Mécontents par l’action de la police contre l’informel : Des citoyens ferment… la route à béjaïa

Mécontents par l’action de la police contre l’informel : Des citoyens ferment… la route à béjaïa
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Depuis le début du mois sacré du Ramadhan, la ville de Béjaïa s’est transformée en un gigantesque marché où tout se vend et s’achète. La route de la Liberté a été subitement fermée à la circulation deux heures avant le ftour, lundi dernier. Des jeunes du quartier dénonçaient l’intervention de la police qui a saisi la marchandise d’un commerçant informel, exigeant sa restitution immédiate Les citoyens de la ville de Béjaïa ont, non seulement été surpris par la fermeture de la route, mais encore plus par sa motivation.

«Bientôt, on fermera la route pour dénoncer l’arrestation d’un dealer, d’un voleur ou d’un criminel», ironise un habitant du quartier, pas du tout d’accord avec l’action du jour. Pour les protestataires, le «commerçant incriminé» ne faisait que gagner sa vie en vendant des produits domestiques et ne voient pas où est le mal.

Bizarre et inquiétant raisonnement! Un raisonnement qui sonne comme une alerte sérieuse quant à la nécessité d’agir en adoptant une nouvelle stratégie pour contrer les partisans de l’anarchie qui refait surface comme par hasard à chaque mois sacré. Ce qui s’est passé à la rue de la Liberté n’est pas un simple fait à circonscrire dans un dépassement, mais un phénomène qui métrite d’être scruté de manière plus profonde et plus sérieuse de la part des pouvoirs publics.

L’anarchie règne

N’ayant pas la mémoire courte: c’est à partir d’un similaire fait banal que la Tunisie a basculé dans le chaos. Le vendeur El Bouazizi a été humilié par une policière et le feu a pris. Certes, on n’en est pas là, mais ne dit-on pas que gouverner c’est prévoir? Cela étant, la liberté d’entreprendre, de travailler n’est nullement synonyme d’anarchie.

Hélas l’anarchie règne à Béjaïa. Depuis le début du mois sacré du Ramadhan, la ville de Béjaïa s’est transformée en un gigantesque marché où tout se vend et s’achète. Plusieurs points de vente de différents produits ont vu le jour aux quatre coins de la ville, les marchands ambulants de fruits et légumes, souvent non enregistrés au registre du commerce, ont investi d’une façon hallucinante les quartiers de la ville. Aucune ruelle n’est épargnée. Elles sont toutes squattées par des jeunes qui y étalent leurs marchandises, à même les trottoirs.

Des dattes, des légumes saisonniers, en passant par les épices, sont exposés aux quatre vents. Une activité illégale et informelle domine le commerce à Béjaïa et lorsque les pouvoirs publics jugent utile d’intervenir, ils butent sur des oppositions qui n’y sont pas sans les empêcher de remettre les choses à leur place. Un imbroglio né pour l’essentiel du «laxisme», dont a fait preuve l’Etat depuis notamment les années 2001.

La «spécificité» de Béjaïa, que les représentants de l’Etat évoquent à chaque fois qu’ils sont interrogés sur les raisons qui les empêchent de remettre de l’ordre sur les routes et dans les quartiers, a fini par faire des émules.

Et lorsqu’on s’amuse à ne répondre qu’aux doléances de ceux qui recourent à la force, le tour est vite joué et les conséquences sont là pour rappeler encore une fois, l’urgence de revoir sa copie. «L’état doit reprendre son rôle, la police doit cesser de faire dans cette politique de proximité non productive», constate un observateur de la scène locale à Béjaïa, estimant que «la démarche n’as pas été payante, alors il faut la changer d’autant plus que la demande émane des citoyens».

Et ce n’est pas pour autant verser dans le répressif, car le rétablissement d’ordre public est une des missions principales des services de sécurité, estime-t-on un peu partout dans la ville de Béjaïa où les dépassements sont légion.

Des trottoirs engorgés

Des activités commerciales ambulantes qui ne répondent même pas aux exigences de sécurité et de salubrité. On a même vu des réfrigérateurs et autres présentoirs sur les trottoirs proposer des boissons et des glaces en toute impunité. En plus du fait que ces commerçants qui s’inventent un métier d’un mois, sont des concurrents déloyaux aux activités commerciales légales, il y a lieu de retenir leurs nuisances et préjudices à l’environnement urbain. Quant à la qualité n’en parlons pas! Mais les gens achètent tout de même.

Les étals de ces commerces informels connaissent un afflux considérable des clients. «Normal!», estime Omar venu faire ses courses. «Ils nous proposent des tomates, de la pomme de terre, des oignons, et beaucoup d’autres produits à des prix défiant toute concurrence», dit-il comme pour expliquer son choix. Un choix certes, mais qui risque de coûter cher. «Non!» rétorque-t-il «je prends soin de vérifier ce que j’achète».

On comprend maintenant pourquoi ces commerçants sont ainsi défendus. C’est donc une question d’argent. Ils font l’affaire des consommateurs, dont le pouvoir d’achat ne permet pas d’aller dans les magasins normaux. Le commerce informel est aussi légion, sur les routes nationales. Sans prix affichés, ni contrôle, ni hygiène, les différents produits sont proposés à la vente et constituent un véritable danger pour la santé publique. Le tout dans un mépris total de la loi. Ceux qui sont chargés d’appliquer cette loi hésitent souvent à agir et c’est l’exaspération chez ceux qui l’appliquent.