Lakhdar Brahimi, l’homme de la dernière chance?
Sollicité pour prendre la suite de Kofi Annan qui a démissionné la semaine dernière, le diplomate algérien, Lakhdar Brahimi a conditionné son acceptation par le soutien formel du Conseil de sécurité.
Le diplomate algérien Lakhdar Brahimi, pressenti pour succéder à Kofi Annan comme médiateur de l’ONU en Syrie, a conditionné son acceptation de la mission par le soutien formel du Conseil de sécurité de l’ONU. Les 15 nations composant le Conseil de sécurité étant profondément divisées sur le conflit syrien, M.Brahimi, ancien envoyé de l’ONU en Afghanistan et en Irak, souhaite un geste de «soutien ferme» avant d’accepter la succession de Kofi Annan, a précisé en début de week-end un diplomate onusien sous couvert d’anonymat. «M.Brahimi veut que le Conseil approuve sa nomination», a déclaré un deuxième diplomate: «Il considère que c’est crucial». Toutefois, après plusieurs jours de négociations, Lakhdar Brahimi aurait accepté de devenir le nouvel émissaire de l’ONU sur la Syrie, rapporte ce jeudi soir l’agence Reuters citant des sources des Nations unies (l’information n’est cependant toujours pas confirmée hier à l’heure de la rédaction de ces lignes). Le diplomate algérien remplacerait Kofi Annan qui a démissionné la semaine passée de son poste d’envoyé spécial de l’ONU en Syrie, déplorant le manque de soutien des grandes puissances à sa mission. Lakhdar Brahimi aurait aussi exigé de ne porter que la casquette d’envoyer spécial de l’ONU, récusant que lui soit associé la Ligue arabe. Les Syriens, qui ont donné leur accord pour la désignation de M.Brahimi ne sont pas favorables à une mention de la Ligue arabe dans l’intitulé de la mission. La Syrie a donné son accord à la nomination du diplomate algérien. C’est du moins ce qu’a annoncé mardi à Genève le porte-parole de M. Annan. Depuis le début de la guerre en Syrie, les grandes puissances occidentales et l’opposition armée syrienne voulaient imposer un préalable, le départ de Bachar Al Assad et le changement de régime avant d’envisager toute solution négociée en Syrie. Ceci amena la Russie et la Chine d’user de leur veto au Conseil de sécurité à des résolutions que Moscou et Pékin estimaient partiales et non fondées politiquement. La désignation de Lakhdar Brahimi pour tenter de trouver une issue à une crise syrienne, de plus en plus sanglante, pourrait toutefois s’avérer être un tournant pour la Syrie, dont la situation au plan international est de plus en plus inconfortable. Aussi, le choix de M.Brahimi, pourrait être déterminant pour parvenir à une issue acceptable et acceptée par toutes les parties en conflit en Syrie. Âgé de 78 ans, Lakhdar Brahimi connaît bien le Moyen-Orient. Le diplomate a été envoyé spécial de l’ONU dans plusieurs points chauds de la planète et médiateur dans plusieurs conflits. En 1989, il a été l’un des artisans de l’accord de Taef qui avait mis fin à la guerre civile au Liban. Il a notamment représenté l’ONU en Afghanistan de 1997 à 1999, puis de 2001 à 2004 après le départ des Taliban, ainsi qu’en Irak après l’invasion américaine de 2003. Mais en Syrie sa mission sera sans doute l’une des plus difficiles de sa carrière. Toutefois, le diplomate algérien, qui a déjà une idée de la situation en Syrie, avait dès la semaine dernière – au moment où on évoquait la possibilité de le voir remplacer Kofi Annan – indiquait dans un communiqué des «Elders» (les Anciens, groupe de hauts responsables politiques internationaux qui participent à solutionner en relation avec l’ONU des questions telles celles qui se présente actuellement en Syrie) «Le Conseil de sécurité de l’ONU et les Etats de la région doivent s’unir pour permettre une transition politique dès que possible. (…) Des millions de Syriens réclament la paix à grands cris. Les grandes puissances ne peuvent plus rester divisées et ignorer ainsi cette demande pressante».
Par ce communiqué, M.Brahimi montrait déjà qu’il n’était pas contre l’idée de reprendre la mission de M.Annan, mais il demandait des garanties en appelant à «l’unité» des rangs au sein du Conseil de sécurité. Il savait qu’il ne ferait pas mieux que Kofi Annan si les grandes puissances, détentrice du droit de veto, demeuraient divisées sur la question et la méthode de travail pour trouver une issue à la tragédie qui se déroule en Syrie. A-t-il obtenu cette garantie? Tout le laisse croire dès lors que l’on affirme qu’il aurait donné son accord à une mission plus que jamais une mission casse-cou.