Cinquante ans après, l’État français ne reconnaît pas l’ampleur du massacre puisque le bilan officiel reste de trois morts.
Cinquante ans ! Depuis plusieurs jours déjà, a commencé en France la commémoration du massacre du 17 Octobre 1961 quand le préfet de police de Paris, Maurice Papon, avait lancé ses hommes contre 30 000 manifestants pacifiques sortis en famille afin de protester contre un couvre-feu raciste. Bilan : des centaines de morts qui ont rendu la Seine rouge de sang et 12 000 personnes arrêtées et violemment tabassées.
Cinquante ans après, l’État français ne reconnaît pas l’ampleur du massacre puisque le bilan officiel reste de trois morts. Jusqu’en 1991, la tragédie fut couverte d’une chape de silence. Depuis, des historiens et des associations ont déchiré le voile et se battent pour la reconnaissance officielle de ce crime rendu à la mémoire par des plaques commémoratives et des marches.
Cette année sera marquée par l’inauguration à Nanterre d’un boulevard qui portera le nom du 17-Octobre-1961. Nanterre abritait en ces temps, un immense bidonville d’où sont partis de très nombreux manifestants. Une marche s’ébranlera à hauteur du cinéma le Rex sur les Grands boulevards vers le pont Saint-Michel. Le FLN avait appelé les Algériens à défiler dans les rues les plus huppées de la capitale française pour donner de la visibilité à son action. À Nanterre, la commémoration animée par l’association les Oranges a commencé depuis le 7 octobre avec un débat autour de l’historien Gilles Manceron.
Le 15 octobre, un colloque international sur le thème “une mobilisation algérienne” réunira des historiens français, algériens, anglais ainsi que des passeurs de mémoire. Le lendemain, des stands seront érigés en face de la préfecture où il y aura des prises de parole. Un débat sera organisé le 20 octobre avec Jean-Luc Einaudi qui a défié la vérité officielle, en publiant en 1991 “la Bataille de Paris” qui parle de centaines de morts. Les 22 et 23 octobre sera présentée la première pièce de théâtre consacrée aux évènements. “La pomme et le couteau” est écrite par Aziz Chouaki et mise en scène par Adel Hakim. Aujourd’hui même (lundi), un débat est prévu avec les historiens Benjamin Stora et Stéphane Hessel ainsi qu’avec le journaliste Edwy Plenel, directeur du site Médiapart qui publie depuis plusieurs jours des témoignages sur le massacre. Le débat sera suivi d’un spectacle avec notamment la participation du chanteur Idir.
“50 ans après, il est temps que les plus hautes autorités de la République reconnaissent comme crime d’État les massacres commis par la Police parisienne le 17 octobre 1961 et les jours suivants, que la “Fondation pour la mémoire de la guerre d’Algérie” soit refondée sur des bases totalement différentes, que la liberté d’accès aux archives devienne effective pour tous : historiens et citoyens, et que la recherche historique sur ces questions soit encouragée, dans un cadre franco-algérien, international et indépendant”, demande un collectif d’associations. Un site internet dédié recense la plupart des activités prévues dans le cadre de ce cinquantenaire.
A. o.