue 1 ?

Honnêtement, pour le moment, je ne sais pas trop. Mais c’est clair que l’AS Monaco, de par son histoire et son statut, va viser haut. Après, ce qui se dit n’est que rumeur. On verra ce qu’on va décider avec la direction du club et l’entraîneur.

Allez-vous faire partie de ce grand projet lancé par les dirigeants monégasques, la saison prochaine ?

Je l’espère, en tout cas ici on est satisfait de ce que j’ai fait durant la phase retour où j’ai pris part à tous les matchs. En tout cas, ça fait toujours plaisir qu’on dise qu’un Algérien évolue dans un grand club. J’aurais le devoir de bien représenter mon pays. Je sais que ça fera énormément plaisir aux gens qui m’aiment de me voir évoluer sous les couleurs d’un club aussi huppé en France.

Après un passage raté à Liverpool, maintenant que vous jouez dans un grand club français,  peut-on dire que vous avez pris votre revanche sur le sort ?

Je n’ai aucune revanche à prendre. Mon parcours reflète l’homme et le joueur que je suis. C’est vrai que lorsque j’étais jeune, j’étais prédestiné à une meilleure carrière, mais je n’ai que 28 ans, j’ai encore de belles années devant moi pour pouvoir faire honneur à ma famille et aux gens qui m’ont soutenu pendant cette période délicate.

Revenons un peu en arrière, avant d’atterrir à Liverpool il y avait certainement des équipes qui étaient derrière vous…

Oui, à l’époque j’étais l’un des fleurons du football français. C’est vrai que j’avais pas mal de  grands clubs européens sur moi, mais j’avais fait le choix de jouer pour Liverpool.  Il y avait Manchester United. J’avais même été reçu par Sir Alex Ferguson dans son bureau.  Quand il a annoncé sa retraite il y a quelques jours, j’ai pu mesurer l’envergure de ce grand homme du football.  J’avais aussi l’opportunité de signer à Valence et au Bayern de Munich.

Que peut-on ressentir lorsqu’on a été entraîné par Houllier et Ranieri ?

C’est une grande fierté, et puis ce n’est pas donné à tout le monde. Ils ne sont pas nombreux les footballeurs qui peuvent dire qu’ils ont été entraînés par Gérard Houllier ou qu’ils ont joué avec Michael Owen, ou Steven Gerrard à Liverpool. Qui peut aussi dire qu’il a été sous la coupe d’un grand coach comme Ranieri, donc voilà, on se dit qu’on est des privilégiés.

Pouvez-vous nous dire comment des stars comme Owen et Gerrard se comportaient avec vous ?

Steven Gerrard et Michael Owen sont des stars du football mondial, mais ce sont des personnes très humbles. Je me rappelle qu’ils n’hésitaient pas à me donner des conseils.  Il y a trois ans, lorsqu’on avait joué contre l’Angleterre en Coupe du monde 2010 en Afrique du Sud, ça m’avait vraiment fait plaisir de voir Steven Gerrard venir vers moi pour me serrer la main. C’était aussi le cas de Jamie Carragher mon ancien coéquipier de chambre lors des stages de préparation. Avant le match, il est venu échanger quelques mots avec moi. Cela prouve que c’est des gens respectueux et qu’ils se souvenaient toujours de moi. Peut-être pas pour le footballeur que j’étais, mais pour le gentil garçon que je suis.

Si Houllier était resté, vous auriez certainement duré à Liverpool…

Certainement. Mais comme je l’ai dit, tout arrive pour une raison. Moi je ne veux pas m’attarder sur mon passé. C’est mon destin.

A 28 ans, vous pensez toujours disputer une autre Coupe du monde ?

Inch’Allah. Ça serait vraiment magnifique de jouer une autre Coupe du monde au Brésil. C’est un rêve d’enfant.  Avec l’hygiène de vie que j’ai, je pense qu’à cet âge-là, il me reste encore de belles années devant moi.

