Marzouki veut un nouveau gouvernement

Marzouki veut un nouveau gouvernement

L’armée s’était retirée hier matin, quelques heures après son arrivée, de la ville de Siliana, où des violences opposent manifestants et policiers depuis mardi, alors que des pourparlers entre le gouvernement et des syndicalistes sont attendus.

L’armée tunisienne s’est déployée vendredi soir à Siliana – d’ou elle s’est retirée dans la matinée d’hier – où des heurts opposent depuis quatre jours policiers et manifestants, et le président a réclamé la formation d’un gouvernement restreint à même d’endiguer l’instabilité du pays.

Après plusieurs heures d’affrontements entre les forces de l’ordre, qui ont fait usage de gaz lacrymogènes, et les manifestants, armés de pierres et de cocktails Molotov, l’armée a été déployée sous les hourras de la foule, ont constaté les journalistes de l’AFP. «Un accord est intervenu entre les syndicats et des responsables de l’armée pour le retrait de la police et la prise en charge (de la sécurité) par les militaires», a affirmé Néjib Sebti, secrétaire général régional de l’Ugtt, le principal syndicat

tunisien. Mais dans la, soirée de vendredi (vers 20h GMT), des tirs de gaz lacrymogènes ont à nouveau été effectués alors que des manifestants cherchaient à s’approcher d’un important poste de police. Les policiers et gardes nationaux effectuaient des patrouilles. La Tunisie est sous le régime de l’état d’urgence depuis la révolution de janvier 2011. Lors d’une allocution télévisée, vendredi soir, le président Moncef Marzouki s’est vivement inquiété du risque d’instabilité dans le pays après la vague de violences qui a fait quelque 300 blessés à Siliana, ville déshéritée dont les habitants réclament, comme à l’époque de la révolution, de meilleures conditions de vie. Il a appelé à la formation d’un gouvernement restreint, alors que les manifestations d’habitants excédés par la misère dégénèrent en violences régulièrement. «L’intérêt de la Tunisie nécessite aujourd’hui un gouvernement restreint et efficace regroupant les compétences», a-t-il dit à la télévision. «Nous n’avons pas une seule Siliana (…) j’ai peur que cela se reproduise dans plusieurs régions et que cela menace l’avenir de la révolution», a-t-il dit, notant le décalage entre les «attentes immenses» de la population et «le rendement du gouvernement».

M.Marzouki n’a pas le pouvoir de remanier le gouvernement, une décision qui revient au Premier ministre, Hamadi Jebali, issu du parti islamiste Ennahda, majoritaire à l’Assemblée nationale constituante (ANC). Des habitants de Siliana ont par ailleurs prévu d’aller manifester hier, toujours pour obtenir le limogeage du gouverneur et un plan de développement régional. Une vaste manifestation avait rassemblé dans le calme vendredi matin des milliers de personnes pour une marche «symbolique». La lutte contre la pauvreté et la fin de l’arbitraire policier étaient déjà les revendications phares de la révolution tunisienne.

A l’étranger, les diplomates ont exprimé de premières inquiétudes. La France a fait part de sa «préoccupation» face au «nombre élevé de blessés», tandis que le Haut commissariat de l’ONU pour les droits de l’homme a condamné «le recours excessif et disproportionné à la force» par les policiers, en référence aux tirs de chevrotine qui ont fait des dizaines de blessés mercredi. Ces nouvelles confrontations interviennent à l’approche du deuxième anniversaire, le 17 décembre, du début de la révolution tunisienne.