Matériels roulants débloqués au bout de 7 mois : L’état appelé à payer des pénalités

Matériels roulants débloqués au bout de 7 mois : L’état appelé à payer des pénalités

Les matériels restés en souffrance ont coûté à leurs propriétaires, selon l’un de leurs représentants, une importante perte sèche. Est-ce que ce sont les opérateurs qui doivent s’acquitter de ce montant qui englobe le coût du container et les surestaries ?

La libération des matériels roulants bloqués dans les différents ports du pays depuis le 27 janvier dernier, prise par le gouvernement, est révélatrice de tous les dysfonctionnements et de la dilution des responsabilités dans la construction de la décision économique en Algérie. D’aucuns avouent que la mesure de blocage des équipements avait pour principal objectif la distribution de la rente durant le règne de l’ancien président de la République.

L’interdiction de l’importation des positions tarifaires, 87.01, 87.02, 87.03, 87.04 et 87.05, représentant des engins de travaux publics et des tracteurs agricoles, a facilité la fuite des capitaux et a encouragé la hausse de la marge des importations d’autant plus que pour le système SKD des véhicules, l’on n’a pas déterminé et exigé un taux d’intégration.

En un mot, l’on a attribué un marché à des personnes censées être de véritables investisseurs dans la filière automobile, mais qui, finalement, se sont avérées être des corrompues et des corrupteurs que la justice a incarcérés à la prison d’El-Harrach pour tous ces crimes économiques… Les matériels concernés par ce “blocage-déblocage” ont fait l’objet auparavant d’une domiciliation bancaire et d’un transfert effectif de devises, effectué avant le 27 janvier 2019.

Une fois cette procédure accomplie, l’importateur ne peut ni la reporter ni l’annuler. Or, les banques, premières destinataires de cette instruction, devraient interdire toute domiciliation dans ce cadre mais elles ne l’ont pas fait. L’autre problème évoqué a trait aux lenteurs bureaucratiques conséquence de la centralisation de la décision économique. Le cheminement de la prise de décision commence, en effet, au ministère qui a enregistré la plainte des opérateurs touchés puis, elle atterrit au sein des commissions installées à cet effet, pour enfin aboutir au Premier ministère qui tranchera au bout d’une période donnée.

Ce qui a fait que la libération de ces matériels a duré près de 7 mois. Les douanes avaient bloqué, faut-il le rappeler, le dédouanement de tous les matériels roulants importés avant le 27 janvier 2019, en application du régime des licences, supprimé en 2018 pour les véhicules. Cette situation a été provoquée par la mise en place de nouvelles mesures de restrictions douanières aux importations, mais qui ont été appliquées à des marchandises importées avant cette décision.

Cette mesure a causé aux opérateurs des pertes financières très importantes. L’on dénombre plus de 200 opérateurs et investisseurs victimes de cette décision qualifiée d’“anti-économique”. Les matériels restés en souffrance ont coûté à leurs propriétaires, selon l’un de leurs représentants, une importante perte sèche. Est-ce que ce sont les opérateurs qui doivent s’acquitter de ce montant qui englobe le coût du container et les surestaries ?

Défaillance de la gouvernance économique

Une estimation de ces pénalités porte le montant d’un container de 20 pieds à environ 1 million de dinars et à 2 millions de dinars celui à 40 pieds. Un opérateur qui a 5 containers devra s’acquitter ainsi de la somme d’un milliard de centimes ! “Doivent-ils payer des charges dont ils ne sont pas responsables ?”, s’interroge Ali Bey Nasri, président de l’Association nationale des exportateurs algériens (Anexal).

Cependant, l’investisseur qui attend sa marchandise depuis 7 mois et dont le projet d’investissement est bloqué n’a d’autre choix que de payer ces charges pour pouvoir réaliser son projet. Entretemps, l’armateur bénéficie de toutes ces devises. Pour la partie transférable en devises, estimée à près de 4 000 dollars/container (à multiplier sur le nombre de containers en souffrance), elle est au bénéfice de l’armateur sans que ce dernier fournisse le moindre effort…

“Qui est responsable de toutes ces pertes en devises que l’on pouvait bien éviter ?”, se demande encore M. Nasri. Cette incongruité incombe, déclare le président de l’Anexal, entièrement à l’État. Cet amateurisme et ce tâtonnement font éclater au grand jour la défaillance du système de fonctionnement de la gouvernance économique dans notre pays. Un mode à revoir en urgence…

B. K.