Dix jours après, la justice entre en action. Entamée le 28 mars, la grève observée par les médecins résidents dans les hôpitaux en Algérie a été déclarée « illégale » par la justice, a annoncé jeudi 7 mars le ministre algérien de la Santé, Djamel Ould Abbès. Pendant les dix jours du mouvement de protestation, le ministre s’est montré ouvert au dialogue avec les grévistes avant de faire volte-face en les trainant devant la justice.
S’exprimant lors d’une séance de questions orales au conseil de la Nation (Sénat), le ministre a estimé que la justice a promulgué le 6 avril une ordonnance en référé confirmant « le caractère illégal de la grève des médecins résidents ».
M. Ould Abbès a appelé les protestataires « à la raison les invitant à regagner leurs postes de travail et à poursuivre le dialogue avec le ministère ».
La grève avait touché dix wilayas disposant de CHU, a rappelé Ould Abbes, précisant que les revendications de cette catégorie liées à la révision du statut de la profession promulgué en 1996 et aux indemnités relatives au risque de contagion ont été satisfaites.
Contacté par DNA, Amine Benhabib, porte parole du collectif autonome des médecins résidents algériens, tient à relever quelques anomalies dans la requête du ministre adressée à la justice. « L’ordonnance en référée a condamné 12 membres à reprendre le travail, dont on ne connaît que quelques noms. Ils ont été condamnés en leur absence. De plus, la justice a rendu sa décision au nom d’une organisation alors que nous sommes un collectif autonome », affirme d’abord notre interlocuteur.
Les médecins résidents, selon lui, conditionnent l’arrêt du débrayage et la reprise du travail par la satisfaction de leurs revendications. « Pour déclarer notre grève illégale, la justice devrait alors assigner tous les médecins résidents nominativement », ajoute-il.
Le porte-parole du collectif autonome, créé début mars, est revenu également sur les déclarations « contradictoires » du ministre. « Un jour, il dit qu’il est à notre écoute, le lendemain, il dit que les commissions ne peuvent prendre en charge nos doléances, le surlendemain, il nous menace de poursuites judiciaires. A suivre ses déclarations, on ne peut pas prendre au mot le ministre », déplore M. Benhabib.
Les médecins résidents voulaient, à ses yeux, un « dialogue clair et serein », ce qui n’est plus le cas.
« Nous avions même proposé des solutions. On a toujours laissé la porte ouverte au dialogue, malgré les menaces, les insultes et les vindictes. Or, nous constatons, que rien n’a été fait dans le sens de la satisfaction de nos revendications. Pire encore, il actionne la justice à travers des poursuites judicaires », s’attriste-t-il, regrettant au passage « l’envie du pourrissement » de la part du ministère de tutelle.
Sur la revendication du statut du résident et des indemnités liées au risque de contagion que le ministre dit avoir eu à satisfaire, M. Benhabib corrige. « Je dois rappeler que le ministre a déjà soutenu que la révision du statut n’était pas de son ressort et qu’il fallait la participation du ministère de l’enseignement supérieur ».
Et d’ironiser : « Pour ce qui est de la prime de contagion, si le ministre n’a remarqué que cela dans notre plate forme de revendications, ceci prouve que nous avions été bien écouté de sa part ».
Prés de 5 000 médecins résidents, selon les organisateurs, ont observé mercredi 6 avril un sit-in de protestation de plusieurs heures à deux pas du siège de la présidence dans le quartier d’El-Mouradia, sur les hauteurs d’Alger.
La police les a empêchés d’atteindre le palais présidentiel, lieu où devait se tenir initialement le rassemblement.
Les délégués des médecins résidents avaient annoncé le même jour lors d’une conférence de presse le maintien de leur grève illimitée.
La veille, mardi 5 avril, les délégués nationaux des médecins résidents se sont retirés des trois commissions mixtes mises. La raison ? Ces commissions n’étaient pas en mesure de prendre en charge les revendications des protestataires, selon le collectif autonome.
Les délégués nationaux des médecins résidents se réuniront demain samedi à Alger afin de mettre en place un dispositif d’organisation et de coordination à même d’assurer la poursuite de la grève illimité, selon M. Benhabib.