Le point qui suscite de grandes inquiétudes est fondamentalement celui du chômage, notamment la tranche d’âge des 16-26 ans où il reste très important. L’ université, les instituts, les centres de formation professionnelle et les déperditions scolaires (+ 23,6% ) libèrent plus de 30 000 jeunes/an
dont 73% ne trouvent pas de travail sur le marché local de l’emploi, dominé de plus en plus par l’informel. Un phénomène qu’il faut lier indéniablement au niveau de croissance des 64 communes que compte la wilaya de Médéa dont 32 sont maintenues sous perfusion via les sous affectés spécialement d’ Alger sous forme de Fonds commun des collectivités locales (FCCL). Le secteur de l’agri-culture, qui contribuait à hauteur de 46% en matière de création d’ emplois, n’absorbe aujourd’ hui que 38% à peine. Les autres secteurs, notamment le BTP et l’industrie, qui avaient fortement contribué à la création d’ emplois par le passé et qui sont considérés comme de véritables moteurs de la croissance à long terme, connaissent depuis ces cinq dernières années un déclin, avec respectivement 20 et 13%.
Le secteur industriel, qui a connu une véritable hémorragie et des coûts sociaux très lourds (compressions et licenciements) durant la phase d’ application du PAS, a plongé dans la contraction ( lire nos précédentes analyses et reportages). Une débâcle intervenue dans un contexte marqué par un accroissement inédit de la demande d’emploi, résultante d’ un accroissement de la population en âge de travailler. Seule satisfaction : le dispositif micro-entreprises dont la contribution à la valeur ajoutée frôle les 21%, et les statistiques officielles distillées sont peu fiables. Entre 2008 et 2009, 75 382 demandeurs d’emploi ont émargé auprès de l’ANGEM. Sur ce volume, 6 017 placements (CID), 1 178 dont 11 contractuels seulement seront reconduits, et 2 635 jeunes intégrés dans le cadre du dispositif touchant les demandeurs sans qualification ni diplômes. Dans le décompte, 9 38O placements temporaires sur un total de 65 552 postulants auxquels s’ajoutent ceux recensés par la CNAC (2 190) et de l’ ANSEJ (10 284).
Des emplois précaires qui cessent dès que le contrat vient à expiration. Concernant l’ANSEJ, beaucoup de projets lancés ont échoué, faute d ‘outillage managérial, études prospectives préliminaires, alors que d’ autres ont pris la clé des champs… Et dire que l’ année 2011 a été celle de la consolidation des dispositifs d’emploi, particulièrement dans 32 communes dont la situation est jugée critique, soit 50% des collectivités locales, selon une étude sur la carte de pauvreté en Algérie, réalisée par le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD), confirmée, par ailleurs, par l’Agence nationale de l’aménagement du territoire (ANAT). Trente-deux communes où les inégalités couplées aux disparités sont les plus fortes et les plus perceptibles.
Les populations du sud et du sud-est de la wilaya de Médéa vivent dans des conditions particulièrement difficiles, avec un indice de 0, 594, que ce soit en termes d’emploi, d’accès aux soins médicaux, à l’eau potable, au logement. Pourtant, aucune portion du territoire de la région n’a été omise, du moins sur le front des programmes sectoriels décentralisés (PSD). Les investissements consentis durant les deux plans quinquennaux ne se sont pas traduits sur le terrain par les résultats escomptés.
Mais c’est le spectre du chômage qui prend les contours d’ une menace au sein des communes devenues entités de dénuement et de calvaire, de véritables
incubateurs où misère et délinquance « font bon ménage ». On ne le répétera jamais assez : incapables de tenir sur leurs jambes depuis l’indépendance nationale, pour ne pas dire paraplégiques, ces communes n’ont pas su créer un minimum de ressources, d’agir localement sur des besoins basiques supportés pour l’ essentiel par le budget de l’ Etat. Et quel mérite, pour des élus pilotant d’éternelles transformations de trottoirs (qui craquent au bout de quelques semaines), Le chaulage des arbres? Une fiction coûteuse à 13 millions par mois… On pourrait lister l’éventail des causes ayant provoqué « l’infarctus », principalement dans la création de richesses et d’emplois, la généralisation du sous-emploi dont souffrent des milliers de jeunes diplômés (ou pas) au niveau de la wilaya de Médéa.
Tant qu’on ne dépassera pas l’opéra-bouffe d’élus locaux sans compétence ni ancrage social, la démocratie subvertie par le nombre de tribus et la traque « monétaire » des voix, tant qu’on ne passe pas d’une administration lourdement bureaucratisée, la problématique de l’emploi risque de déboucher sur l’ imprévisible. Les pouvoirs publics doivent recentrer les investissements dans la création d’au moins 3 000 PME/PMI au niveau des trois Zones industrielles et des 22 Zones d’ activités. Anesthésier la problématique du chômage ne dure pas…
Abderrahmane Missoumi