Avant cela, il va falloir bien négocier les deux matchs du mois de juin…

Absolument, c’est des matchs très importants qu’on doit très bien préparer. Mardi, je vais retrouver mes camarades en sélection, à Alger. Il y a des objectifs qui sont tellement importants avec la sélection que je suis pressé d’y être.

Parlez-nous de votre passage à Lorient et de vos rapports avec l’ex-capitaine de l’EN, Yazid Mansouri qui était votre ancien coéquipier…

Yazid Mansouri était comme un grand frère. A mon arrivée à Lorient, cela ne se passait pas très bien pour moi. Il m’a beaucoup aidé et conseillé à cette époque-là. En plus de Yazid, il y avait aussi Rafik Saïfi qui était un coéquipier là-bas. Je garde un souvenir magnifique de Mansouri.

On dit qu’il était pour quelque chose dans votre convocation en sélection…

Certainement, c’est quelqu’un qui me connaissait bien, il connaissait ma famille, donc il a certainement eu un rôle important dans ma convocation en équipe d’Algérie. J’ai beaucoup d’estime pour Yazid et si aujourd’hui il a intégré le bureau fédéral cela prouve tout l’amour et le respect qu’il porte à son pays.

Etant jeune, étiez-vous toujours en contact avec tout ce qui touche à l’Algérie ?

Bien sûr, j’ai ma famille à El Harrach, et je suis aussi un enfant de la Kabylie parce que mon grand- père et ma grand-mère sont natifs d’Akbou. Donc, voilà, la JSK et l’USMH ont toujours été les couleurs de la famille.

Avant de devenir international, avez-vous franchement pensé un jour porter ce maillot vert ?

A vrai dire, la première personne qui m’a parlé de l’éventualité de porter les couleurs de l’Algérie, c’est M. Ziani, le père de notre ami Karim (Ndlr : Rabah Ziani). C’était lorsque je suis passé professionnel avec Lorient. A cette période j’évoluais avec Karim Ziani dans cette équipe.

Qu’est-ce qu’il vous disait au juste ?

Il a commencé à me sensibiliser, à me parler du projet de la Fédération algérienne de football. On me disait aussi que l’Algérie était en train de construire une belle équipe et qu’on aura certainement besoin des joueurs de mon profil. J’étais en équipe de France jeune, mais on m’a toujours sensibilisé pour porter le maillot vert de l’Equipe nationale.

Seriez-vous un jour prêt à jouer pour El Harrach ou la JSK ?

Pourquoi pas ? Il ne faut jamais dire jamais. Aujourd’hui on sait que la JSK est un grand d’Afrique et l’USMH est en train de jouer les trouble-fêtes dans le championnat de Ligue 1. Et là, je profite de cette occasion pour les féliciter après cette deuxième place acquise qui leur permet de jouer la Ligue des champions la saison prochaine.

Les matchs face au Bénin et le Rwanda arrivent, c’est la période la plus difficile, comment appréhendez-vous ces deux rendez-vous ?

Je crois qu’on doit penser à bien se préparer et ne surtout pas faire les matchs avant de les avoir joués. On doit rester sereins et déterminés à faire deux gros matchs, inch’Allah.

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Il partira en stage en Italie le 1er juillet avec Monaco

C’est pratiquement une certitude, Carl Medjani ne quittera pas l’AS Monaco la saison prochaine. Toujours sous contrat avec le club de la Principauté, Carl reprendra l’entraînement le 1er juillet prochain. Le premier stage de Monaco aura lieu en Italie, le deuxième en Autriche, et le troisième, soit à Brest soit en Angleterre, selon l’entraîneur Claudio Ranieri.

Attendu à Alger le 28 mai

Carl Medjani, qui a disputé, vendredi, son dernier match de championnat de Ligue 2 française, aura droit à seulement deux journées de repos. Il rejoindra le reste de ses camarades en stage à Sidi Moussa le mardi 28 mai.

