MCA : Geiger : «C’est agréable de jeûner»

MCA : Geiger : «C’est  agréable de jeûner»
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Alain Geiger, l’ancien capitaine de la sélection suisse, qui a observé le jeûne avec son équipe, se livre au Buteur. A travers la discussion que nous avons eue avec lui, à une demi-heure du f’tour, nous avons pu découvrir l’autre visage du technicien suisse. Le temps est tellement passé vite que nous avons dû poursuivre notre discussion avec Alain Geiger sur le chemin qui mène au restaurant de l’hôtel.

Vous avez fait une surprise à tout le monde en décidant de jeûner…



J’ai déjà jeûné lorsque j’étais en Arabie Saoudite, à Al Ittifak, et aussi à la JSK, lorsqu’on jouait la Ligue des champions. Je voulais donc jeûner avec le Mouloudia, et voilà que l’occasion s’est présentée à moi et je ne l’ai pas ratée. Je voulais jeûner bien avant, mais Kaci-Saïd et les membres du staff, m’ont recommandé de le faire la veille  27e jour du Ramadhan, une nuit sacrée.

A une demi-heure de la rupture du jeûne, il semble bien que vous tenez le coup…

LG Algérie

Oui, les choses se passent bien pour moi (Ndlr, entretien réalisé dimanche), et je viens juste s’achever une séance d’entraînement avec les joueurs. Je n’ai pas faim et c’est uniquement l’eau qui me manque, car le corps humain a besoin d’être hydraté, j’ai la gorge sèche. J’ai de légers maux de tête, mais ça ne me perturbe pas pour autant. Tout redeviendra normal dans quelques minutes.

Quelle a été votre sensation lorsque vous avez jeûné la première fois ?

Lorsque vous jeûnez plusieurs jours d’affilée, l’organisme s’habitude et ça devient plus facile.

Avez-vous déjà fait le carême auparavant ?

En Arabie Saoudite j’ai jeûné pendant presque tout le mois, lorsque je drivais la formation d’Al Ittifak. Sachez que nous étions invités quotidiennement par un technicien algérien pour rompre le jeûne et l’ambiance était indescriptible.

Justement, quelle est la différence entre le Ramadhan que vous avez passé en Arabie Saoudite, l’Algérie et le Maroc ?

Vous savez, chaque pays à sa propre culture. En Arabie Saoudite par exemple, les plats servis sont plus intenses. Lorsque j’ai jeûné en étant à la JSK, je me souviens que j’étais en Egypte, à l’occasion d’un match de Champions League et tout était contrôlé, dans l’étage où nous étions. A Alger, ne n’ai pas eu l’occasion de jeûner, car une semaine seulement après l’entame du Ramadhan, on s’est déplacés ici au Maroc. Je pense toutefois que l’ambiance est pratiquement la même et sa ressemble toujours à une fête.

Quels sont les plats que vous appréciez en Algérie lors du mois de Ramadhan ?

Il y a la soupe qui est délicieuse (chorba), mais aussi le bourek est original. En parlant de la cuisine algérienne, il y a le couscous qui est l’un de mes plats préférés. Lorsque j’étais à Sétif, chaque vendredi il y avait du couscous et c’est devenu une habitude. Ici au Maroc, il y a aussi de bons plats, mais je préfère la cuisine algérienne.

Aviez-vous une idée sur l’Islam, avant de travailler dans des pays arabes ?

Absolument. Avant d’entamer ma carrière d’entraîneur, il y avait des joueurs de confession musulmane et qui jeûnaient. C’était un peu difficile pour eux, car ils devaient s’entraînaient deux fois par jour. A travers mon vécu, j’ai constaté que c’est quelque chose de bien sur le plan social, car c’est tout le monde qui se met à table à la même heure, dans une agréable ambiance. A travers mon expérience en Arabie Saoudite et en Algérie, on m’a parlé du Ramadhan et de ses vertus. J’ai eu du plaisir à jeûner et je le referai lorsque l’occasion se présentera.

En ayant jeûné avec le Mouloudia, cela vous a sans aucun doute rapproché des joueurs, puisque vous sentez qu’il est difficile de fournir des efforts…

Je suis proche de mes joueurs tout le temps. Aussi, je sais qu’il est difficile pour eux de s’entraîner en étant à jeun. Seulement, j’ai veillé à ce que la séance de l’après-midi soit allégée. Je tiens juste à préciser que les joueurs se donnent à fond et je les remercie pour leurs sacrifices.

Avez-vous recommandé un certain régime alimentaire aux joueurs, de crainte de prendre du poids ?

J’ai évoqué ce sujet, car un athlète doit toujours surveiller son poids. Toutefois, il est certain que mes joueurs ne prendront pas du poids en ce mois de Ramadhan, car ils jeûnent durant toute la journée et déploient de gros efforts. Mais après l’Aïd, ils devront faire attention.