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Bachir Nehar (magasinier de l’AS Monaco) : «Medjani est très respecté ici à Monaco»

Le magasinier de l’AS Monaco, Bachir Nehar, a bien voulu nous donner son avis sur la vie de Carl Medjani en principauté : «Tous les gens l’aiment bien, il a été vite adopté à Monaco. Il s’est rapidement aussi intégré dans notre effectif. C’est quelqu’un qui est très fier de ses origines algériennes. Comme on le voit durant les matchs, il porte toujours ce serre-poignet aux couleurs de l’Algérie. C’est un super mec. C’est notre futur capitaine à Monaco.»

«Le drapeau algérien au stade Louis II, c’est grâce à Carl, c’est notre fierté»

Bachir Nehar est très fier de son compatriote Medjani qu’il côtoie au quotidien. Il nous a révélé que depuis que le défenseur central de l’EN est en Principauté, les drapeaux algériens sont de plus en plus visibles dans les tribunes du stade Louis II : «Depuis l’ère Benarbia, qui a marqué son passage ici à Monaco, on n’a pas vu de drapeaux algériens ici au stade Louis II. C’est donc grâce à Carl Medjani qu’on a revu l’emblème national. En tant qu’Algériens, on est fiers de lui. On espère qu’il restera ici la saison prochaine.»

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Ce que pensent de lui ses camarades

Rivière (attaquant) : «Quand Medjani parle, on sent que c’est un vrai leader»

L’autre camarade de Carl Medjani à Ajaccio, Emmanuel Rivière, a bien voulu nous parler de son coéquipier à Monaco : «On est arrivés en même temps cet hiver. Je dirais que Carl est un combattant, un vrai guerrier sur le terrain. Il y va vraiment dans les duels et en le voyant comme ça se donner à fond, il nous pousse tous à aller de l’avant. Avant les matchs, il prend beaucoup la parole dans le vestiaire. On sent que c’est un vrai leader. Franchement, il nous a beaucoup apporté.»

Germain (milieu offensif) : «Carl est un très grand compétiteur»

Voulant avoir son avis sur l’apport de Carl Medjani depuis son transfert d’Ajaccio à Monaco, Valère Germain, le buteur de l’ASM, ne tarit pas d’éloges sur son coéquipier international algérien : «Carl est un très grand compétiteur. Il a toujours envie de gagner, il a  aussi cette envie de faire progresser l’équipe. Avant son arrivée, on manquait justement d’un leader qui prenne l’initiative pour nous remobiliser quand ça n’allait pas. Après, sur le terrain, c’est quelqu’un qui donne l’exemple en allant à fond dans les duels.»

Obadi (milieu de terrain) : «Fier de l’avoir comme partenaire et ami»

Mounir Obadi, l’international marocain de Monaco est aussi très élogieux envers son coéquipier algérien : «Carl est un joueur de caractère. Un peu comme Karim Ziani que j’ai connu à Troyes, il y a quelques années. C’est un vrai leader, il est très écouté de ses partenaires. C’est un vrai capitaine dans le vestiaire. Il nous dit beaucoup de choses, il a une certaine expérience en Ligues 1 et 2, il a toujours cette bonne parole pour nous booster. En dehors du foot, c’est quelqu’un de bien, tranquille. C’est un très bon mec. On est souvent ensemble, on est d’origine maghrébine, donc ça facilite le contact. Je suis fier de l’avoir comme ami et partenaire.»

Nabil Dirar : «Carl sait comment nous remettre en confiance dans un match»

L’autre Marocain de cette équipe monégasque, Nabil Dirar, a accepté de nous livrer ses impressions sur Carl Medjani : «Je connaissais déjà Medjani pour l’avoir déjà vu à l’œuvre en équipe d’Algérie. Je trouve que c’est un très bon joueur avec un très bon caractère. Il nous a fait beaucoup de bien, il sait mettre l’équipe en confiance. Son expérience nous aide sur et en dehors du terrain.»