On a organisé une fête à l’occasion de votre premier jour de carême avec le Mouloudia…

C’est vraiment agréable et je remercie Kamel Kaci-Saïd, les membres du staff et les joueurs pour cette initiative qui nous renseigne sur l’esprit de groupe qui règne au Mouloudia.

En parlant d’esprit de groupe, certains laissent croire que l’ambiance est morose…

Cela me surprend, je peux vous dire qu’il y a une bonne ambiance dans le groupe et vous n’avez qu’à le constater de vous-même. Il y a une bonne entente entre les joueurs, le staff technique et le manager général, Kaci- Saïd, qui veille à ce que l’équipe ne manque de rien.

Si vous n’étiez pas footballeur, qu’auriez-vous fait dans la vie ?

Depuis  mon jeune âge, je me voyais footballeur. Je suis heureux d’avoir réussi une bonne carrière. Etre footballeur, c’est agréable comme métier. Là où vous voyagez, vous jouissez du respect et le fait que les gens vous attendent à l’aéroport, cherchent après vous, c’est quelque chose d’agréable.

Quel est votre meilleur souvenir en tant que footballeur ?

Sans aucune hésitation, la Coupe du monde 1994, après une très longue absence. Notre génération a pu donc relever le défi. Cette participation en Coupe du monde a logiquement attiré les sponsors et donné un nouveau souffle au football suisse qui est en pleine progression.

Qu’est-ce que vous a apporté le football ?

Du respect, la possibilité de connaître d’autres cultures et d’exercer le métier que j’aime.

Aviez-vous souhaité devenir entraîneur ?

Avant d’achever ma carrière de footballeur avec les Grasshoppers de Zurich, j’avais signé un contrat de quatre années, dont les deux dernières années étaient destinées à la conversion d’entraîneur. Au début de mon expérience d’entraîneur, j’ai travaillé dans la formation.

Grâce à votre longue expérience d’entraîneur et de formateur, que pourriez-vous donner au Mouloudia ?

En Algérie je peux donner beaucoup de choses aux joueurs qui doivent apprendre, contrairement au footballeur européen qui a une base solide. On peut donner donc aux joueurs cet outil de travail, car ils veulent apprendre et progresser. J’ai constaté que le joueur algérien est devenu plus collectif et garde moins la balle. Je les conseille aussi à veiller sur leur hygiène de vie pour réussir une bonne carrière. A notre époque, on était carrément dévoués pour le sport, mais les choses ont changé. Maintenant, on veut jouer au football et aller en boîte de nuit, ce qui n’est pas possible. C’est une remarque que j’ai faite même à mon fils.

Vous avez un fils qui est footballeur aussi ?

J’ai un fils qui est footballeur et qui évoluait  en première Division avec les Grasshoppers. Par la suite, son équipe a rétrogradé, car le club a été racheté par une compagnie qui a fait faillite. Mais il prépare sa reconversion dans le domaine de l’immobilier. J’ai un autre fils qui aime le sport et qui est un comptable supérieur, et j’ai une fille architecte.

Excepté le football, aimez-vous un autre sport ?

J’aime tous les sports collectifs qui se jouent avec le ballon, car les sports individuels sont assez difficiles et la performance dépend d’une seule personne, contrairement aux sports collectifs.

Quelle est votre musique préférée ?

Quand j’étais jeune, j’aimais les Pink Floyd, Rolling Stones et Ledzepin. Maintenant, j’écoute la musique du pays où je travaille, et il faut goûter à toutes les cultures. C’est comme pour la cuisine, j’aime manger les plats traditionnels des différents pays.

Qui est, selon vous, la meilleur footballeur actuellement ?

Sans aucune hésitation, Messi qui est un joueur d’exception et qui a tout l’avenir devant lui.

Certains le comparent à Maradona et Pelé…

On ne peut faire de comparaison, car chaque dix ans voire deux décennies, il y a un joueur d’exception qui émerge du lot. Mais laissez-moi vous dire que Maradona est un joueur qui fait avec ses pieds ce qu’il peut faire avec ses mains, c’est un phénomène.

Votre voiture préférée ?

Audi Break familiale, la voiture allemande, c’est la plus solide.

Le dernier livre que vous avez lu ?

La préparation psychologique des joueurs, c’est le dernier livre que j’ai lu et qui est très intéressant.

Qu’est-ce que vous aimez  chez l’être humain ?

Le respect d’autrui.

Ce que vous n’aimez pas ?

L’égoïsme.

Il vous reste un jour à vivre, qu’allez-vous faire ?

J’essayerai de voir les gens que j’aime.